Sortant d'une des cabines de sa flotte, Kirie venait de finir de s'entretenir avec les Pélicans les plus anciens, en qui elle avait entière confiance. Elle avait décidé de laisser Blue les coordonner et gérer la signalétique, au besoin. Pour la sécurité de tous, elle avait préféré les laisser positionnés à l'écart, leurs navires mouillant au large des côtes, écartés et camouflés tant que possible tout autour de pics rocheux qui s'extirpaient des flots. De cette façon, ils pourraient signaler bien vite le Whaling Blues en cas de problème, afin de leur permettre de réagir rapidement.

Si jamais ils devaient quitter Octogonia en hâte, ils pourraient également rejoindre assez vite leur flotte, qui pourrait leur apporter le soutien nécessaire pour minimiser les risques d'une fuite. Une fois à l'air libre, la réunion terminée avec ses sous-fifres, elle se prit le nez entre deux doigt, fermant les yeux tout en poussant un lourd soupir. Tout ça, ce n'était pas son job...Depuis que Lucer était parti, elle s'était retrouvée avec encore plus de responsabilités, sur des domaines qu'elle avait bien peur de ne pas maîtriser correctement. Elle avait navigué un moment sans son aide, avant de le rencontrer, mais elle s'était habituée à ses stratagèmes, même si ça avait souvent été une raison pour des prises de becs colossales entre les deux pirates. Soufflant un bon coup, elle s'apprêta à quitter le navire, lorsqu'une voix familière l'arrêta, venant de derrière elle.

- Capitaine, capitaine ! J'ai préparé des encas, pour tout l'équipage. Lui annonça Blue, navigateur de fortune mais cuisinier remarquable. C'est ma première recette avec des ingrédients exclusifs à Grand Line, vous m'en direz des nouvelles !

Elle écarta un sourcil, avant de lui adresser un doux sourire. La borgne le remercia, tendant la main pour prendre le paquetage qu'il leur avait préparé. Soudainement, elle fronça les sourcils, sa pupille dansant électriquement dans son œil encore valide.

- Au moindre souci, vous nous contactez par Den-Den Mushi. Si on répond pas, vous balancez des fusées de détresse, compris ? Lui intima-t-elle d'une voix sèche, en le regardant droit dans les yeux, les deux individus tenant encore les nombreux bentos. Compris ?!

Un peu pris de court, il lâcha le paquet, mais fit de son mien pour soutenir le regard incisif de sa capitaine, sentant de la sueur lui couler le long de la tempe. Il savait que Kirie était intense, mais c'était toujours tout un exercice, de ne pas plier devant son intransigeance et sa voix implacable. C'était sa façon à elle de les tester, de les maintenir sur leurs gardes, se disait-il. Il lui affirma que les Pélicans étaient entre de bonnes mains, et que les hommes commençaient à être rodés, maintenant. Ils feraient honneur à la Divine, elle pouvait en être assurée. Un peu plus détendue, la femme tonnerre hocha la tête, avant de faire volte-face, bondissant sur le bastingage. Dos à Blue, ses longs cheveux rouges dansant en flamboyant, tout comme son ample kimono, dans un mouvement instigué par le vent marin. Se tenant là impérieusement, quelques instants, elle se mordit la lèvre, profitant de pouvoir camoufler ses mouvements à son nakama.

- Prenez soin de vous, les gars. Dit-elle simplement, à mi-voix, avant de passer la tête par-dessus son épaule, pour lui afficher un large sourire. Je compte sur toi, Blue.

Son corps crépita, avant de disparaître en un éclair. Un trait foudroyant se déplaça à toute vitesse vers le Whaling Blues, dans une courbe gracieuse. Un bras s'y détachait, fondu au niveau de l'épaule en une myriade d'étincelles, pour intégrer la décharge vivante et lui permettre de déplacer le colis sans risquer de l'endommager. Dans un grondement élémentaire, elle s'abattit sur le pont en reprenant son apparence habituelle, droite comme un I et l'air de rien. Sans se soucier de vérifier où pouvait se trouver sa petite famille recomposée, la cheffe prit une grande inspiration, se pliant en arrière en gonflant le ventre. Le tonnerre n'allait pas tarder à s'abattre dans la baie.

- DIVIIIIIIIIIINE ! Hurla-t-elle à plein poumons, laissant sa voix s'intensifier avec l’acoustique des lieux. RAAAAASSEEEEEMBLEMEEEEEEENT !!!

C'était extrêmement cathartique, il ne fallait pas se le cacher. En même temps, à cette heure-là, si il y en avait encore qui trouvaient le moyen de roupiller, c'était leur problème et non le sien. Une fois tout ce beau monde rassemblé, elle toussa légèrement dans son poing, avant de s’asseoir sur le parapet du vaisseau, pour leur faire face, le cadeau de Blue posé à ses pieds.

- Bon, vous savez tous pourquoi on est là, pas vrai ? Ouvrit la capitaine, l'air très sérieux. Oui, un soûlard a tenu la jambe a Siam, et elle a pris ça pour argent comptant, oui. Énonça-t-elle, en hochant vigoureusement la tête, feignant un agacement taquin. Donc bon, on va tous lui filer un coup de patte, comme ça plus vite on trouve ce qui y'a à trouver, plus vite on pourra se la donner sur Octogonia.

La pointe de ses cheveux prirent une forme électrique en grésillant, avant de s'engouffrer dans sa manche morte. Kirie en sortit, sans bouger le petit doigt, sa pipe qu'elle cala entre ses dents, ainsi que son petit mix préparé à l'avance, qu'elle alluma d'une étincelle pour prendre une grosse bouffée de fumée. Leur laissant le temps de mariner sur ce qu'elle venait de dire, elle recracha sa première inhalation avec un soupir satisfait. Ce n'était pas que ça ne l'intéressait pas, au fond. Tout pour lui changer les idées, ces temps-ci. Et puis, si elle pouvait faire plaisir à Siam et lui apporter un peu de tranquillité d'esprit, elle pouvait bien crapahuter un peu au milieu des décombres.

- Bon, j'ai bien gardé l’œil ouvert, mais j'y connais rien, en fait. J'ai rien vu de transcendant. Avoua-t-elle, clairement. Siam, par contre, c'est ton domaine. T'as déjà des pistes, quelque chose ? Tirant de nouveau sur le kiseru, elle bascula la tête en arrière, recrachant de petits nuages opaques dans lesquels dansait la foudre. A toi de jouer princesse, c'est ton projet, on te suit.

Divine Wrath Seal of approval

L'attente. Il n'avait suffit que d'un cri de Pélican pour que le cœur de Siam s'emballe. La jeune femme avait beau savoir qu'il était peu probable qu'une rumeur d'ivrogne la mène à un vestige des Anciens, elle n'avait pu s'empêcher d'y trouver de l'intérêt. Un intérêt qui l'aimait d'un feu nouveau, alimenté par une passion et une impatience qu'on ne lui connaissait guère. Plus Calypso avalait les miles et plus il était dur pour l'archéologue de résister à l'envie de foncer tête baissée vers le mirage de ses désirs.

L'effervescence nouvelle qui l'animait semblait communicative. Les mousses couraient autour d’elle, dans un ballet complexe de débarquement pré-départ. Aussi loin que pensait la jeune femme, elle ne se souvenait pas que les escales aient déjà été aussi mouvementé. Une constatation qui ravissait la jeune femme dont la concentration moyenne, ces derniers temps, avait fortement été mis à mal. Debout de nuit comme de jour, il avait fallu le recours de quelques Pélicans pour la convaincre de lâcher ses cartes et de se reposer avant de toucher terre. Cependant, les insomnies avaient été prolifiques : Siam avait déterré une carte d’Octogonia, ou plutôt, puisque la justesse était de mise, une carte des arènes et des nombreuses écoles qui en faisaient la périphérie.
Le vieil ivrogne avait au moins raison sur un point : on cachait les ruines à grand coup de démonstration physique. Une astuce de prestidigitation vieille comme le monde, qui pouvaient berner n’importe qui tant qu’il n’était pas trop attentif. Le frisson de la découverte, renforcée par les faits, l’avait tenue éveillée jusqu’à l’aube ce soir-là. Pourquoi cacher quelque chose qui, maintenant qu’elle se tenait à côté du bastingage, ne pouvait pas être ignoré ou évité une fois sur place ?


Siam aurait pu continuer de se perdre en conjecture mais le cri de Kirie la sort de ses pensées. Vive, elle rattrape les autres et se juche sur une caisse pour écouter les consignes qu’elle ne suivra peut être pas. Ses yeux sont fixés sur l’étendue des ruines qui lui tendent les bras et, une nouvelle fois, le coeur de Siam bat la chamade. Elle se fiche des regards interrogateurs et des ronchonnements mécontents. Il y a quelque chose, elle le sait, elle le sent. Et bien fou serait celui qui l’empêchera d’aller vérifier son intuition. Lorsque son regard revient sur vers le Wailing Blues, il tombe sur une Kirie dubitative. Pipe au bec, cette dernière semble lasse mais contente d’elle. L’ancienne esclave en déduit qu’au commandement, tout va pour le mieux même si l’inquiétude est palpable dans la troupe.

C’est ténu, répond Siam en laissant tomber son bâillon autour de son cou. Je ne saurais pas te dire quoi, ni pourquoi mais je sais qu’il y a quelque chose. C’est maigre, mais quand on parle de ponéglyphe, c’est plus que la moyenne.

D’un signe de la main, elle enjoint l’expédition de quitter la douce Calypso avant de sauter par dessus bord. A l'affût, la jeune femme en oublie presque de vérifier que ses camarades la suivent. Devant elle, des dizaines de vestiges lui racontent une histoire perdue. L’ancienne ville, vraisemblablement prospère au vu de l’architecture, avait sans doute été pillé à l’arrivée d’Aboubakar. Peut être même que certaine de ses vieilles pierre étaient maintenant des pièces de choix dans l’une des nombreuses arènes. Parfois, la brune s’arrête pour montrer à ses camarades des vestiges de fresques aux couleurs délavées ou des restes de mosaïque à demi démantelées, avant de repartir de plus belle vers autre chose. La visite, sans doute terriblement barbante, avait un air de Noël avant l’heure lorsqu’on regardait les yeux de l’archéologue. Elle prit la liberté de les faire marcher un petit moment, jusqu’à se voir rebrousser chemin. Après un troisième passage devant la même colonne, Siam dut se résoudre à renoncer à l’idée de se déplacer au petit bonheur la chance. Elle avait bien assez papillonné comme ça, il était maintenant temps de passer aux choses sérieuses.

Prenez un peu de temps pour vous poser, si vous voulez, propose-t-elle à ses nakamas. J’ai besoin de vérifier quelque chose.

Ni une ni deux, la voici partie au sommet d’un pilier par un saut dopé au Gura. Les yeux plissés, la brune ne peut que constater la forme circulaire, peut être même proche d’une spire de coquillage. Si elle n’avait pas la berlue, ça pourrait même expliquer la facilité avec laquelle ils ont réussi à tourner en rond plusieurs fois, minuscules mais pourtant réelles. Elle se tourne pour vérifier la position de la flotte quand son regard tombe sur le trou. Ou plutôt une crevasse, au vue de sa position et du terrain géologique, mais il était difficile d’en être vraiment certaine avec la distance. Alors qu’elle allait redescendre sans y prêter plus grande attention, une forte odeur d’iode lui chatouilla les narines. La mer. A l’intérieur des terres. La trouvaille lui arrache une sourire et Siam se laisse tomber de son perchoir. Alors qu’elle allait informer ses amis de sa nouvelle piste, elle tombe nez à nez avec deux matelots, têtes de statue en main, en train de rejouer une scène, étrange, de leur aventure fantasmées à la taverne. Courroucée de leur manque de respect, elle les houspille.

Crétins, assène-t-elle en mettant une calotte derrière la tête du plus petit d’entre eux. Si vous massacrez le peu de vestiges intacts, on sera venu pour rien. Croisant les bras sous sa poitrine, la mine contrariée, elle enchaîne. Dites moi, est-ce que je suis la seule à trouver que ça sent l’océan ici ?

Avant même que l’un des mousses ne sortent une bêtise, elle le fait taire d’un regard. Laissant ses camarades sur cette question, l’ex-esclave entrepris d’essayer une autre approche de la zone. Frappant le sol du talon en canalisant le Gura, elle tente de tracer une carte mentale de l’endroit et de sa géographie. Là encore, quelque chose la chiffonne. Les ondes lui répondent mais ce qu’elle ressent est étrange. Est-ce que ça a un lien avec la drôle de grotte qu’elle a vu là-haut ? Ou peut être que ça explique la forme de la ville ? L’idée de la spire lui rappelait un trou de fourmillion, mais comment en être sûre ? Faute de mieux, elle décide de montrer la route vers la crevasse et de renouveler les sonars aussi souvent de possible. Il y a avait un truc, c’était certain, mais quoi ? C’est à ce moment là que Siam regrette que son Haki de la vision ne soit pas aussi perfectionné que celui de la perception. Le sonar aurait été plus précis, plus grand, plus … meilleur en fin de compte.

Octogonia, si jamais un jour on lui aurait dit qu'il jouerait aux archéologues sur cette île,  Ikki n'aurait certainement jamais parier sur celle-ci, il s'attendait plutôt à jouer au médecin avec tout les fous et obsédés du combat. Un travail qu'il aurait sûrement dû effectuer fréquemment, mais le destin avait choisi toute autre chose pour le Bakeneko. Un cri. Une voix stridente.  

La Capitaine. Immédiatement.

Ce sont les seules informations qui avaient réussi à émerger dans le cerveau, encore fatigué du Shandia. Se présentant avec les autres, lui, ses cernes et son sac de couchage, Ikki venait de faire preuve de bonne volonté en daignant se montrer à ce genre d'horaire. Qu'est ce qu'on ne pouvait pas faire pour son équipage… La suite s'avéra plus intéressante, une exploration de l'île ? Pourquoi pas, s'il rangeait sa mauvaise humeur et qu'il mettait un peu de bonne volonté, il y avait moyen de commencer cette journée du bon pied. Et puis, qu'est ce qu'il ne ferait pas pour les beaux yeux de Siam...

Allons-y alors, partons à la chasse aux vestiges du passé.

Mais finalement rien ne se passa comme prévu. Enfin, comme Ikki l'avait imaginé dans sa tête.

Un tour.
Deux tours.
Trois tours.  

Était-il fou ou bien ils empruntaient le même chemin depuis des lustres. Se retenant de faire un commentaire mal placé, Ikki se contentait de bailler, évitant ainsi de pouffer de rire sur le manque de talent flagrant d'un certains navigateur, que ce soit sur les mers ou sur terre apparemment.

Tout semblait aller mieux lorsque Siam avait pris les choses en main, elle sonda la zone et en  les seuls potentiels lieux qui pouvait nous intéresser.

Je pars en direction de la grotte, je suis beaucoup moins imposant que vous, je passerai avec plus de facilités si certains endroits sont difficiles d'accès.

Cette grotte avait l'air si sombre… Parfait pour piquer un petit somme lorsqu'il en aura envie. Mais il se doute bien que de toute façon, Kirie avait aussi l'intention d'y entrer, ce goût  pour l'inconnu et l'interdit… Ils semblaient tous l'avoir ici, alors tenter de les convaincre qu'il partirait seul. Impossible.

Je suppose qu'on forme deux groupes ?

Le premier serait chargé de continuer les explorations à l'extérieur, quant au second, dont faisant partie Ikki, allait devoir entrer dans cette grotte. En espérant pouvoir y ressortir un jour. C'est pour cette raison que Ikki, à cause de son frêle et petit corps, comparé aux autres et Kirie, à cause de sa condition d'humaine électrique était les mieux placés pour s'aventurer dans ces abysses.

Les groupes étant fait, il était temps de se mettre à la tâche, se dirigeant jusqu'à la grotte, Ikki s'apprêtait à y entrer et à en découvrir ses mystères.

Chef. Tu peux produire des éclairs ? Genre assez gros pour nous éclairer mais pas assez pour me blesser. C'est dans tes cordes ?

Un premier pas vers le savoir.
Un dernier pas vers la fin.

Le soucis était maintenant de savoir lequel de ces deux pas venait de faire Ikki en entrant dans cette grotte.

Divine Wrath Seal of approval

Les yeux rivés vers le ciel, le visage inexpressif, je semblais attendre, avec une fausse patience, l'heure du débarquement. Il fallait dire que mes nouveaux compagnons de route ont vite appris à me connaître. En quelques jours à peine, jamais ne m'avaient-ils vu à l'arrêt, ne serait-ce qu'un bref instant. Ce qu'ils ne savaient pas, qu'ils ne connaissaient pas encore de moi, était cette facette mélancolico-poétique qui s'éveillait au petit matin, quand le soleil se levait. Une facette que bien trop peu de monde avait eu l'occasion de découvrir, et que je m'efforçais de garder un tant soit peu secrète, par droit de réserve. De toute manière, après avoir couché les trois quarts de l'équipage au rhum et à la bière, il ne restait plus grand monde pour me voir. Mes yeux scintillaient, trahissant leur humidité. Regardais-je vraiment le ciel, ou penchais-je simplement la tête en arrière pour ne pas pleurer ?

Avachi sur le bôme du mât, adossé contre ce dernier, je laissais l'air marin déboucher mes narines obstruées et la fraîcheur du matin me laver de l'ébriété. À mesure que le soleil se levait, je me laissais emporter peu à peu dans un monde onirique. Jusqu'à ce que...

- DIVIIIIIIIIIINE ! Un cri surpuissant tonna à travers les flots, résonnant jusqu'à mes rêves les plus enfouis et me ramenant malgré moi à la réalité, à laquelle je tentais d'échapper tant bien que mal. RAAAAASSEEEEEMBLEMEEEEEEENT !!!

Éveillé en un sursaut, je scrutais les environs, essayant de me rappeler où j'étais. Désorienté, j'en oubliais même que j'étais perché sur une poutre, et j'en tombai maladroitement en me laissant glisser sur la gauche. C'est avec des réflexes quasi-félins, voire semi-simiesques, que j'enlaçai mes jambes autour du bôme afin d'éviter la chute. Je me retrouvai ainsi suspendu au-dessus du pont, la tête vers le bas, les bras croisés, regardant ma nouvelle capitaine l'air de rien.

Celle-ci nous énonçait la quête du jour. Une épopée qui s'annonçait particulièrement ennuyante, à première vue. Les vestiges d'une civilisation ancienne faisaient bien pâle figure à mes yeux comparés aux arènes et autres activités que proposait la cité d'Octogonia. Mais mes petits camarades semblaient penser qu'il s'agissait d'un attrape-nigaud voué à détourner l'attention des vraies bails. Ne souhaitant pas passer pour un con, j'avais simplement décidé de ne rien dire. Mais que pouvaient donc recéler ces ruines, pour être si incroyables ? Y aurait-il une arène antique secrète avec des combattants hors-paire ? J'voyais que ça...

Quoi qu'il en soit, nous n'allions plus trop tarder à le découvrir. A mesure que nous avancions au coeur des vestiges rocailleux, la tension devenait de plus en plus palpable. Aucun d'entre nous ne semblait savoir ce que l'on cherchait, et pourtant, nous étions tous déterminés à le trouver. Tous, sauf peut-être moi, qui, la tête visiblement ailleurs, ne faisait pas particulièrement attention aux détails. Toutefois, la brunette au bâillon de bambou était de plus en plus exaltée à chaque pas plus en profondeur dans les ruines. La passion avec laquelle elle scrutait chaque pierre, l'attraction si naturelle et profonde qu'elle ressentait vis-à-vis de ces tas de caillou me fascinait. A tel point que, finalement, je la suivais simplement des yeux, sans me soucier du reste. Quel étrange créature...

Nous voilà finalement face à un dilemme : s'engouffrer dans ce qui s'apparente à la gueule du loup, ou continuer notre route à l'air libre. La seconde proposition me faisait de l'oeil, sans rien vous cacher, mais l'endormi de la bande fit une remarque pas trop bête : nous spliter en deux groupes ! Tant que je rentrais pas là-dedans, ça m'allait...

Euuuuh... mais attendez, ça veut dire que j'dois m'coltiner la p'tite là ?

Ça commence bien...

Comme à leur accoutumée, les membres de l'équipage avaient répondu présent sans trop broncher. On pouvait reprocher ce qu'on voulait à leur petite équipe de misfits, mais qu'on ne puisse pas compter sur eux ? Jamais. Ils venaient tous d'horizons différents, la vie les ayant endurcis chacun de leur côté, avant qu'ils ne se rencontrent. Tous avaient fait connaissance à des moments différents, certains étaient là depuis les débuts et d'autres étaient arrivés il y a peu, mais cela n'enlevait au lien indicible qui les reliait, au sein de la Divine. Si Kirie avait déjà eu le moindre doute quant au fait de continuer dans la voie de la piraterie, au sein de cette famille, ils l'auraient déjà pulvérisé ses inquiétudes depuis bien longtemps.

Une fois tout le monde rassemblé, à l'exception de Seth, que l'on voyait à peine dépasser de derrière un gros tas de projets en court, tendant le pouce pour faire savoir qu'il écoutait, ils purent enfin commencer le gros de la discussion. Ou pas...Siam n'avait pas l'air d'avoir grand-chose, mais elle avait du nez. Ce n'était pas étonnant qu'elle ait développé sa Vision bien avant sa Capitaine, avec une aisance qui faisait quelque peu jalouser la rousse. Elle n'avait jamais vraiment réussi à appréhender cette capacité, pourtant très utile, se retrouvant obligée de se rabattre sur autre chose. Bien sûr, ce n'était pas forcément ce dont elle avait le plus besoin, mais fière qu'elle était de son Intuition, la jeune femme ne comprenait pas ce qu'elle ne comprenait pas. C'était une boucle d'incompréhension désagréable, qui tombait pile dans ce qui la rebutait le plus. Aussi, elle tentait de se persuader que ce n'était de toute façon pas si grave et que ce n'était tout simplement pas fait pour elle. Elle aurait toujours l'occasion de briller avec son Intuition et son Armement...Même si l'Externe lui était encore inaccessible !

Grognant rageusement, elle se prit la tête entre les mains, se rendant compte qu'elle venait de vriller bien plus loin qu'elle ne l'aurait cru. Il lui restait encore tellement de choses à apprendre, et qu'est-ce qu'elle faisait ? Rien ! Moins de dix combats par jour ! Une honte ! Son potentiel était sans doute en pleine chute libre et si elle ne mettait pas dès maintenant un coup de collier elle...

- Attendez une minute...Marmonna-t-elle en relevant la tête, coupant le flot de ses pensées néfastes, avant de faire claquer sa langue à plusieurs reprises contre son palais. Sont partis, ces cons-là...Seth, tu restes attentif aux Pélicans et tu nous joins au moindre truc louche, euké ?

Rallumant sa pipe, elle secoua la tête et passa son barda par-dessus son épaule, avant d'enfin se lever et de partir à leur poursuite, apercevant brièvement l'homme poisson lui tendre de nouveau un pouce affirmatif, sans être sûre qu'il l'ait vraiment entendue. Prenant de la hauteur grâce à son fruit, elle n'eut aucun mal à les repérer, n'ayant pas encore perdu beaucoup de temps. Dans un déplacement maîtrisé, elle alla s'abattre juste à côté de ses nakamas, juste à temps pour entendre Siam sermonner des Pélicans un peu trop taquins. Siam était devenue une toute autre femme, elle pourtant si réservée et silencieuse que beaucoup l'avaient crue muette, s'imposait désormais bien plus. Ce n'était certainement pas Kirie qui allait s'en plaindre, car elle aimait cette fougue, qui avait certes toujours été là, mais que Siam avait depuis sublimé et fait réellement sienne.

C'était bien mieux que l'alternative, qui aurait consisté à la voir dépérir à petit feu, après ce qu'il s'était passé. Le monde leur était tombé sur la tête, sans crier gare, mais la petite trouvait le moyen d'aller de l'avant, d'en ressortir grandie...Ce n'était pas grâce à Kirie, qui était bien plus douée pour démonter les choses que pour les remettre en état. Elle serait toujours là pour les siens, mais à part leur apporter une compréhension sans faille et un support sûr, elle ne pensait pas être capable de trouver des mots capables de vraiment les mouvoir. Eux n'avaient pas eu besoin de beau discours, pour se faire une place dans son cœur, mais elle aurait aimé pouvoir faire plus.

La voyant repartir à la recherche de son chemin mystique, elle regarda sa camarade s'éloigner, avec un demi-sourire empli de nostalgie. Elle grandissait à vue d'oeil, à tel point qu'elle avait bien peur qu'un jour, elle ne commence à suivre son propre chemin, loin du parcours chaotique et tragique de leur équipage. Sans mot dire, elle suivit l'initiative d'Ikki et commença à se diriger vers la grotte, lorsqu'elle entendit la remarque de Natto. Décidément, il n'était jamais content celui-là, ou au moins, il s'évertuait à bien le cacher. Si il avait vraiment voulu se passer des recherches, il se serait fait entendre avant et aurait sans doute tout fait pour prendre la place de leur Docteur carmin. Il avait beau faire sa Tsundere, grand gaillard qu'il était, Kirie n'était pas dupe et le comptait dans ses personnes de confiance les plus proches, malgré la courte durée de leur relation.

- T'en fais pas va, Natto, tu vas pas te refaire capturer.  Répondit-elle avec un rictus. Siam te protégera, si ça tourne mal !

Dans un rire franc, elle suivit le train à Ikki, fière de sa boutade. Bien sûr, le chien fou n'avait besoin d'aucune escorte et si il y avait bien quelqu'un pour qui la sécurité ne faisait aucun doute, c'était bien lui, malgré tout ce qu'on pouvait trouver à redire sur leur rencontre. Pendant un moment, elle avait même caressé l'idée de lui proposer la place vacante de co-capitaine...mais elle s'était bien vite ravisée. Ce n'était pas dans le tempérament du loustic et de toute façon, c'était là le schéma d'une époque malheureusement révolue. Elle avait dû se faire à l'idée que les choses ne rentreraient pas dans l'ordre, ne reviendraient plus à ce qu'elle avait été, avant. Arrivée sans s'en rendre compte devant la crevasse exiguë, elle écouta la question du plus jeune membre de la Divine, tentant de pser le pour et le contre.

Au vu de la taille du tunnel, ils ne pourraient pas s'y aventurer autrement qu'en file indienne, et ils allaient forcément se tremper. C'était faisable, certes, mais tant qu'ils se trouveraient dans cette configuration, toute lumière qu'elle pourrait dégager ne profiterait qu'à elle. De toute façon, là-dedans, à part quelques crabes ou rats de passage, ils ne risquaient sans doute pas un grand danger. Y aller à l'aveuglette serait sans doute le plus sûr.

- Je pourrais, mais dans ce tunnel, ça nous servira à rien. Est-ce que je pourrais faire des lampes en emprisonnant ma foudre dans une bouteille..?

Elle se mit à marmonner pour elle-même, tout en se rapprochant de la pierre, sur laquelle elle posa la main, prête à entrer la première. Après une seconde d'hésitation, elle réfléchit à ce qu'elle portait et à ce que ça impliquait, si ils se lançaient dans une formation là-dedans, avec elle en tête. Mettant une claque sur les rochers, elle tendit ensuite le pouce vers le garçon, avec un sourire forcé.

- Ouais en fait, passe en premier. Tu te faufileras plus vite que moi, en fin de compte. Tenta de justifier la capitaine, avant de le laisser passer en éclaireur.

Lui suivant le train, elle pesta contre l'étroitesse des lieux et l'immersion dans l'eau, qu'elle tenait en grippe depuis qu'elle avait ingéré le Goro. Déjà pour les Fruits du Démon habituels, c'était une purge, mais pour elle, l'eau compliquait toujours tout. C'était vrai pour ses adversaires, aussi, par moments, mais l'un dans l'autre, allié à son caractère explosif, ce pouvoir était une arme délicate à posséder. Pour avancer plus aisément, elle laissait juste une partie de son dos devenir immatérielle, lui permettant de ne laisser passer qu'un très faible courant dans la roche, même humide, qui ne devrait normalement pas atteindre le jeune homme. Au bout d'une avancée à la durée compliquée à estimer, elle tenta de parler à son nakama, malgré le bruit de l'eau qui se faisait toujours plus fort.

- C'EST VRAIMENT BRUYANT, TOUTE CETTE EAU, pas vraOUTCH..?!  Commença-t-elle, avant d'être coupée dans son élan par un contact frontal avec un postérieur.

N'ayant pas fait attention devant elle, la borgne venait de mettre un gros coup de tête au garçon, le propulsant en avant avant de le voir chuter et disparaître dans les ténèbres. S'élançant en avant, un peu confuse, elle glissa sur la roche immergée qui leur servait de plancher, ayant heureusement le temps de redonner à son corps sa tangibilité, par pur réflexe. Ils tombèrent dans l'eau à l'unisson, de manière bien sonore, qui éclaboussa une bonne partie de la grotte. Kirie fit d'ailleurs un plat monumental, mais fort heureusement, eut le temps de réagir avant d'être réellement immergée et d'ainsi perdre toutes ses forces. Elle avait évité une potentielle mort aussi stupide que de se noyer dans un verre d'eau, mais même redressée, son énergie restait grandement sapée. Une fois assurée que Ikki allait bien, elle tenta de voir ce qu'elle pouvait, sans grand succès.

Ils avaient atterris dans une partie plus large, où ne filtrait que très peu de lumière. Face à eux, il lui semblait voir quelque chose, mais elle n'arrivait pas bien à le discerner. Bougeant à l'aveuglette, tout en faisant bien attention à ses appuis pour ne pas risquer de tomber plus bas, elle longea les murs sombres qui les entouraient à tâtons, essayant de voir si il y avait d'autres entrées ou arrivées d'eau, en s'approchant du mystérieux contenu, au bout de la pièce naturelle. Après quelques mètres, elle remarqua avec soulagement que des marches se trouvaient là, proprement taillées malgré une vétusté qui se ressentait sans mal, elles s'extirpaient fièrement de l'eau, permettant à la jeune femme d'avoir un endroit un peu plus au sec. Estimant la position de l'adolescent à l'Intuition, elle se tourna vers sa direction, de là où se dégageait les ondes les plus paresseuses qui soient. Logiquement, elle ne pouvait pas se tromper.

- Hey, Ikki. Kirie dit que la lumière soit...

Elle avait dit cela avec un rictus imperceptible avec la luminosité actuelle, mais comptant bien rétablir cet affront. Au-dessus de sa paume commença à s'élever une boule d'un jaune vif, grandissant jusqu'à atteindre la taille d'une bonne lanterne, dont les contours dansaient dans des crépitements détonants. La bougie électrique chassa les ombres de l'endroit, leur permettant d'y voir plus clair, sans les mettre en danger.  

- Et la lumière FUUUUUUUUUUUUU !!!! Hurla-t-elle, dissipant instinctivement ses éclairs, les replongeant immédiatement dans le noir.

Sous l'éclairage qu'elle avait manifesté, elle n'avait pas vu un, ni deux, non non...Mais bien trois cadavres, réduits à l'état de squelette, certes, mais qui étaient apparus juste en face de son champ de vision. La lueur fugace de la capitaine avait fait danser leurs ombres sur les parois de la grotte, creusant encore plus le fond de leurs orbites noires, les faisant paraître infinies. Toussotant doucement de gêne, elle ralluma alors sa boule orageuse, faisant cette fois-ci bien attention de faire dos au cadet de l'équipe.

- Bon bon bon...Tu peux me dire de quoi et depuis combien de temps ils sont morts, à ton avis ? Demanda-t-elle en reprenant son assurance, pour ne pas rester sur cet écart. Et puis bon, hein, entre nous...Pas besoin de balancer à Natto et Siam, hein ? Ajouta Kirie, sur un ton faussement nonchalant.

En face d'elle se trouvait un drôle d'autel, qu'elle avait deviné auparavant mais qui lui apparaissait désormais bien plus clairement, avec l'aide de son pouvoir. Avec un sifflement admiratif, elle déplaça sa main pour y voir plus clair, détaillant les statues et l'ensemble de l'endroit. Son regard fut immédiatement attiré par la carte de bois, mais contre toute attente, elle ne s'en empara pas directement. C'était définitivement quelque chose, et Siam aurait envie de voir ça. Penchant la tête sur le côté, elle fit claquer sa langue avec force, comme agacée.

- Et bah niquez-moi, elle avait raison. Admit-elle, avec une pointe de satisfaction et un sourire doux. J'ai pas fini de l'entendre, celle-là.

A l'aide de ses éclairs, elle dégaina un escargophone de courte portée, pour tenter de contacter la deuxième partie de la fine équipe, l'appareil vivant clignant frénétiquement d'un œil puis de l'autre, troublé dans son repos. Tonalité d'escargot, mais rien à l'autre bout. Malheureusement, la manchote fut obligée de se rendre à l'évidence qu'ici, il n'y avait pas moyen de communiquer avec l'extérieur, visiblement. Ça sentait le traquenard à plein nez...Bon. Il fallait qu'elle trouve autre chose, mais elle ne pouvait décemment pas remonter les mains vides. Pour se libérer la main, elle déposa son amas d'éclairs sur le haut de son crâne, Avec un rictus déterminé, elle fit craquer ses doigts tout en dégainant son paquetage de victuailles, qu'elle avait totalement oublié, une idée drôlement "futée"  venant de lui passer par la tête.

Sur son côté gauche, elle fit la démonstration à Ikki de quelque chose qu'il n'avait encore jamais vu. Etant donné qu'elle n'avait pas utilisé Kireru depuis un bon moment, elle n'avait pas eu à recourir à cette technique, mais pour ce qui allait suivre, elle aurait besoin de ses deux mains. Une excroissance éblouissante commença à s'extirper de son moignon,  s'étendant en grondant dans un amas informe, à peine étouffé par le bruit tonitruant de la cascade et un rire macabre, de la part  de la borgne. Une fois la taille bien ajustée, la masse perdit de son ampleur, comme si la jeune femme sculptait la foudre, pour s'en tailler un nouveau membre.


Une fois celui-ci terminé, les contours toujours un peu incertains, elle claqua avec force ses deux paumes l'une contre l'autre, avant de se les frotter vigoureusement. Sans hésitation, elle mit un genou en terre pour ouvrir le sac et en retirer un des bentos. Elle en retira le couvercle, et tranquillement, en arracha un à un les bords, de manière à ce qu'il ne reste plus qu'une plaquette de bois verni. Grosso merdo, les dimensions étaient assez proches de la carte. Suffisamment en tout cas, pour qu'elle ait envie de tenter quelque chose. Saisissant le plat dans sa main éthérée, elle positionna l'autre juste au-dessus de l'étrange artefact, prenant une grande inspiration. Elle ferma l’œil pour se concentrer, afin d'être sûre de ne pas cafouiller dans son mouvement, puis, elle se lança dans sa naïve entreprise.




Dans le même geste, qui ne dura pas plus d'une fraction de seconde, elle attrapa l'objet de bois pour le remplacer par la boite à bento, l'enfonçant vigoureusement dans l'emplacement qu'elle venait de vider. Ainsi, elle se retrouva avec l'épaisse carte de bois dans la main, même si il était bien dur de la voir clairement, malgré sa loupiote personnelle. La pirate leva fièrement la main dans laquelle elle venait de saisir l'objet, persuadée que son plan n'avait pu que marcher. Par conséquent, il ne pouvait plus rien leur arriver de grave maintenant. C'était mathématique.

- Et ouais mon gars, on résout pas des énigmes, nous ?!

Divine Wrath Seal of approval

Debout devant la grotte, Siam regarde le petit groupe se mettre en branle. Elle aurait voulu rétorquer qu’elle était la plus petite et, sans aucun doute, la plus habituée à ne pas se servir de son fruit pour ne pas trop subir les effets de l’eau, mais elle n’en eut pas le temps. Sitôt dit, sitôt partis : il ne restait plus qu’elle, seule avec le grand dadais débraillé et les mousses. La jeune femme coule un regard indécis à ce Natto contrarié d’être laissé avec elle. Est-ce qu’elle devrait y aller aussi ou l’envoyer en renfort ? Il n’avait, à vue d’œil, pas l’air grandement motivé par l’idée, chose qu’elle pouvait totalement comprendre. La grotte devait être étroite, jamais ils n’entreraient tous dedans. Et puis, après réflexion, moins il y aurait de monde les pieds dans l’onde, mieux ce serait pour Kirie si l’ambiance devait chauffer. Tranquillement, la jeune femme s’approche de l’entrée et réunit ses mains en porte-voix avant de hurler.

Ikki ? Kirie ? Vous m’entendez ?!

La voix de Siam tremble, trahissant la rareté avec laquelle elle force sur sa voix. La dernière syllabe, suraiguë, lui donne l’air d’un jeune louveteau qui n’arrive pas à hurler et manque de la faire rougir de gêne. Les secondes s’égrènent et se métamorphosent en longues minutes d’attente, sans qu’une réponse n’émerge des ténèbres. Après un bref regard à son escargophone, l’ancienne esclave pousse un soupir contrarié et commence, nerveusement, à se mordre la lèvre inférieure. Quoi qu’il se déroule là-dessous, ils étaient hors d’atteinte. Machinalement, la brune attrape le bâillon qui orne son cou et en fait sortir la partie rétractable en granit pour la poser contre sa peau. Instantanément, les vibrations cessent de lui murmurer à l’oreille et la jeune femme respire à nouveau. Aussi puissant que pouvait être le Gura, Siam préférait mille fois le silence rassurant que pouvait lui procurer Ranna à l’idée de risquer, par mégarde, d’enterrer vivant la moitié de l’effectif de la Divine. Une fois fait, elle regarde à nouveau Natto et ouvre la bouche pour dire quelque chose puis suspend son geste. C’était là. A quelque pas derrière l’homme, les yeux de l’archéologue se fixent sur la réverbération étrange du sable. En forçant un peu plus avec le Haki, le fameux reflet se révèle être un véritable jackpot.

Enseveli sous l’ocre du sable, le chemin doré brillait comme un sésame pour ceux qui pouvait l’apercevoir et narguait silencieusement les âmes perdues qui le foulait sans savoir. Siam se met à sourire. La topographie des lieux avait dû évoluer au fil des années de l’abandon provoqué par le gouvernement, laissant à la plage et au sable le droit de reprendre leur place sur l’urbain. L’ironie d’un temps protecteur renforce encore sa joie. Elle, qui avait tant appris à le voir comme un ennemi dans ses travaux, appréciait qu’il lui offre enfin une opportunité aussi alléchante. Comme une évidence, la brunette fait quelque pas sur les pavés finement dorés avant de s’arrêter pour jeter un regard à la grotte. Sa bonne humeur se fâne et nouvel assaut de ses dents sur sa lèvre trahit l’inquiétude de savoir ses deux camarades coincés sous terre. D’un geste, elle décide de scinder les matelots qui les accompagne en deux groupes : un, conséquent, préposé à la spéléologie, l’autre, d’à peine trois hommes, pour faire la liaison.

Sans plus de cérémonie, Siam attrape la manche de Natto et l’embarque sur cette nouvelle route qu’elle seule peut voir. Ils marchent donc, côte à côte, alors que la jeune femme laisse son compagnon la guider pour éviter les obstacles tandis qu’elle même leur montre la voie. Pas un instant, elle ne quitte le seul des yeux de peur de voir le secret des anciens habitants s’esquiver et les laisser à nouveau perdus sans repères. La ligne dorée les ramène en arrière, faisant douter la jeune femme de ses sens jusqu’à ce que le groupe finisse par buter sur la première arche.

Libérant enfin Natto, l’ancienne esclave enjambe la roche et file comme une flèche vers les escaliers. Une fois au sommet, elle laisse son regard balayer la zone à la recherche du chemin farceur qui l’avait mené ici et constate avec regret que, s’il était bien net auparavant, il se faisait bien plus timide à présent. L’attention de Siam se reporte alors sur l’autel. Elle en fait un premier tour consciencieux pour le débarrasser des vestiges marins qui le décore. Lentement, elle entreprend un deuxième tour d’inspection minutieux du présentoir et du bol. Au regard, la pierre parait si lisse que la brune finit par en douter. Plaquant ses paumes contre la roche, elle exécute un troisième tour en cherchant des symboles cachés, les yeux rivés sur cet étrange bol qui orne la table de pierre. Abandonnant après un soupir contrarié, le regard tombe sur la fente, dont elle estime la taille comme suffisante pour un objet long et relativement fin. C’était trop long pour une arme mais pas assez large – et surtout l’ouverture n’était pas percée – pour qu’il s’agisse d’une ouverture pour stocker les offrandes. Une tablette peut être ?

Natto ? Elle esquisse un bref dessin dans les airs en poursuivant, Est-ce que tu vois quelque chose qui ressemble à quelque chose de cette taille et de cette épaisseur ? Je crois qu’on en aura besoin ici, fait-elle en désignant le bol plaqué or.

Ecoutant le jeune homme d’une oreille, elle redescend du piédestal d’un bond et poursuit sa route vers les piliers qu’elle inspecte avec la même minutie que l’autel. De longues minutes qu’elle dépense pour finalement, revenir bredouille. Elle revient alors au centre du temple en ruine et se met à réfléchir à voix haute.

Le chemin passe devant une grotte marine et le temple est couvert d’algue. Sans doute que les deux se retrouvent immergés à marée haute. Ce qui signifie qu’en théorie, si on surveille les cycles, il n’y a pas de risque pour Ikki et Kirie. Le regard de Siam tombe alors sur l’autel. Celui-ci est en surface, mais l’objet qui sert de mécanisme n’est pas dans les environs. Il n’y a aucune indication gravée où que ce soit et le chemin qui mène ici ne va pas ailleurs. Quoi qu’il arrive, nous n’avons que la grotte et le temple du littoral, ce qui veut dire qu’ils doivent être liés d’une manière ou d’une aut…. L’archéologue se tait brutalement, alors qu’une idée folle germe dans son esprit. Et si un autre chemin doré existait en sous terrain et que nos explorateurs de cavernes étaient sous nos pieds ? Je ne sais pas ce que tu en penses, Na’ mais ça vaut le coup d’essayer. Il va falloir que tu prêtes un peu de force brute à la petite, fait-elle avec un sourire narquois, il nous faudrait un truc bruyant pour que ça les fasses tiquer s’ils sont là, mais sans détruire la zone autour de l’autel. T’aurais quelque chose dans ce genre là ou une idée qui s’en rapproche ?

À la base, c'était son idée… Alors pourquoi regrettait il autant d'avoir mis les pieds dans cette grotte ? Ah oui, à la seconde où il avait senti de l'eau sur ses mains, Ikki avait imaginé quel funeste destin l'attendait. Malheureusement maintenant qu'il avait parlé, il se devait d'assumer jusqu'à la fin… Mais c'était une chose qu'il retenait, ne plus jamais sous-estimé une grotte. Car plus il avançait, plus l'eau  semblait devenir profonde, sa petite taille jouait déjà contre lui.

L'eau montait. Encore. Encore. Encore.
Jusqu'au point de non retour.

Ikki se stoppa, prêt à avertir son capitaine du danger aquatique mais celle-ci, fidèle à elle-même avait avancer tête baisser.

Euh le courant commence à… AIE aie AIE aieuuuuh

Et le choc ne tarda pas à se faire,  puis une chute, longue… peut-être rapide. Il ne savait pas, il n'avait jamais eu la notion du temps avec tous ces sommeils. Mais le plus important était qu'ils venaient de tomber dans de l'eau, salé, Ikki pouvait vous le prouver, il venait de boire la tasse. Sortant dans l'eau en s'agrippant à la première chose à laquelle il pouvait, c'est-à-dire, son capitaine. Il se remit petit à petit de tous ses états pour pouvoir essayer de réfléchir dans le calme.

Mais encore une fois, elle prit l'initiative de palper la pièce dans son ensemble, ils étaient dans le noir, ils ne pouvaient pas produire de lumière et ils n'avaient sûrement aucun moyen de communication. Heureusement, Kirie venait de dire que la lumière soit. Que la lumière soit ? QUE LA LUMIÈRE SOIT ? Non. Non. Non. Non. Non. Elle n'allait pas faire ça quand même. Ikki se persuada que ce n'était qu'une énième boutade de son capitaine, qu'elle n'en serait pas capable. Mais lorsqu'il vu les premières étincelles jaillir dans l'obscurité. Il comprit que c'était la fin.

Autant pour lui que pour cette noirceur les empêchant d'observer la pièce dans sa globalité.

Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah… Euh.

Aucune douleur, tout semblait aller pour le mieux, Kirie avait même eu le plaisir d'apercevoir son Shandia préféré dans une position approximative. Mais ce n'était clairement pas de quelle croyait, elle se trompait.

Euh, j'ai crié pour voir si Siam et Natto avait une chance de nous entendre d'ici, avec l'écho. Mais il n'y en a pas. Ahah.

Petit grattement de la tête, et Ikki se contenta d'aller observer les cadavres qu'il avait vu. Les analyser dans la lumière, savoir ce qu'il leur était arrivé et comment éviter cette possible fin. Il était doctor, lui. Aucun massage thaïlandais n'était nécessaire, seulement une utilisation du savoir qu'il avait acquis. Ni plus ni moins.

Que représentes ces totems, des gardiens ? Des dieux ? Ou bien quelque chose de pire encore. Ils doivent sûrement avoir un lien avec ça.

Pointant la carte du doigt, Ikki se demandait ce que cet objet, datant de plusieurs siècles pouvait avoir comme importance. Passée, présente et future. Mais c'était bien le rôle de Siam, de poser des questions et de trouver les réponses ensuite. Le Bakeneko lui, devait pleinement se concentrer sur l'analyse de ces squelettes et rien d'autre. Une fois les informations obtenues, plus rien ne le retenait ici.

Maintenant qu'on a fait le tour de cette grotte, ça te dirait de revoir la lumière du jour ?

Marchant sur les dalles, gagnant peu à peu sa force en quittant cette eau qui le rendait si faible, si pitoyable. Kirie avait fait l'étalage de ses capacités, c'était désormais son tour. Craquant son coup, Ikki se redressa, les mains tendues vers l'arrière.



Repoussé volontairement par son pouvoir, le maudit fonça jusqu'à la parcelle de mur lui faisant face, en y prenant appui à l'aide de ses pieds, le Shandia se propulsa de nouveau, se servant cette fois de l'inertie gagné par le précédent bond. Battant des ailes pour le style, Ikki se dirigea directement vers le trou par lequel ils étaient entrés. Simple. Efficace. La foudroyante n'avait plus qu'à le suivre, et il la mènera jusqu'à la lumière.

Ils étaient entrés par ce chemin, ce serait en empruntant le même qu'ils sortiraient. Après, il ne resterait plus qu'à recontacter les autres.

Divine Wrath Seal of approval

Ma remarque semblait avoir fait tiquer la petite. Feignant l'indifférence, je répondais à son regard par une moue presque dédaigneuse. Cette petite avait le mérite de m'intriguer, mais cela serait bieeen trop difficile à admettre pour quelqu'un d'aussi fier que moi. Je ne pouvais laisser paraître mon enthousiasme à pouvoir continuer la route à ses côtés. En effet, certains êtres étaient dotés d'une aura toute particulière, et si cette dernière m'avait échappé aux premiers abords, elle m'était apparue comme une évidence dès lors que nous avions mis le cap vers ces ruines. Tel un enfant face à la mer pour la première fois, j'étais subjugué par la passion qui l'animait, par cette pulsion si pure qui la poussait à percer le voile. C'était une vision qui me plongeait dans des réflexions toujours plus lointaines, au point d'en oublier où nous étions. Qui suis-je ? Pourquoi suis-je sur Terre ? La clé de voûte de toute une escalade de questionnements existentiels, à laquelle je répondais en me répétant inlassablement que je souhaitais devenir l'épéiste #1, espérant ainsi stopper l'avalanche d'angoisse qui allait avec ces doutes.

Soudain, l'intrigante archéologue me saisit par la manche, afin que je la suive. N'opposant pas une once de résistance, je me laissais guider dans sa direction, et me mis en route à ses côtés. La voie était sinueuse, les bancs de sable, formés par les vestiges écroulés puis recouverts rendaient la marche difficile. En nakama responsable, je pris le soin de l'aider à grimper lorsque c'était nécessaire, ou à descendre de plateformes peu stables. La ballade durait ainsi quelques minutes, quand nous arrivions finalement à l'entrée d'un temple. La miss crapahuta alors avec vivacité afin d'y pénétrer.

Eh, tu vas où comme ça !, dis-je en la rattrapant. Ça pourrait être dangereux, y'a peut-être des pièges. J'leur dis quoi moi après s'il t'arrive quelque chose ?!

En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, je passais devant elle, mes sens en alertes. J'étais déjà passé par une île contenant des monuments anciens, aux mécanismes variés, tous voués à provoquer la mort des malheureux ayant tenté d'entrer. Mais cette fois-ci, cela semblait différent. Pas de flèches empoisonnées tirées depuis les murs ! Pas de faux-sol qui se déboîte pour vous faire tomber sur des pics de fer ! Pas de gaz mortel ! Du pur plaisir... Alors je laissais faire l'experte. Celle-ci examina les lieux durant quelques minutes, puis me sollicita enfin.

Mhmmm ?, fis-je, en me penchant au-dessus du bol, les bras croisés. Chai pas, ptêtre ça ?

Je mis la main à l'extrémité basse du fourreau que je portais sur le dos. J'en sortis la courte lame qui y était planquée, et la montrai à Siam en haussant des épaules. Cela pourrait peut-être faire l'affaire ! Mais j'attendrais d'avoir son avis avant de me décider à le faire. Adossé contre l'autel, sans la moindre once de respect pour le mobilier antique, j'attendais qu'elle finisse sa ronde, prêt à glisser mon couteau dans la fente. Quant elle revint, celle-ci me fit par de ses analyses, que j'écoutais avec autant d'attention que faire se pouvait.

Euh... Ouais... Tu dois avoir raison, héhé..., répondis-je, la main gauche me grattant l'arrière du crâne. Sinon, je vois pas trop comment on pourrait gueuler assez fort pour qu'ils nous entendent, si même les Den Den ne fonctionnent pas. Mais tu devrais essayer de passer la zone sous scanner de Haki, ça a bien payé pour trouver la caverne. Et puis, si tu disais vrai, tu les percevras peut-être à proximité. On pourrait même trouver une connexion entre les deux endroits, qui sait ! S'ils ont créé deux voies dorées, c'est peut-être pas pour rien.

Des suppositions, rien de plus, comme toujours. Mais notre team semblait doté d'instincts affûtés, et bien que nous avancions à tâtons, mon petit doigt me disait que nous faisions bonne route.

Fière de sa réussite, Kirie aurait préféré mourir plutôt qu'avouer le gros doute qu'elle avait éprouvé, quand aux chances de réussite de son stratagème, pendant la réalisation de celui-ci. A l'époque, sa sœur lui avait souvent tenu la jambe avec des contes en tout genre, des mythes de donjons piégés et d'antres démoniaques, n'attendant qu'un pauvre imbécile heureux pour s'y aventurer et passer de vie à trépas. Tout au long de son aventure avec Siam, qui partageait elle aussi cette même passion, elle en avait entendu d'autres, des vertes et des pas mûres, sur de vieux filous avec un sérieux pét au casque, qui n'avaient rien de mieux à faire que de cacher des babioles anciennes, derrière des tonnes et des tonnes de ruses, d'entourloupes, d'énigmes, de plaques de pression et autres fléchettes empoisonnées. Jusqu'à présent, elle avait toujours eu du mal à y croire, mais lorsqu'elle avait posé les yeux sur cet étrange autel, quelque chose lui avait dit de se méfier. Un instinct reptilien, tapi au fond de son esprit, la mettant suffisamment mal à l'aise pour qu'elle tente une action détournée. Si il ne s'était rien passé, elle ne pouvait pas vraiment être sûre que c'était vraiment de son fait...

Après tout, malgré son altération des lieux, il ne s'était certes rien passé, mais y avait-il seulement une vraie entourloupe, derrière tout ça ? Et si tel était le cas, avait-elle bien compris de quoi il pouvait s'agir ? La Capitaine pouvait bien jouer les fières toute la journée, il y avait tout de même quelque chose qui ne sentait pas bon, à propos de toute cette affaire. Elle n'avait pas été très fière d'avoir été apeurée comme le jeune adolescent, mais à y repenser, l'inverse aurait peut-être été encore plus aberrant. Aussi, dès que l'examen de Ikki fut terminé, elle en vint à la conclusion qu'il n'y avait plus rien à faire ici, à part se tirer en quatrième vitesse. Hochant la tête sans répondre, elle tapait machinalement du pied sur le sol, sur ses gardes. Laissant le garçon partir en premier, encore une fois, elle escamota la carte de bois dans les plis de son large kimono, prête à quitter ces lieux morbides.

Elle regarda leur jeune recrue s'élancer gracieusement, pour atteindre le tunnel sans le moindre mal, en poussant un petit sifflement admiratif, l'apaisant quelque peu. Peut-être s'inquiétait-elle pour rien, finalement ? Secouant doucement la tête, Kirie se fondit en une langue électrique, pour s'envoler en direction de la sortie. Reprenant forme juste avant de toucher l'eau, elle rouspéta de nouveau en sentant une partie de ses forces l'abandonner, comme sous l'effet d'une drogue à l'action immédiate. Maintenant, elle pouvait enfin souffler...

A la seconde même où elle commença à se relâcher, un bruit sinistre résonna dans les ténèbres, derrière eux. La borgne tourna la tête prestement, mais son champ de vision étant limité par sa position, elle n'eut rien l'occasion de voir dans cette obscurité épaisse. Il lui avait semblé voir des ombres danser et, même si elle était à peu près sûre d'avoir halluciné, ce constat lui glaça le sang. Avait-elle réveillé un gardien enfoui, prêt à mettre des curieux en pièce ? Comment étaient morts les macchabées qu'il avait trouvé ? Ayant d'abord pensé à la noyade, la rousse commençait sérieusement à en douter.

Malheureusement, elle n'eut pas vraiment le temps d'y réfléchir davantage. Sous son œil écarquillé, un énorme caillou chuta dans le petit lac souterrain qu'ils venaient de quitter, dans un lourd bruit d'éclaboussures. Rapidement, une seconde la suivit dans cette chute, avant que le dégringolade ne parte crescendo. Le ciel de granite était en train de leur tomber sur la tête. Hors de question de mourir comme ça ! Commençant à avancer, Kirie mit une énorme coup de tête dans le postérieur du jeune nakama, y ajoutant une micro-décharge, pour faire comprendre qu'il n'était pas question de lambiner.

-GOGOGOOO PAS LE TEMPS DE NIAISER ! Aboya la jeune femme, tout en accélérant l'allure.

La lumière salvatrice se faisait de plus en plus proche, mais l'éboulement leur suivait le train, dans un grondement vindicatif. Alors que les parois s'effondraient de plus en plus vite, Ikki parvint finalement à sortir de la caverne, Kirie suivant son exemple juste à temps, en un bond désespéré, au moment où les pierres du sanctuaire maritime scellaient définitivement ce dernier. Dans son geste désespéré, elle ne put rattraper sa trajectoire et roula à même le sol, se couvrant de poussière et de terre. A la fin de sa course folle, elle éclata en une myriade d'étincelles stridentes, qui s'éparpillèrent avant de reformer le corps de la borgne, plus loin. A bout de souffle, elle était assise contre une colonne de pierre, soulagée et libérée de l'angoisse qui venait de l'assaillir. Jamais plus elle ne pourrait tourner en dérision l'archéologie, si chère à sa jeune comparse. Elle venait mener un combat acharné pour sa survie et son adversaire abstrait avait bien failli l'emporter.

La pression retombant doucement, elle bascula la tête en arrière pour l'appuyer contre la pierre, passant sa main dans le haut de sa chevelure, se masquant ainsi les yeux. Un rire cristallin lui échappa, maintenant qu'ils étaient hors de danger, avant que son hilarité ne l'emporte un bon moment. Après plusieurs secondes, elle commença à se calmer en hoquetant légèrement, les larmes aux yeux. Son bras tomba mollement le long de son visage, avant de chuter par terre. Malgré cela, une question de Ikki lui tournait inlassablement en tête, sans qu'elle ne le laisse paraître. Si il y en avait un, où pouvait être le lien, entre ces statues et le reste..?

- Pfiouuuuu ! Et béh, on aura pas perdu notre journée, pas vrai ? Dit-elle dans un long soupir rassuré. Ca va Ikki, t'es entier ?

Maintenant qu'il n'y avait plus de cette maudite eau pour la limiter, elle put se relever tranquillement, longeant l'édifice qui lui servait de dossier. Claquant son genou avec force, elle commença à s'avancer, en passant une main dans ses vêtements. Elle en retira son Kiseru, totalement détrempé, qu'elle rangea immédiatement avec dépit. Dégainant alors son escargophone, encore tétanisé, elle essaya une nouvelle fois de joindre l'autre groupe. Cette fois-ci, son appel n'eut aucun mal à passer, ce qui ne l'apaisa que davantage.

- Ouais, c'est moi. S'introduisit la rousse, avec une certaine gaieté dans la voix. Vous avez entendu ça, j'imagine ? Ouais, ouais, c'était nous. Elle laissa parler son interlocutrice, en penchant successivement la tête de droite à gauche. Non mais ça vaaaaaa, ça va, rien de cas...Ecoute, vous êtes où ? Ce sera plus simple de vive-voix, et en plus, j'ai un cadeau pour toi.

Elle écouta les indications de Siam, hochant systématiquement la tête en acquiesçant chaque nouvelle information, donnant l'impression qu'elle enregistrait tout, au fil de la discussion. Une fois les directions données, Kirie raccrocha et rangea l'appareil. Demandant à Ikki d'attendre là où ils se trouvaient, elle s'élança dans les airs en transformant le bas de son corps en électricité qui la propulsa sans mal. Après avoir pris suffisamment de hauteur, elle scruta de tout côté, effectuant un mouvement de huit qu'elle décalait petit à petit, en observant bien partout. Bien qu'elle n'ait pas l’œil suffisamment acéré pour déceler quoi que ce soit d'important dans les ruines, elle finit tout de même par débusquer la seconde moitié de son équipage, au loin. "Où c'est Charlie ?" c'était quand même beaucoup plus simple, sans toute la foule pour brouiller les pistes.

Aussitôt, Capitaine Raiju plongea vers le sol, reprenant forme à quelques centimètres au-dessus de celui-ci, pour ne pas risquer d’abîmer davantage les lieux. Faisant un signe à Ikki, elle prit la direction qui lui semblait la plus directe pour rejoindre ses compagnons, ayant oublié instantanément tout ce qu'avait pu lui dire Siam. Quand c'était à l'escargophone, la rousse avait bien du mal à retenir les informations...C'était parfois un vrai handicap, qui n'avait sans doute rien à voir avec le côté très tête en l'air de l'estropiée. Non, ce serait tout à fait grotesque.

- Dis-moi...Ça va te paraître con, hein, mais...Elle hésita un instant, se grattant l'arrière du crâne. Tu n'as rien vu bouger, dans la grotte..? Pendant que j'étais sur la carte, ou quoi ?

Tout en discutant avec son compère, elle pressa le pas, impatiente de savoir la lumière que la spécialiste pourrait apporter sur toute cette affaire. Après une petite marche, les deux groupes se retrouvèrent de nouveau assemblés, et purent échanger les informations qu'ils avaient collectées. Kirie raconta leur court périple, en omettant le sentiment d'anxiété et leurs réactions terrorisés par de pauvres squelettes inoffensifs, elle mit particulièrement d'accent sur la description de leur autel, et des différences de celui-ci, par rapport à celui qu'ils avaient désormais sous le nez. Elle mentionna les totems, la différence de taille du bol, malgré le fait que la fente paraisse être de la même taille et, finalement, dévoila à la fin de son récit, le fruit de son labeur.

Tendant l'objet de bois à Siam, pour que celle-ci l'inspecte, Kirie se rendit alors compte qu'elle avait totalement oublié le sachet de bentos, dans son empressement...Sans même en avoir eu la moindre bouchée ! Le monde était parfois criblé d'injustices...Il fallait à tout prix éviter de le dire à Blue, qui risquerait de faire la moue pendant des mois, sinon. Peu importe qu'elle ait pu leur sauver la vie ou non avec sa boite de repas, du gâchis était du gâchis.

- Ptet qu'il suffit de mettre cette carte dans cette fente, là ? Supposa la capitaine, en se tenant le menton entre les doigts. A part ça, je suis scotchée. C'pas donné, le chemin vers les Pony Greffes, hein ?

Divine Wrath Seal of approval

Siam a un sourire en écoutant son partenaire. Lui qui avait l’air si ennuyé une poignée de minutes plutôt, venait de se mettre volontairement à la tâche et même de lui soumettre quelques idées intéressantes. N’ayant développé son Haki de la vision que depuis récemment, il lui arrivait encore de l’oublier même s’il s’avérait rudement pratique. Ces Anciens étant porté sur les messages cachés, ce serait une erreur de ne pas en user et en abuser. Elle refit un tour du temple marin et y vit, enfin, les schémas discrets tracés au sol. Carré, puis rond et enfin … l’autel. Il n’y avait pas de rigole, même discrète, ni de marquage plus épais à certains endroits. Lorsque la brune s’accroupit près d’une des délimitations, elle ne sent rien d’autre que le sable qui la cache : pas d’air ni de son d’eau comme à proximité de la grotte marine. Si lien il y avait entre les deux lieux, l’archéologue pouvait certifier qu’il ne se trouvait pas ici. Ou peut-être que le lien au quelle elle pensait n’était pas le bon ?

C’est à ce moment que le grondement lui parvient. Même privée du Gura, Siam pouvait reconnaitre le bruit du grondement de la terre comme un son familier, encore plus que celui des ronflements sonores d’Ikki lorsqu’il parvenait enfin à retrouver le sommeil. La jeune femme saute sur ses pieds et rejoint Natto aussi rapidement que possible.

Tu as entendu ? fait-elle, tous les sens en alerte.

Les tonfas trouvent, seuls et par pur réflexe, le chemin des mains de la brune et leur bois luit au soleil comme un avertissement. Les yeux grands ouverts, la jeune femme cherche l’origine du grondement terrestre en allant de la cause la plus banale à la plus farfelue. Et si une troupe était dans les parages ? Il ne fallait pas qu’ils mettent la main sur la découverte qu’elle était en train de faire. Pire, il ne fallait pas qu’ils mettent la main sur la Divine et les informations sur les ruines. Ces lieux avaient été déjà bien assez pillés et massacrés pour qu’une énième tentative leur soient épargnée. Mais d’un autre côté, pourquoi reviendrait-on ici, alors qu’il n’y avait plus rien ?

Les questions s’enchainent dans l’esprit de l’archéologue, alors que le calme est revenu depuis quelques minutes. Près de l’autel, c’est à peine si la nature s’intéresse à ce qui se déroule autour d’elle, tant l’harmonie qui y règne est sans la moindre souillures. Parfaite, autant par le son de vague qui la gouverne, que par les bâtiments un peu plus épargnés qui la protège. Si parfaite que, lorsque le son strident du Den Den Mushi se met à hurler, Siam manque d’en tomber parterre de surprise. Avec un grognement, elle s’empare de l’appareil pour regarder l’auteur de cette télécommunication de mauvais goût. Elle tourne l’écran vers Natto pour qu’il puisse aussi savourer la bonne nouvelle de savoir Kirie – et par extension Ikki – en vie. Le laissant avec cette information, elle décroche l’escargophone.

Dis-moi que le grondement de tous à l’heure n’a rien à voir ni avec un combat, ni avec un morceau des ruines. Elle fronce les sourcils en écoutant l’esquive de la capitaine mais choisit, pour une fois, de ne pas relever. Nous sommes un peu plus en retrait, il y a un autel au sud-ouest de la grotte.

La jeune femme lui donne quelques précisions puis laisse Kirie raccrocher. Les « hum hum » convaincues de la rousse à l’autre bout du fil l’ont fait rouler des yeux à plusieurs reprises mais Siam était tant rassurée à l’idée qu’ils soient sains et saufs qu’elle avait renoncé à engueuler la manchotte.  Quelques minutes d’attente et une Goro-fusée-de-position plus tard, les deux groupes se donnent l’accolade sur fond d’aventure spéléologique. Il y avait donc bel et bien un deuxième autel là-dessus, mais Siam ne pourrait jamais y jeter un coup d’œil. Il fallait espérer que, outre la tablette dans les mains de Kirie, rien n’avait été oublié ni ne serait nécessaire à la suite. L’archéologue trépigne un peu, lorsqu’on lui confie la découverte souterraine. Le morceau de bois, qu’elle tourne et retourne avec application, porte deux minuscules encoches d’un côté, sans doute celui inséré dans la fente. Pour les faces, cependant, elle est plus dubitative. Est-ce que quelque chose est cachée, comme pour le chemin ? La brune décide d’en avoir le cœur net et d’utiliser le Haki.

Ponéglyphes. Corrige-t-elle, le regard toujours fixé sur la tablette. Et non, ils ne vont pas nous faciliter la tâche. Je ne suis pas fan de l’idée de blaireaux sans éducation avec des armes antiques dans les mains. L’histoire a bien assez prouvé que c’était un événement incompatible avec la survie de l’espèce.

Après de longues minutes à observer, ou peut-être mémoriser, les deux faces de la tablette, Siam décide de revenir au milieu des discussions animées de ses camarades. Rejoignant Kirie sur l’autel, près du bol en or, elle observe une dernière fois les alentours. Sur cette escapade, le bilan était plutôt neutre. Une tablette secrète, un autel, sans doute un futur trésor grâce aux deux premiers, mais avec une grotte et un autre autel jumeaux de celui-ci détruit. Elle ne saurait jamais si les statuettes qu’il renfermait étaient des divinités ou de simples gardiens mais il fallait aussi admettre qu’elle ne pourrait peut-être pas tout savoir, même si cela lui déplaisait affreusement. Et, au-delà de la désagréable sensation d’avoir perdu un morceau de l’énigme, la jeune femme trouvait cette recherche un brin trop facile.

Il y avait certes des chemins cachés mais aucune sécurité pour le second autel. N’importe qui pouvait y accéder. N’importe qui pouvait tailler quelque chose de similaire pour l’insérer dans la fente cachée par le bol. Une grotte qui s’effondre était certes une défense efficace, mais elle était définitive. On ne pouvait pas rentrer dans quelque chose qui c’était effondré et on ne pouvait donc pas y trouver de squelette non plus. Et les grottes ne se reformaient pas toute seule. Siam jette un regard à Kirie et Ikki.

Vous êtes sûr de ne rien avoir vu d’autre à part la grotte qui s’effondre ? Elle passe de l’un à l’autre. Parce que les trois squelettes ne sont pas morts tout seul, je suis prête à le parier. Ce qui veut donc dire que… Elle se tourne à nouveau vers l’autel et oriente la tablette dans la position qui lui semble la bonne. Une fois que j’aurais mis ça en place, on risque d’avoir une mauvaise surprise. Siam inspire profondément. Chaque détail à son importance : Voilà les Anciens qu’elle connait. Et c’était sans doute ces mêmes Anciens qui avait sévèrement puni leur trois prédecesseurs.  Tenez-vous prêt à tout dans 3. L’archéologue change sa posture pour pouvoir partir si la situation l’exige. 2…

Elle vérifie une dernière fois que chacun de ses camarades est prêt puis énonce le dernier chiffre avant d’enfoncer la tablette dans son socle et d’attendre. En espérant un challenge aussi clément que celui que la grotte leur avait offert.

Malgré les quelques rebondissements auxquels ils avaient pu être confrontés, les ruines restaient pour le moment clémentes et l'équipage semblait plutôt bien s'en sortir. Bien évidemment, la cheffe de l'équipage n'avait aucun moyen de comparaison, quel qu'il soit, pour vraiment avoir la mesure exacte de leurs accomplissements. Elle hocha distraitement la tête, à la correction de Siam, qui semblait bien trop aspirée par la lourde carte qu'elle tenait dans sa main, pour prêter une vraie attention à leur échange. Ponéglyphe, Pony Greffe, Pinez Figue, qu'est-ce que ça changeait vraiment, au fond ? Forcément, l'archéologue avait tenu à faire sa petite pleine de savoir. Bien évidemment, elle n'avait pas tort, en plus. Et bah, Kirie aussi, elle en savait, des choses !

Bon, c'était plutôt des trucs du type "combien de temps je peux électrocuter quelqu'un sans que ce soit mortel ?" ou "Pour découper un même membre, chez un géant ou un humain, quel est le meilleur angle ?". Tout ça, c'était assez simple. Le b.a.ba estampillé Dokien Tenjo, hein. Si elle avait dû doucher Siam de son savoir, elle aurait pu lui demander de calculer la vélocité d'un coup de genoux dans les bourses, avec pour seule information la taille de deux opposants. Et là, qui aurait eu l'air du plus bête ? Bah ouais, fallait réussir à se mettre à la place des autres un peu, aussi, de temps en temps.

L'esprit assailli par une mauvaise foi qu'elle n'était pas assez bête pour divulguer aux autres, un peu blessée dans son orgueil, sans vouloir l'admettre, Kirie marmonnait quelque chose d'inintelligible qu'elle étouffait volontairement, grommelant dans sa barbe. Elle n'était pas vraiment vexée, à vrai dire. Le problème n'était pas que Siam la recadre. En vrai...N'était-ce pas tout bêtement une pointe de regret, mal placée ? Pendant bien longtemps, la borgne avait fait tout son possible, pour dénouer la langue de sa camarade. Combien de nuits, avaient-elles passées, l'une à côté de l'autre, dans des dialogues à sens unique, qui s'étaient prolongés bien après l'apprivoisement, fastidieux, de la petite ? A vrai dire, la vexation de Kirie n'avait pas vraiment de sens et elle-même s'en rendait compte.

L'ouverture émotionnelle de l'ancienne esclave avait s'était travaillée au fil du temps, elle en avait parfaitement conscience, et c'était sans doute la récente tragédie qu'ils avaient traversée, qui avait dû achever le travail, sans temps d'adaptation. Malgré tout, même si Siam était devenue plus bavarde, et que sa capitaine en était sincèrement ravie, elle la sentait plus loin que jamais. Elle avait l'impression de perdre l'étroitesse de son lien avec sa nakama, qui devenait de plus en plus indépendante, murissant chaque jour, en une jeune femme qui avait déjà côtoyé les horreurs de ce monde mais parvenait tout de même à s'épanouir. Plutôt que d'essayer de gérer ce mélange étrange et inconnue de joie, de tristesse et de fierté, elle préférait le rediriger vers un agacement passager, qui s'estompa bien vite...C'était plus simple, pour son cerveau parfois étriqué.

La gamine n'en était plus une. La voir ainsi prendre les commandes, avec une implication religieuse, donnait l'impression à la femme de foudre d'être toute jeunette, insignifiante, face à la force tranquille de la connaissance. Tout son potentiel s'épanouissait et elle avait la finesse de s'élever plus haut que quiconque, pour peu que l'archéologue s'en donne les moyens. Elle écouta cette dernière, bien plus attentivement que lors de leur conversation escargophonique. Il y avait des risques ? Peut-être les Anciens avaient-ils laissé un autre système de protection, contre lesquels il faudrait défendre sa vie, becs et ongles ?! Voilà qui suffit à ranimer la flamme de la pirate ! Une occasion de briller un peu et retourner dans sa propre zone de confort. La main sur le pommeau du wakizashi qui lui ceignait les hanches, elle se prépara pour une réaction éclair, prête à éclater au moindre pet de travers.

3...Kirie retint son souffle, les doigts pianotant machinalement sur son arme. 2...Elle prit une lente inspiration, mettant tous ses sens en alerte, alors que le mouvement de ses doigts se stoppait. La rousse croisa le regard de sa comparse, hochant la tête pour lui faire comprendre qu'elle était bien prête. Plus de retour possible, tout pouvait basculer d'une seconde à l'autre. Peu importe ce qui les attendait, perte l’initiative pouvait signifier de lourdes pertes, pour le petit groupe de gentils forbans.

1 ! En déglutissant, Kirie vit la tablette s'enfoncer d'une traite, tout son corps tendu prêt à se relâcher d'un claquement puissant, pour s'attaquer à quiconque oserait apparaître pour leur mettre des bâtons dans les roues. Une seconde. Puis deux. Puis cinq. Outre un petit cliquetis à peine perceptible, semblable à un ensemble de rouages se mettant péniblement en branle, après un trop long sommeil, rien du tout. Guettant de tout côté, la manchote se rapprocha pas à pas, arrivant suffisamment proche de l'autel, à la fin de l'étrange processus, l’œil écarquillé. Elle comprit tout de suite ce qui était en train de se passer, dans l'idée, sans pour autant comprendre ce que ça pouvait bien signifier ou comment tout cela pouvait encore fonctionner, après tant d'années...

Au moins, elle pouvait remercier les Anciens d'avoir fait une technologie relativement lente, alors qu'une goutte de sueur lui coulait doucement sur le visage, en lui glaçant la tempe. Si jamais l'assimilation de la tablette avait été plus rapide, la caverne engloutie aurait peut-être compté deux cadavres de plus, au cœur de ses ténèbres austères. Puis, quelque chose d'imprévisible se produisit, soudainement. Le sol commença à vibrer rageusement et, instinctivement, Kirie tourna le regard vers la maudite du Gura, en se demandant si c'était de son fait, peut-être à cause d'une agression soudaine ?!

Le sol sembla un instant se dérober sous leurs pieds. Comme un piège bien huilé, tendu et prêt à se déclencher au moindre effleurement, la Colère dégaina son sabre, alors que son corps tout entier s'élevait vers les cieux. Divisé en trois traits tournoyants, collés les uns aux autres, prenant de la hauteur tout en poussant un son strident, qui s'arrêta en un "boom", quand la foudre scindé se fusionna de nouveau. Le sabre sorti, genoux fléchis, l’œil aux aguets, Kirie se métamorphosa de nouveau, suspendue un moment dans les airs.


Les pans de son kimono flottèrent au vent, battant sagement dans le vide, ballottés par un doux zéphyr. Elle eut beau scruter dans tous les recoins, en profitant de son point de vue incomparable, mais rien à l'horizon. Ni même dans les parages. Dans un sifflement, elle commença à chuter sur place, la gravité la rattrapant finalement. après avoir été éhontément bafouée sans le moindre égard. La jeune femme retomba tel un missile, la pointe de sa lame en direction du sol, comme pour le pourfendre et lui faire regretter de l'inquiéter de la sorte.

A quelques centimètres au-dessus du sol, le haut du corps de la fruitée prit une teinte dorée, flamboyante, tout en se recroquevillant prestement sur lui-même, formant une boucle éthérée d'électricité. En un tour sur elle-même, Kirie reprit forme sur le sol, assise en tailleur, la main sur la cuisse. Penchée en avant et la tête baissée, ses cheveux lui cachaient totalement le visage, alors qu'elle soupirait lascivement. Encore une fois, elle venait de passer pour une idiote, avec son emportement habituel.

- Bon, je crois que c'est officiel. Annonça-t-elle, en se redressant tranquillement. Je peux pas trop les encadrer, les Anciens.

Elle se faisait sans doute trop de souci. Confrontée à un environnement et toute une logique qui lui échappait, un sentiment de malaise la poursuivait, depuis qu'ils avaient commencé leur étrange aventure. La combattante était toujours sur ses gardes, même en temps normal, mais il y avait là quelque chose de différent. Quelque chose d’indicible et de mystérieux, qui faisait dire à la téméraire rouquine que la moindre inattention pourrait déboucher sur un terrible coup du sort. Repensant à ce qu'avait dit Siam, tantôt, une certaine inquiétude lui serra les tripes, tandis que le sol s'enfonçait sous la terre.

Au vu des ingénieux systèmes qu'ils avaient rencontrés, il aurait fallu être idiot, ou doté d'une mauvaise foi hors paire, pour continuer d'affirmer qu'il n'y avait rien, en ces lieux. Cependant, si ils avaient mis tant de moyens pour camoufler quelque chose, son importance devait être capitale, tout ça n'étant qu'un amuse-bouche, comparé à ce qui était susceptible de se dresser sur leur chemin, par la suite. Étaient-ils seulement dignes, de ce qu'ils pourraient découvrir ? Leur laisserait-on seulement vraiment le choix ? Son regard passa sur ses nakamas, un à un, avant de finalement s'arrêter sur Siam, qui lui tournait le dos.

Si il y avait bien quelqu'un qui le méritait, ce ne pouvait être qu'elle. Avec tout ce qu'elle avait enduré, avec la passion qui la traversait, ce chemin devait lui être destiné. C'était à elle, que parlaient les ruines, au travers de leurs énigmes et de leurs étrange fonctionnement. Bien que le décor soit magnifique, féerique, avec ces poussières fluorescentes qui les entourait avant de s'envoler vers la sortie, la capitaine n'y voyait là qu'un potentiel danger.

Un agent chimique, ou peut-être une entrave supplémentaire à l'utilisation de ses pouvoirs. Elle devait rester prête, peu importe ce qui les attendrait. Kirie, elle, avait le rôle de s'assurer que rien ne vienne empêcher l'archéologue d'arpenter la voie se traçait devant elle, ni plus ni moins. Pour ça, elle était prête à tout mettre en oeuvre. Tout.

Ils finirent par arriver au point d'arrêt de l'ascenseur antique, mais encore une fois, il n'y avait pas l'air d'y avoir beaucoup de danger. Rétablie sur ses pieds, la pirate commença à faire quelques pas, pour se dégourdir les jambes et relancer leur joyeuse compagnie, dans leurs pérégrinations. Au bout de quelques mètres, où elle tenta de discerner quelque chose, sur les murs dantesques des galeries, enfouies profondément sous de nombreuses ruines, elle sentit son appui s'enfoncer dans des eaux glaciales.

Par pur réflexe, elle s'arrêta en plein milieu de son mouvement en reculant de quelques pas rapides. Immédiatement après avoir fait volte-face, elle releva le bras devant elle, comme pour barrer l'espace qui la séparait de ses nakamas.

- Nope ! Hinhin ! Allez, à plus ! Lâcha la capitaine, tout net. Tout, mais pas ça, pour la vaillante Dokien. Vous faites ce que vous voulez, moi, la flotte, j'en ai assez soupé là. C'est mort.

S'éloignant davantage de la mare grotesque, tout en secouant vigoureusement la tête, maugréant envers les vieux architectes qui avaient mis tout ça en place. C'est là qu'elle remarqua le second passage, qui lui avait l'air bien plus agréable à pratiquer, au moins pour elle...Ca restait un bien grand mot, au vu de ce qui jonchait le sol, mais c'était la seule option viable à ses yeux. Restait-il encore à voir si on pouvait minimiser le danger, ou pas...

- Ikki, j'imagine que ça va être comme tout à l'heure, mais tu peux nous dire quelque chose sur ces ossements..? Demanda Kirie, en se grattant l'arrière de la tête, circonspecte. Si t'as quoi que ce soit pour nous aiguiller, Siam, c'est le moment...Moi, c'est sûr, je vais par là, mais si tu peux nous éviter plus d'embrouilles, hein... Annonça-t-elle avec assurance, malgré une certaine réserve.

Tout reposait sur la jeunette, en qui la logia avait la confiance la plus totale. Autant s'engouffrer dans de lugubres entrailles n'avait rien de très engageant, autant avec la fiabilité de Siam pour les diriger, elle pouvait avancer avec assurance, peu importe ses décisions.

Divine Wrath Seal of approval