— Orca, ça va être très turbulent… Nous allons probablement devoir créer notre propre sortie… Enlève ta carte pour éviter que l’on se fasse pister.

Orca suivait l’ordre de Duncan, ou plutôt se laissait faire par celui-ci sans broncher ; elle n’avait pas le choix, après tout. Depuis le début, son avis ne comptait pas réellement, en son statut de jeune sotte prise en otage par ces envoyés du gouvernement. Néanmoins, elle voyait à quel point le basané se tuait à la tâche pour la protéger, jusqu’à se faire prendre en distance par cette agente ennemie qui avait emporté PsychAli avec elle. Finalement, tout cela pour qu’ils en arrivent à cet instant, fatidique, le point culminant de l’état d’urgence, celui qui voulait dire qu’ils avaient clairement outrepassé leurs limites, les paroles cryptiques et binaires le prouvaient. Il semblait d’ailleurs que Duncan l’avait compris bien avant elle-même, sachant qu’il s’était mis à la tâche avant même qu’elle ne se rende compte. Et une fois qu’il avait créé une brèche sur la plateforme, leur permettant alors de quitter cet étage sans identifications, celui-ci lui commanda de s’exécuter. De sauter, très exactement. Les yeux fermés, les bras ballant, elle s’exécuta, non pas par confiance envers l’archer, mais par pur désespoir, apercevant les différents robots s’approchant d’eux à toute vitesse. Et apparemment, elle avait eu raison de s’exécuter ! Le son distinct, familier et continu qu’elle entendait d’en-haut lui rappelait des armes à feux tirées en rafale. C’était soit la mort soit… La mort, de son point de vue. Elle l’attendait alors, patiemment, s’attendant à finir déchiquetée par la gravité.

Mais cet instant n’arriva pas. Evidemment, cet homme, toujours cet homme ; c’était à croire que lui, contrairement à PsychAli, en avait quelque chose à faire de sa santé et sa survie ! Orca n’en revenait pas. Lorsqu’elle posa les pieds au sol, elle n’avait qu’une pensée dans sa tête : ce Duncan, sans doute avait-il l’étoffe de devenir un ami. Elle se doutait évidemment qu’il ne ferait pas long-feu, dans le terrorisme, il manquait la zéléitude qui venait avec cette bien noble passion. Mais quand même ! Pour la première fois depuis leur arrivée sur Vidéo, Orca souriait, bien contente d’être en vie.

— Rien de cassé ? J’ai besoin d’un service… Appelle le Vitamin Sea : nous avons besoin d’un moyen de transport pour quitter l’île dans les minutes qui suivent!
— B-Bien sûr ! Compris.

Elle attrapa alors l’appareil de Duncan, puis passa le coup de fil sans broncher ; et de manière surprenante, le capitaine du bateau qu’ils avaient appelé au préalable lui répondit assez vite.

— Ici l’Agente Orca ! Nous sommes attaqués par des robots, nous avons besoin d’un moyen de transports pour nous échapper de la ville, et vite ! Préparez le bateau pour notre départ !!

… En fait, c’était cool d’être un agent secret.

____

Quelques temps auparavant, du côté de PsychAli...

Malheureusement pour Adelheid, ou heureusement pour PsychAli, cette dernière était si occupée à sa sale besogne qu’elle ignorait totalement les questions de celle-ci ; des questions ô combien importantes… Auxquelles la détective n’avait aucune réponse. Evidemment, elle n’avait aucun moyen de savoir qui était ce « boss », elle n’avait prononcé ce terme que dans la fougue du moment, par stress. Et pour ce qui était de la question sur ses lieux d’origine… Elle amenait PsychAli à se demander ce qu’il en était de leur propre supérieur hiérarchique. Il avait également l’air de connaître les lieux, un minimum du moins. Le souci était simplement de savoir s’il leur cachait des informations, ou s’il était juste un chouïa plus informé qu’eux. Ces questions trottaient dans sa tête au moment où elle fouillait le tiroir sans résultat concret.

En jetant un coup d’œil à l’ennemie, elle remarquait qu’en trifouillant les différents boutons face aux écrans on remarquait une mosaïque, que PsychAli n’arrivait pas à distinguer facilement de sa position ; mais elle n’avait pas le temps de s’interroger sur ces sottises. Elle ordonna à sa partenaire de fortune de fouiller dans le boîtier, et celle-ci s’exécuta sans broncher, les menant alors à leur découverte… Elle entendait son Escargophone noir s’excité dans sa poche, et plongea sa main dedans pour l’empêcher de prononcer plus de mots ; il était hors-de-question qu’ils ne se fassent découvrir. Elle était certaine qu’il ne s’agissait que de la conversation entre Duncan et leur supérieur, de toute manière, celui qui confirmait à ce dernier que la mission était bientôt terminée…

Se faisant, remarquant le système difficile que composait ce boîtier blanc, PsychAli rejoignit l’agente adverse dans la besogne, démontant avec elle l’appareil jusqu’à ce qu’elles fassent toutes les deux face à un dossier, sur lequel était simplement écrit « Projet Hyperion »… C’était donc là leur objectif final, pensait-elle. Ils avaient eu à faire face à leur premier échec sur Vidéo, retirer les cartes de Gammas innocents, que l’araignée avait très bien compris avoir assassiné, bien qu’elle se le niait depuis tout ce temps ; ils s’étaient perdus dans cet infernal labyrinthe, sans savoir combien de temps ils avaient pris dedans… Elle avait failli devenir complètement dingue, perdre patience et abandonner la mission. Tout cela pour ça. Ce dossier était-il assez important pour que deux agents du CP soient amenés sur ces lieux en secret, sachant qu’Organic City était officiellement une île affiliée au Gouvernement mondial ? Ou au contraire, Duncan et PsychAli étaient-ils encore utilisés comme de la poudre à canon, pour un but encore plus profond, inconnu d’eux ? Mystère… Et elle n’avait pas le temps de se perdre dans ce puit sans fond de questionnements, elle avait un rôle à jouer.

— Bravo ! On a trouvé ce qu’on cherchait… Je te laisse l’honneur. dit PsychAli en reprenant son visage des plus grands jours. Je répondrai à tes questions lorsque nous serons arrivés en lieux sûrs.

La curiosité de PsychAli était, cependant, un ennemi bien trop puissant ; elle savait que si elle ouvrait ce document, malgré les mots de son supérieur qu’elle avait réussit à capter malgré tout, elle succomberait dans sa soif de savoir ; il y avait toujours plus tard. Adelheid était une utilisatrice de fruit du démon, une combattante certes, mais l’agente avait clairement de quoi rendre son danger trivial ; elle n’avait donc aucun souci à se faire de ce côté-là.

— Si je ne m’abuse, tu as dû voler la carte d’un Gamma pour venir ici n’est-ce pas ? Je te conseille de t’en débarrasser. Ils pourraient nous pister avec ça. Si je ne me trompe pas… Ça fait trois minutes, alors la suite risque d’être délicate.

Elle prononçait ces mots en retirant la carte collée à sa poitrine, sous sa veste, puis en balançant les morceaux de métal qu’elle gardait en elle depuis tout ce temps. Elle se sentait presque voler, à présent. Mais, surtout, elle se sentait… Etrangement sereine. L’alarme qui continuait à retentir à l’extérieur de la salle allait sûrement leur casser les tympans de nouveau lorsqu’elles en seraient sorties, et pourtant, le fait que la mission était bientôt terminée (pensait-elle), lui retirait un poids difficile à supporter depuis le début de celle-ci. Ses doutes commençaient à se dissiper, ils voyaient une porte de sortie !

Sur le chemin, PsychAli remarquait Saigh à terre, comprenant que seule l’oiseau avait pu les rejoindre dans cette salle secrète… Sacré Duncan. Pour ne pas éveiller les soupçons, PsychAli ramassa la flèche à terre manuellement, puis elle s’extirpa de cette base secrète pour retrouver l’enfer d’Organic City, son infernale cacophonie ainsi que la compagnie qui allait avec.

— L’heure est à la course, je suppose. Tu es un Zoan, donc tu peux suivre mon rythme !

Et en vérité, Adelheid était certainement plus rapide que PsychAli, si l’agente n’utilisait pas l’Incision pour se déplacer ; mais comme d’habitude, il s’agissait là d’un mensonge éhonté dans le but de faire plonger le doute dans l’esprit de l’adversaire. Si celle-ci était convaincue que l’araignée-humaine était dans son camp, alors il serait facile de la convaincre qu’elle était plus forte, alors que ce n’était pas forcément le cas. Les deux femmes démarraient alors leur course vers l’ascenseur : elles devaient fuir de cet endroit, et vite. Et il était certain que sans leurs cartes, elles allaient devoir forcer le chemin vers l’étage inférieur, d’une manière ou d’une autre. Ou plutôt, il semblait que Duncan s’en occupait déjà, ses mouvements de jambes laissant croire à PsychAli, de sa position, qu'il utilisait une des techniques des Six Pouvoirs pour créer une échappatoire. En soit, elle l'aurait fait s'il n'avait pas eu l'idée avant... C'était une bonne nouvelle de plus ! Elles avaient une porte de sortie qui s’offrait à elles ! Elles allaient enfin pouvoir sortir de ce cauchemar, la mystérieuse agente ennemie allait pouvoir se faire capturer sans soucis, PsychAli et Duncan pourraient lire ce que ce dossier renfermait malgré les instructions de leur supérieur, et tout finirait bien…

— INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS ! INTRUS !

Evidemment. Un haussement de sourcil, puis une moue perdue, épuisée, montrait l’état d’esprit de l’araignée à cet instant. Tous ses espoirs d’une fin de mission sans bavure disparaissaient lorsqu’elle entendait le premier mot prononcé par ces policiers de ferrailles qui les chassait maintenant. Ils venaient de derrière eux, mais également des trois autres entrées de la salle qu’ils allaient rejoindre: devant, à gauche, à droite… Et les tirs ne faisaient que commencer.

A cet instant, les doutes de PsychAli revenaient, durant un cours instant qui pourrait lui être fatal. Quelques seconds avants, elle était confiante que la mission était une réussite. Et maintenant, elle avait un doute. Et d’un côté, c’était de sa propre faute, pas vrai ? Elle pouvait se remémorer tout ce qu’ils avaient fait depuis le début de la mission : leur premier échec à l’ascenseur, le temps qu’ils avaient perdu dans ce labyrinthe, la présence de cette intruse dont PsychAli n’était toujours pas sûre de l’allégeance, la scène qu’elle avait causé pour la récupération de cette carte… On pourrait croire que tout avait foiré à un instant précis, ou un autre ; l’araignée n’en avait cure. Elle revoyait son corps dans l’allée de la place Morgan, entouré de mines anti-personnelles, elle ressentait de nouveau son dos brûler, ses vêtements se désagréger face à la violence des flammes. Et il y avait une chose qui ressortait de ces souvenirs détestables qu’elle préférait oublier : elle n’avait aucune intention ni d’abandonner, ni même de faillir une seconde fois. Cela, elle en était certaine.

— T’es une Zoan non ? Transforme-toi en forme complète ! Et fonce ! Ensuite saute !!

En prononçant ces mots, PsychAli avait déjà commencé à utiliser les capacités de son fruit, d’une manière qu’elle détestait par ailleurs ; en utilisant la transformation partielle que lui conféraient ses pouvoirs, elle sortit des fils de soie de sa bouche, qu’elle accrochait à la flèche qu’elle tenait toujours à sa main, puis elle lui ordonnait ces mots simples.

— Saigh, toi tu as juste à planer.  

Elle prononça ces mots en accrochant un autre filament de toile sortant de sa bouche sur l’épaule d’Adelheid, puis elle se transforma dans sa forme complète juste après, pariant sur le fil de soie déjà attaché à sa cavité et à la flèche pour rester accrochée à l’oiseau, tout en bénéficiant de la vitesse de la féline lorsqu’elle se transforma dans sa forme complète. PsychAli fit vite de s'accrocher au pelage d'Adelheid à l'aide de ses huit pattes, confiante de son plan. Aini, elles parcouraient alors la distance qui les feraient entrer dans la salle de l’ascenseur ; PsychAli pariait sur l’imprécision de ces robots (en espérant qu’ils ne soient que de simples robots et pas des cyborgs aux compétences de visées approfondies) pour éviter les tirs en rafale, cloitrée dans la fourrure d’Adelheid qui se protégeait à l’aide de son haki de l’armement. Et donc à cet instant, elle se pensait en sûreté. La femme-léopard avait obéit à ses ordres, ou alors avait simplement suivi ses instincts de guerrière ; le seul souci c’était qu’elle gardait le dossier dans sa gueule… PsychAli priait tous les dieux qu’elle connaissait pour qu’elle ne froisse pas ou ne bave pas sur l’objet de leur mission.

Finalement, elles atteignirent la salle, dernier point de relais avant qu’ils ne rejoignent son collègue. Celui-ci avait déjà sauté avec Orca, par ailleurs. Il ne leur restait plus qu’à plonger à leur tour dans le trou créé par Duncan, l’une aidant l’autre à atterrir sur le sol sans encombre. Le bout du tunnel prenait une forme compréhensible, l’agente voyait enfin un espoir dans cette situation. Seulement… Tous les poils se trouvant sur son corps se hissaient, au même titre qu’un énorme tintement aigu lui hurlait à la mort, lui rappelant qu’ils avaient osé mettre les pieds sur Jericho, et que par conséquent, ils devaient en payer le prix. A leur droite, le visage inquiétant d’une jeune femme qui, sans prononcer une seule menace, transforma son bras droit en une arme grotesquement mortelle : une scie rotative qui, déjà dans sa lancée, avait pour but d’attaquer l’entièreté de la salle de manière horizontale. On n’avait pas le temps de réfléchir, en l’état, tant la vitesse du déplacement et sa position en tant qu’araignée sur le dos du léopard n’était pas si pratique. La détective ne pouvait même pas calculer à quelle hauteur celles-ci devaient se baisser pour éviter l’attaque, juste… Elle priait. Pour qu’Adelheid ne soit pas assez haute pour subir l’attaque, qu’elle-même ne soit pas repérée par ce cyborg, clairement à la charge de la sécurité de l’endroit. Elle tirait même vers elle la toile d’araignée accrochée à Saigh, préférant garder la flèche-animale près d’elle malgré sa peur, plutôt que risquer qu’elle ne se prenne les dégâts de cette attaque dévastatrice.

Finalement, une fois que l’énorme chat doré atteignit l’ascenseur et le trou formé par Duncan, elle n’avait d’autre choix que d’y plonger, constatant l’urgence de la situation elle aussi. Maintenant, PsychAli devait agir, et très vite ! Une fois dans les airs, c’était à elle de gérer la situation, sachant pertinemment que l’ennemie n’allait pas pouvoir survivre à une telle chute sans aide extérieure. Et en temps normal, la laisser mourir de cette manière ne serait pas de refus, mais d’un autre côté… Elle devait s’assurer de quelques choses, importantes. La blonde pouvait jouer elle aussi la comédie, feindre l’incrédulité ou l’ignorance tandis qu’elle savait pertinemment qui était son supérieur. Ou alors elle pouvait simplement avoir des informations capitales sur l’île, ce qu’elle cachait et ses secrets. Tant qu’elle n’était pas certaine de toutes ces choses-là, elle n’allait pas se permettre de la laisser mourir.

PsychAli prit alors sa forme humaine, puis elle tissa une toile de son gant droit, vers la paroi du tunnel vertical qui liait Jericho à Vidéo, et attrapa la patte de léopard en plein vol de sa main gauche. Saigh, lui, sentant son maître plus bas dans la grotte, fonça vers lui, apparemment traumatisé par le choc de toute cette opération, tandis qu’Adelheid pouvait sentir, de son côté, un liquide chaud, rougeâtre, couler le long de sa patte. Puis elle pouvait entendre un juron, violent, sortir de la bouche de PsychAli ; néanmoins, elles n’étaient pas sorties d’affaire. Son gant continuait donc à tisser la toile, le plus rapidement possible, le temps de les faire descendre vers le bas, dans l’espoir de rejoindre Duncan ; qui savait combien de temps la femme à main de scie prendrait pour les suivre jusqu’ici. Ils ne savaient même pas jusqu’à où elle pouvait se diriger…

Les petits hennissements de douleur de la détective résonnaient dans le tunnel, jusqu’à ce qu’elle ne pose le pied au sol accompagnée d’Adelheid. Constatant différentes douleurs au niveau du corps, elle se doutait très bien de ce qui était arrivé. Seulement, elle n’avait pas le temps de se plaindre ou même de constater combien de balles l’avaient touchées ou à quels endroits. Ce qui comptait, c’était de retrouver son partenaire et quitter cet endroit, le plus vite possible.

Spoiler:

HRP: