Pourquoi ? Cette simple question continuait de tarauder le masqué, encore et encore, jour après jour, lors de chaque seconde d'accalmie qu'il parvenait à arracher à son quotidien bien trop agité à son goût. La vie était belle pourtant, pour une fois, il en avait rêvé de nombreuses nuits alors que la faim le tiraillait et qu'il était persuadé que son estomac se déchirait sous ses propres râles d'agonie. Il avait de quoi manger à sa convenance, peut être même trop pour être à l'aise avec ses propres convictions, un foyer qu'il partageait avec des camarades en qui il avait pleine confiance, un objectif clair ... Alors pourquoi ? C'était ça qu'il souhaitait atteindre par dessus tout, un tant soit peu de stabilité, de tranquillité d'esprit quant à l'avenir, voilà pourquoi il se battait dans le fond. Pour ne plus avoir à se creuser les méninges, à se torturer l'esprit en tentant de trouver des réponses à des questions insolubles. Il s'était battu pourtant, de nombreuses fois même depuis son retour sur cet océan où il était, mais rien ne changeait. Certaines interrogations disparaissaient mais elles se faisaient bien vite remplacées par d'autres, plus compliquées, plus profondes, compliquant son cheminement de pensée chaque jour un peu plus. Il avait tout. Alors pourquoi n'arrivait il pas à atteindre le calme intérieur à ce moment précis ?




Il avait beau ne pas les voir lui-même, mais la plupart de ses questions avaient des réponses claires. Son zippo en fer blanc qu'il persistait à faire tourner entre ses doigts par exemple, plus par mémoire musculaire qu'autre chose, amenait son esprit à des souvenirs qu'il pensait salutaires. C'était pourtant loin d'être le cas, ses sentiments se mêlant en un tas incompréhensible ne faisant que faire monter le doute en lui. Il ne se souvenait même plus réellement du visage de celle qui l'avait forcé à remplacer son briquet fétiche par une babiole sans âme. Pourtant elle continuait de le hanter, cette nuit lui revenant de temps en temps, lui faisant du bien en premier lieu, ce ressenti positif au premier abord amenant son lot de regrets et d'amertume l'assaillant juste derrière. C'était elle qu'il voulait, par dessus tout, la voir, lui raconter ce qu'il avait vécu depuis, entendre ses histoires à elle, tout simplement être avec elle. Elle, toujours elle. Il en venait à maudire son caractère si faible face au sexe opposé qui avait une main mise bien trop puissante sur lui et avait tendance à le pousser à bout. Mais ça, finalement, ce n'était que le cadet de ses soucis. Ce n'était pas à cause de la détective qu'il se laissait avoir par le spleen ces derniers temps, ça il en avait l'habitude depuis des années maintenant, le manque amoureux était une sorte d'état par défaut qui l'accompagnait chaque jour. Il en avait vécu des choses sur Whiskey Peak ces derniers mois, bien plus d'aventures loufoques et de rencontres surprenantes qu'il n'aurait pu l'imaginer en y débarquant la première fois. Seule une expérience l'agrippait aux tripes cependant, une nuit loin d'être comme les autres. L'horreur, tout simplement.

Ce n'était plus tant que ça les regrets qui l'assaillaient suite à cette mission beaucoup trop dangereuse qu'il avait accepté par pure vanité et qui l'avait plongé dans un cauchemar sans nom, c'était une question claire : pourquoi ne l'avait-il pas tué ? Il se repassait la scène en boucle, chaque fois qu'il fermait les yeux pendant un temps, puis un peu moins ces derniers temps il fallait bien l'avouer, mais tout de même assez pour le rendre fou. Il se revoyait bien ancré sur le sol spongieux de Rhum Camp, la poussière mêlée à un sang vicié recouvrant ses vêtements. Il avait tout donné, il était persuadé qu'il allait pouvoir mettre fin à cette histoire d'un coup de lame comme il l'avait fait si souvent. Mais non, il s'était retrouvé au sol, complètement inerte, ne sentant plus la moindre parcelle de son corps si ce n'était la boule brûlante dans son estomac, la peur, primale et instinctive, celle qu'on ressent lorsqu'on sait ses derniers instants arrivés. Complètement à la merci du monstre à peine humain dont il s'était juré de mettre fin à la folie. Il lui avait susurré quelques mots, énigmatiques, chantants, terrifiants. Pourquoi ne l'avait-il pas tout simplement tué ?




Il avait fait la paix avec les morts de Fazon et de Vildred, bien que l'expression de terreur pure gravée à jamais sur le visage blême de l'adolescent qui s'était fait exécuter sauvagement ne quitterait jamais son esprit. Il ne comprenait tout simplement pas pourquoi lui avait survécu à tout ça, mais pas les autres. Il n'arrivait même pas à s'en vouloir finalement, bien trop têtu qu'il était à laisser son ego contrôler tous les aspects de son existence, bloqué dans une sorte de culpabilité du survivant non assumée. Il se retrouvait donc là, alors que l'aube disparaissait doucement pour laisser place au jour, adossé à l'arrière de la cabine centrale, faisant face à la rembarde arrière du navire. Le cendrier rempli de mégots à ses côtés confirmant bien à quiconque en douterait qu'il n'avait pas vraiment dormi cette nuit, mais qu'importe, il voulait simplement profiter de quelques heures en solitaire, pour réfléchir, même si c'était en vain.

Maintenant que son navire était occupé, trouver de tels moments de calme s'avérait plus rare, alors il profitait de la nuit pour se recentrer un minimum. Détestant cette version de lui-même, celle qui doutait, au bord de la déprime, il se refusait à montrer cet aspect détestable de sa personnalité à ses camarades, les quelques nuits où ça lui arrivait. Ils avaient mis leurs vies entre ses mains, ce n'était pas le gamin pleurnichard qu'ils avaient rejoints mais bien l'homme sûr de lui et de ses convictions, celui qui était fort, qui faisait face à l'adversité, toujours prêt à soulever une daronne ou à terminer un chauve d'une punchline assassine.

Alors c'était cette version de lui qu'il leur montrerait, se hissant difficilement sur ses jambes pour se tenir debout. L'heure n'était plus à la chouinade, il y avait des choses à faire désormais. Après avoir glandé pendant près de deux mois, il fallait bien avouer qu'il était temps ! Terminant le reste de son café froid d'une traite, relevant son masque de quelques centimètres pour venir caler une cigarette entre ses lèvres, il était prêt. Le soleil désormais levé lui faisait un bien fou, ses rayons salvateurs caressant sa peau lui rappelaient son enfance au pays des sables. Ses pensées étaient plus claires désormais, une bonne nuit blanche à ressasser le passé et on n'en parle plus finalement. D'un pas lent, profitant de la fraîcheur de la matinée, il suivait ainsi la rembarde du navire pour en rejoindre le pont central, passant par la gauche de la cabine.

Durant ce trajet des plus revigorants, il en profita pour dresser un bilan rapide de la situation. L'île aux cactus était bien loin derrière eux désormais et ils se dirigeaient promptement en direction de Balgimoa, la fameuse île révolutionnaire. La fête des sciences sonnait bien, bien qu'elle n'était qu'un prétexte pour le masqué au final. Il souhaitait se rendre sur cette fameuse île depuis bien longtemps désormais, depuis le jour où ils avaient déclarés leur ralliement à la cause révolutionnaire pour être plus précis. Cette dernière ne correspondait pas vraiment aux valeurs du capitaine il fallait bien l'avouer, mais il ne pouvait manquer la visite de cette île pour rien au monde, lui qui faisait ses premiers pas dans la voie de la désobéissance civile sur Grand Line. Il s'en voulait déjà bien suffisamment de ne pas avoir pu être présent à Star-Top Nation, qui était son premier objectif sur cet océan et dont les évènements ne pouvaient être qualifiés que de tragiques.

C'était un massacre, ce simple fait ne pouvait absolument pas être remis en question et ne pas avoir eu l'occasion de s'y interposer pour prôner sa propre vision de la justice sociale le rongeait. Il s'était ainsi rendu compte, plus que jamais, que les différentes cellules révolutionnaires ne partageaient absolument pas la même vision de leur combat, en tout cas pas en ce qui concernait les moyens d'en arriver à leur objectif commun de faire tomber le Gouvernement Mondial. Tous les moyens n'étaient pas bons pour en arriver là, pas aux yeux de Blake en tout cas et c'était cette justification seule qui le fit rejeter Kropotkine des modèles potentiels à suivre. Tout ce qu'il voulait de lui désormais, c'était de lui coller une bonne vieille droite des familles au nom des victimes suivant son attentat. Peut être qu'il s'autoriserait une discussion avec lui après ça, mais cette droite restait non négociable quoi qu'il arrive.

Ainsi, c'était bien cette fête de la science qui avait poussé le capitaine à prendre la mer pour enfin quitter Whiskey Peak. S'il y était resté aussi longtemps, sans compter les quelques escapades effectuées sur les îles alentours ces derniers mois, c'était surtout pour ne pas réitérer la même erreur que lors de son arrivée sur la route de tous les périls : il lui fallait un équipage. Il se considérait désormais comme bien entouré, suffisamment en tout cas pour prendre la mer et entreprendre des projets sérieux. Dieu seul sait ce qu'il serait arrivé à Rhum Camp il y a deux mois si il avait été mieux accompagné ... Dans le fond, il aurait préféré former sa petite troupe un peu plus longtemps, pour être certain de ne plus jamais se faire surprendre par des adversaires trop puissants, mais l'occasion d'aller jeter un œil à la première nation révolutionnaire de Paradise sous couvert d'une grande fête était trop belle pour ne pas immédiatement prendre la mer. Alors ils étaient partis dans la précipitation, sans forcément s'assurer de la cohésion de l'équipe avant ça. Avait-il seulement le choix finalement ? Plus le temps passait et plus il avait l'impression de voir ses efforts de recrutement s'effriter au fur et à mesure, lui donnant l'impression que son navire était davantage un hall de gare qu'un véritable quartier général. Arrivé au niveau de la proue depuis quelques minutes déjà, il laissa ses émotions prendre le dessus et se permit soudainement un cri, juste histoire de se calmer les nerfs un minimum.

— OOOOODACHIIIII !!!

Le poing levé vers les cieux qu'il secouait ardemment devant lui, il maudissait le sabreur au chapeau trop grand de tout son être. Leur rencontre avait été mouvementée certes, au point d'en arriver à un duel entre les deux hommes. Pourtant le samouraï lui avait assuré qu'il le suivrait sur les mers, qu'ils crameraient Mariejoa ensemble, malgré leurs différences. Mais non, il avait purement et simplement disparu depuis plusieurs mois. Où était il ? Personne n'en avait aucune idée, Little Garden restait la possibilité la plus logique, sachant que c'était au large de cette île qu'il avait subitement quitté le navire pour disparaître dans la nuit. Des semaines durant, Blake était persuadé qu'il reverrait la bouille du dernier Imagawa sortir de nulle part, avec une belle histoire à raconter, accompagné de son bien joli sabre. Était-il seulement encore en vie ? Il tendait vers l'imbécilité finalement, rien n'était donc moins sûr. quel gâchis ce serait que sa magnifique arme soit ainsi perdue ... Mais la lame inflexible n'était pas le seul à avoir disparu sans crier gare, désertant l'équipe pour des raisons obscures. Ah ça non, il n'était pas le seul, ce qui méritait bien un nouveau hurlement vers les cieux.

— SAAAAKUUUURAAAAAAA !!!

Elle, pour le coup, il la regrettait vraiment. Elle était maligne, douée autant au combat qu'à la charpente, bien qu'un peu excentrique sur les bords mais surtout elle avait du cœur. En quelques semaines à peine elle était devenue l'exemple d'empathie à suivre pour le sabreur. Elle était son idéale, la gentillesse incarnée, toujours prête à aider les autres en dépit de son propre bien être. Il aurait aimé devenir plus comme elle, mais non, elle aussi avait disparue. Ils étaient arrivés sur Whiskey Peak ensemble et ils avaient gardés contact plusieurs semaines, même après les évènements de Rhum Camp. Puis elle était introuvable, subitement, elle aussi. Pourquoi tous ses camarades disparaissaient aussi soudainement ? Était-il maudit ? Son entreprise était-elle vouée à l'échec depuis le début ? Pouvait-il seulement encore accorder sa confiance à qui que ce soit ?

Le capitaine fut tiré de sa colère contre le monde, le destin et tout ce bordel par Murphy, arrivant derrière lui avec tout le manque de discrétion qui le caractérisait. Vraiment, il tenait bien plus du mammouth que du chat celui-là. Ayant lâché son poste pour venir investiguer la source des hurlements de son ami de longue date, il s'approcha doucement de lui pour lui susurrer quelques mots, une confession qu'il semblait garder pour lui depuis bien trop longtemps.

— Euh ouais cap'tain, désolé de te déranger pendant que tu cries famine mais tant que t'y es euh ... On a pas vu Marco depuis qu'on est partis ...

— Attends, quoi ? Il était pas dans la cale en train de lire comme d'hab ?!

— C'est-à-dire que je l'ai trouvé nulle part en fait, je pense qu'il est toujours sur l'île. Et aussi t'as pas de nouvelle de la petite Mink de la dernière fois parce qu'en fait-

— MAAAAAAAARRRRCOOOOOOOOOOO !!!

Sa fureur était dantesque, forçant le Mink à fuir pour rejoindre son poste alors qu'il attendait des informations de son capitaine concernant sa compatriote de Zô rencontrée il y a quelques semaines dont le timonier était tombé éperdument amoureux. Ce n'était pas ça qui était important pour Blake dans l'immédiat, il voulait faire entendre sa rage par les cieux, par les dieux eux même, que sa colère résonne avec la force de mille soleils vers l'horizon, jusqu'à que le robot qui en était responsable puisse l'entendre et comprendre quelle furie il avait relâché sur le monde.

Au bout de quelques secondes, il baissa le poing, se rendant compte qu'au final il n'était pas vraiment seul non plus, malgré toutes ces trahisons lui brisant le cœur chaque jour un peu plus. Il avait des nouveaux camarades désormais, une nouvelle famille en qui il pouvait avoir confiance et même si Jean-Cascade était resté sur Whiskey Peak derrière eux pour continuer ses recherches à propos du maire de la ville, ils étaient bien assez sur le navire. Murphy était bien présent, ça c'était certain, il avait aussi croisé Alaude la veille et Elvis devait sûrement croupir dans une mare de piquette quelque part pas loin ... Par contre il n'était pas certain que Joann et Jim soient de la partie, il faudrait qu'il le vérifie ça, sans compter le petit médecin ... L'alouette l'avait amenée ? Ou est-ce qu'elle lui en avait juste parlé ? Sa mémoire était floue, en même temps ils avaient été forcés de quitter l'île aux cactus en panique totale alors que Rhum Camp brûlait au loin, un peu plus et ils n'arriveraient pas pu arriver à temps pour voir la cérémonie d'ouverture du festival. C'était d'ailleurs certainement pour ça que le benjamin de l'équipage n'était pas présent finalement.




Enfin, même s'il n'était pas certain de qui se trouvait exactement à bord, il était certain d'une chose : c'était suffisant, amplement même. Rien que de penser à ses camarades, une nouvelle motivation vint le prendre aux tripes. Il n'avait pas à s'inquiéter, avec ces personnes là à ses côtés, son équipage, sa famille, il se sentait prêt à affronter le monde. Faisant face à l'horizon, s'en allumant une petite dernière pour la route, il laissa ses regrets s'en aller pour se laisser envelopper par une confiance presque aveugle.




L'horizon leur ouvrait les bras, à tous, l'avenir était à eux, un vent nouveau se levait sur les mers et apportait avec lui la révolution. Quoi qu'il advienne désormais, qu'elles que soient les épreuves qu'ils allaient indéniablement devoir affronter dans un futur proche, ils continueraient d'avancer comme s'il n'y avait pas de lendemain. Chacun d'entre eux avait des objectifs précis, certains qu'ils partageaient, d'autres que non. Mais qu'importe finalement, parce qu'ils voguaient désormais sous la même bannière, leurs volontés ne faisait plus qu'une. Quel que soit leur vécu, leur passé, leurs erreurs, leurs regrets. Rien ne les arrêteraient à partir de maintenant. Ouais, il en était persuadé, même s'ils n'avaient pas encore de nom d'équipage à proprement parler, l'avenir était à eux. Le futur appartient à l'équipage des masqués.

Dé de navigation pour les personnages Williams P. Blake, Elviss Presslay et Alaude V. Castafiore.

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'Dés de navigation' :

Résultat : 4

On a beau dire, un bon vieux hurlement ça fait toujours du bien, autant au corps qu'au cœur, n'en déplaise aux puritains fragiles excédés par le moindre décibel dépassant timidement la moyenne. Blake ressentait déjà les bienfaits de sa petite séance de thérapie par la colère, ce qui finalement était un moyen comme un autre d'évacuer ce que l'on avait tendance à garder en son for intérieur, bien enfoui entre un traumatisme d'enfance refoulé et une rupture inoubliable. Observant toujours l'horizon d'un regard des plus déterminés, bien qu'évidemment caché à la vue de tous par son masque à l'exception peut être de ses deux billes dorées qui ressortaient particulièrement bien face aux reflets du soleil dans l'eau, le capitaine de tout ce barda se sentait finalement bien. Il n'aurait clairement pas pu espérer mieux après avoir passé la nuit à broyer du noir en ressassant le passé. Une douce chaleur semblait émaner de son bas ventre, comme une manifestation physique par pur effet placebo de la flamme de sa volonté qu'il constatait enfin comme étant rallumée. Lui qui se définissait volontiers comme un pessimiste sans espoir aucun envers la cruauté de la vie se voyait bien être le plus surpris de ce retournement de situation. Enfin, il n'allait clairement pas s'en plaindre, la moindre miette de bien-être qu'il pouvait grapiller restait une victoire. Il en voyait de nombreuses se dessiner au loin d'ailleurs, des victoires, mais surtout une fête. À en croire Elvis, si toutefois ses compétences de navigation étaient bien réelle, la petite troupe ne tarderait pas à enfin arriver à destination.

Un bruit de claquement de porte dans son dos vint alpaguer l'attention du sabreur, tournant la tête pour jeter un coup d'œil à qui venait de débarquer sur le pont. C'était l'alouette qui venait certainement profiter de l'air marin. La vue de sa camarade apporta une petite dose supplémentaire de gaieté au cœur du masqué. Il était réellement heureux qu'elle soit de la partie, bien qu'il doutait encore de sa propre capacité à lui rendre la pareille. Il ne connaissait presque rien de son passé et sous ses travers de connard égoïste au complexe de héros, il se souciait véritablement du bien-être de ses acolytes. Il n'avait pas vraiment à s'inquiéter pour Elvis ou ses comparses, une bouteille d'alcool à brûler suffisait à les rendre heureux, enfin surtout le musicien finalement. Mais c'était différent pour elle, il ressentait une profonde envie de ne pas lui faire regretter son choix d'intégrer l'équipe. Il n'avait qu'à lui demander finalement, comment elle se sentait depuis leur départ, depuis le début de leur aventure avec un grand « A ». Ah ça, il en avait des questions à lui poser, des dizaines et des dizaines, à commencer par son changement d'apparence qui contrastait complètement avec celle qu'elle arborait lors de leur première rencontre. Elle s'était certainement teint les cheveux certes mais il y avait autre chose, un changement d'attitude, elle semblait différente au delà du physique. Dieu seul savait quelles péripéties avaient pu l'amener à une évolution aussi radicale en quelques mois à peine.

Puis, alors qu'il s'apprêtait à l'alpaguer pour lui faire part de ses interrogations multiples, un cri en provenance de la vigie vint le couper dans son élan. Un requin ? Tout ça pour un vulgaire requin ? Les bonnes manières se perdaient clairement ... La nécessité de devoir s'entretenir avec ses camarades de l'importance de ne pas gueuler pour tout et n'importe quoi sur le bateau se faisait de plus en plus pressante. Il n'eut même pas le temps de se rendre compte de la terrible ironie dont son esprit malade était victime que l'inconnu à la vigie annonça une fausse alerte. Alors déjà, c'était qui ce gars ? C'était la première question à se poser avant quoi que ce soit d'autre. Murphy avait tendance à engager des saoulards dans l'équipage dont il oubliait d'informer son capitaine de l'existence, mais là il dépassait les bornes. Engager n'importe qui possédant la flamme de la révolution d'accord, mais faire l'effort minimum de se cantonner à des gens qui dépassaient le quart du QI moyen serait une bonne idée à explorer mine de rien. Puis ... Un bruit, enfin plein de bruits, des multitudes de bruits extrêmement désagréable provenant de ... De partout finalement, ce qui n'aidait absolument pas à situer la potentielle menace venant de s'abattre sur eux. Bah Bravo Grand Line, super ça ! Heureusement pour l'équipage et ses membres, le plus grand enquêteur de son temps se trouvait bel et bien à bord et venait d'annoncer fièrement qu'ils subissaient une attaque. Alors certes, ce n'était pas forcément si évident que ça, les bruits auraient pu venir de n'importe où, mais Blake pouvait faire preuve d'une incroyable mauvaise foi et ça il ne fallait pas l'oublier. De toutes manières, il y avait autre chose de bien plus urgent à régler dans l'immédiat : comment est-ce qu'il venait de l'appeler là ?

— T'es un malade toi ? Comment ça « Capitaine Williams » ?! Appelle moi par mon prénom oh, on est où là ? ... Et puis qu'est ce que tu tapes là comme ça bordel ?

Aucune réponse, si ce n'est la panique pure et simple d'un pauvre homme dépassé par les évènements. Au final, maintenant qu'il y accordait plus d'une seconde de réflexion, même Blake et son esprit malade étaient capables de comprendre qu'ils se faisaient en effet attaquer et visiblement ... De tous les côtés. Le bruit horrible avait donc bien donné un indice finalement, désolé Grand Line ! L'assaut était vraisemblablement sous-marin comme en témoignait l'écume que le sabreur venait à peine de remarquer quelques mètres en dessous de la figure de proue juste en face de lui. S'il avait passé un peu plus de temps à observer son environnement plutôt qu'à se plaindre il aurait peut être pu réagir plus tôt. Enfin bon, il était désormais temps pour lui de prouver qu'il méritait sa place sur ce navire à grand coup de charisme et d'ordres aléatoires. Prenant une grande inspiration avant de se tourner vers le pont derrière lui, il s'époumona de toutes ses forces pour être sûr que n'importe qui sur place puisse l'entendre.

— Murphy, tu gardes le cap ! Il nous faut quelqu'un dans la sous-cale pour constater les dégâts sur la coque et s'il y en a, réparez moi ça vite fait ! Joan va trouver Elvis, tabasse le si il le faut pour le réveiller ! Je m'occupe de l'avant, je vous laisse gérer le reste !

Croisant le regard d'Alaude, il stoppa sa tirade et préféra ne pas lui donner d'ordre direct. Il ne la connaissait peut être pas encore parfaitement mais il se doutait bien qu'il y avait certainement un petit problème envers l'autorité enfoui quelque part en elle. Il se contenta donc d'un hochement de tête rapide accentué par un petit sourire en coin dépassant du côté de son masque, ça suffirait largement comme message. Il lui faisait confiance, c'était l'occasion rêvée de vérifier s'il se trompait ou pas. De son côté, il se préparait d'ores et déjà à s'élancer au combat. Tendant la main devant lui et laissant son magnétisme parcourir son bras, il pu apercevoir son tonneau fétiche rempli d'arme nonchalamment posé à côté du mât trembler comme s'il s'apprêtait à exploser. Ce fut le cas d'ailleurs, enfin dans une moindre mesure, dans le sens où le couvercle sauta alors qu'un peu plus d'une dizaine de ses lames s'envolaient vers lui. Il en comptait quatorze, parfait, il n'avait pas réellement besoin de plus. Asifa toujours bien ancrée dans son fourreau à sa ceinture, il laissa ses jambes se fléchir avant de se propulser vers l'arrière, dépassant la figure de proue pour se diriger droit vers les flots.

Chutant jusqu'à la moitié de la hauteur du navire, sa course fut soudainement stoppée après un petit saut périlleux arrière pas mal inutile mais qui avait le mérite d'apporter des points de style. Afin d'éviter de rejoindre les fonds marins et y couler comme le dernier des imbéciles, il envoya un nouveau courant magnétique qui, cette fois, vint parcourir ses jambes jusqu'à atteindre la plante de ses pieds. Les deux plaques d'acier bien ancrées dans ses chaussures se virent ainsi attirées vers lui avec force, lui permettant de purement et simplement flotter dans le vide. Bien droit, un peu comme s'il se tenait sur une plateforme invisible, faisant face à son bâtiment, il pouvait enfin avoir un visuel clair sur ce qui osait les attaquer. C'était ... Des poissons, tout simplement. Un peu décevant il fallait bien l'avouer mais, au vu de leur vivacité ils n'allaient clairement pas tarder à faire des dégâts à la coque, il valait donc mieux agir vite.

Couler à cause d'un trou gigantesque dans l'océan ça a du style, couler après s'être fait grignoter par de la petite friture, ça l'était beaucoup moins. Les sabres toujours sous le contrôle du révolutionnaire flottaient tranquillement autour de lui comme autant de satellites attirés par son bien joli minois. Puis, soudainement, l'intégralité des lames autour de lui se mirent à tournoyer sur elles-mêmes. En quelques secondes à peine, Blake n'était plus entouré de simples épées mais bien d'une quinzaine de scies circulaires à la vitesse de rotation impressionnante. Maintenant que ça c'était fait, il ne restait donc plus qu'à offrir un rasage de près à son navire.





Les lames tournoyantes s'envolèrent brusquement vers les flots, venant raser le bois de la coque en suivant sa courbe dans le but de couvrir le maximum de distance possible. Des trombes d'eau se voyaient projetées par les projectiles continuant encore et toujours leur rotation, même complètement immergés, tout en bougeant dans tous les sens. De l'extérieur, l'assaut ressemblait à un ballet de lames acérées, comme si chacune d'entre elle possédait une volonté propre et qu'elles se baladaient toutes tranquillement en faisant bien attention de ne pas se percuter. Le masqué prit bien soin de maintenir la rafale d'acier en places quelques minutes, histoire d'être sûr et certain qu'aucun nuisible n'ait pu échapper à sa sentence. Une fois son office faite, il ramena les lames vers lui avant d'accentuer le courant magnétique dans ses jambes pour doucement s'élever et à nouveau atteindre le pont de son si précieux navire.

Renvoyant ses sabres se ranger bien en rang d'où ils provenaient, il en profita pour jeter un coup d'œil autour de lui. Il avait quitté le pont pendant quelques minutes à peine et avait fait sa part du boulot, il ne lui restait ainsi plus qu'à vérifier si ça avait été le cas des autres. Traversant le pont d'un pas déterminé, il comptait en traverser toute la longueur, jusqu'à arriver à l'arrière du bâtiment pour voir si l'archéologue du groupe avait potentiellement besoin d'aide, ou si ce serait le cas de qui que ce soit sur le chemin. Il ne doutait pas une seule seconde que personne n'aurait besoin de lui dans le fond, mais on ne sait jamais finalement, il vaut mieux prévenir que guérir comme on dit. Surtout dans un équipage sans médecin de bord d'ailleurs ...

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