One Piece Anarchy
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Alaude V. Castafiore | Alouette, gentille alouette... Ou pas ! [Terminée]
Alaude V. Castafiore
Alaude V. Castafiore | Alouette, gentille alouette... Ou pas ! [Terminée] Xzch
Alaude V. Castafiore | Alouette, gentille alouette... Ou pas ! [Terminée] Hobv
Loca. :
Balgimoa.
Prime :
XXX.XXX
Berrys :
1.020.000.000

Feuille de personnage
Jauge d'intrigue personnelle:
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Alaude V. Castafiore
L'Alouette
posté le Sam 15 Aoû - 13:30

ALAUDE V. CASTAFIORE
L'ALOUETTE — 27 ANS  — FÉMININ — CIVILE — SAINTE DÉCHUE
métier : Musicienne -  Chanteuse - Archéologue.
groupe : Civile.
rêve : Chanter la véritable histoire de ce Monde - Percer le secret des Ponéglyphes - Posséder tous les trésors de ce Monde - Se venger des "Saints" qui l'ont exilée.
rang : L'Alouette.
grade (facultatif) : ///
prime (facultative) : ///
espèce : Humaine.
lieu de naissance : Marie-Joie - Red Line.
première île : A voir.
armes : Un violon - Son corps - Sa voix.
fruit du démon : Ito Ito no Mi - Fruit des fils.

DESCRIPTION (Physique/Mentale)



" Venez, venez… Approchez voyons ! Plus près… Plus près ! Attendez une seconde ! Mon ami... De quoi pouvez-vous bien avoir peur ? Je ne suis qu'un pauvre barde en quête d'oreilles attentives et de bourses généreuses. Si l'humeur vous en dit, accepterez-vous d'écouter mon humble récit ? Et s'il vous sied, libre à vous de récompenser ou non le bougre que je suis.

Merci mon ami, c'est bien aimable à vous ! À présent, asseyez-vous, prenez vos aises et laissez-moi vous conter l'histoire d'une pauvre âme qui navigua jadis sur nos mers enragées.

L'on disait d'elle que nul ne pouvait l'ignorer lorsque sa silhouette se dessinait à l'horizon.
Effectivement, elle n’était pas de ces individus qui passaient inaperçus et hommes comme femmes réunis se laissaient bien souvent aller à quelques œillades sur son passage. Toutefois, comprenons-nous bien, n’imaginez pas à l’entente de ces mots qu'elle était d'une beauté sans faille… Bien au contraire. Sa taille était moyenne, son corps fin avait l’aspect fragile, tandis que ses mensurations restaient tout à fait raisonnables et ses traits se révélaient assez simples. Pas de taille de guêpe, pas de poitrine exubérante, pas de jambes longues comme Grand Line. Bien qu'elle pouvait effectivement se targuer de ne pas être laide à regarder, son apparence presque juvénile pour son âge ne risquait pas de faire beaucoup d'ombre aux beautés pulpeuses qui peuplent les îles et les bars de la mer de tous les dangers…

Mais dans ce cas qu’y avait-il de si particulier chez elle pour fasciner ainsi ceux qui étaient amenés à poser leurs yeux sur sa frêle carrure me demanderez-vous ?

L'on dit souvent que l'habit ne fait pas le moine, que l'aspect extérieur diffère fortement de l'aspect intérieur et qu'il ne vaut mieux pas s'y fier. Mais la concernant, ce vieil adage n'aurait pas pu être plus faux. Un seul regard sur elle et l'on pouvait déjà deviner la vie qu'elle avait eue... De ses mains dénuées de toutes écorchures à ses doigts devenus calleux à force de pratiquer son art. De ses habits savamment tissés et richement décorés à son port exagérément altier. De sa chevelure couleur ciel impeccablement lissée à ses yeux perçants. Chaque cicatrice ornant sa peau claire, presque opaline, chaque mouvement calme et mesuré de ses membres fins reflétait son passé ainsi que le milieu duquel elle venait. Certes, il n'y avait aucune assurance que vous compreniez en détail son histoire, mais si tant est que vous ayez été un minimum observateur elle aurait été pour vous un véritable livre ouvert.

Elle émettait cette aura étrange de ceux qui vivent détachés de ce monde, un pied dans notre réalité, l'autre dans celle que seuls les nobles semblent comprendre. Elle était de ces gens vous donnent soit l'envie de les respecter et de les craindre, soit celle de les dénigrer et de les envier. Sans demi-mesure. Ceux qui vous donnent un frisson étrange et vous coupent le souffle pendant le court instant où vos yeux croisent les leurs. Son regard était après tout, dit-on, plus glacial que la plus froide des îles du Nouveau Monde. Ses orbes de la couleur de l'ambre vous transperçant de part en part dès qu'ils se fixaient sur vous, vous donnant l'irrépressible envie de fuir. Beaucoup détournaient les yeux lorsque cela arrivait, mal à l'aise, ceux-là n'apercevaient pas l'éclat de sagesse propre à ceux qui en savent plus que ce qu'ils ne veulent bien le dire...

Habituellement coiffées en deux simples queues de cheval, vous auriez assurément été happé par la couleur singulière des mèches encadrant son visage fin... Naturellement bleues comme le ciel, elles se paraient cependant d'un surprenant prisme de lumière. Prenant tantôt les reflets verts de l'aube, tantôt grisée par l'orage, tantôt orangée comme le crépuscule, sa chevelure
arborait ainsi des couleurs pour le moins impressionnantes.

De taille moyenne, elle passait aisément pour plus jeune qu'elle ne l'était réellement. Toutefois, son attitude était emplie d'une telle assurance et son port était si droit, presque souverain - comme pour faire taire à l’avance quiconque aurait la mauvaise idée de vouloir la critiquer -, que l'on réalisait assez aisément que la personne face à nous était bien plus âgée qu'il n'y paraissait. Cette réalisation se confirmait à la vue des courbes, certes très légères, mais néanmoins présentent de son corps, au premier abord frêle. Ce dernier cachait par ailleurs une force ainsi qu'une agilité insoupçonnable et peu étaient ceux qui se risquaient à chercher la bataille avec elle. Peut-être se doutaient-ils que la suffisance qui emplissait chacune de ses paroles n'était pas qu'une façade d'apparence ?

Son passé tourmenté l’ayant marquée de façon indélébile et son talent inné pour la musique en tant que seul exutoire, sa psyché n’était vraisemblablement d’un amas informe d’émotions contraires dominée par un égo surdimensionné et un amour distordu de "l'art" ainsi que du "beau". Ceux qui l'avaient croisée offraient ainsi un spectacle bien particulier à quiconque leur demandait de décrire sa personnalité. Ils commençaient le plus souvent par observer avec perplexité leur interlocuteur, cherchant leur mot, puis leur répondaient dans un souffle, le ton sans appel et le teint rougi par la colère “ C’est une salope !”. Et il s’avérerait bien difficile de leur donner tort…

Elle n'était pas, il est vrai, de ceux qui se laissent marcher sur les pieds et possédait, d'après la rumeur, toutes les clés de la manipulation à son trousseau. À l'occasion, elle n'hésitait d'ailleurs pas à se servir de ses charmes discrets si cela lui permettait d'atteindre ses objectifs personnels.

À dire vrai, il n'y avait que peu de chose qu'elle se refusait si cela lui permettait de satisfaire ses desseins... En effet, elle était pour ainsi dire... Particulièrement égoïste et matérialiste. Plus qu'une demoiselle en détresse, plus que le prince voué à défendre la veuve et l'orphelin, elle s'apparentait au monstre avide et cruel que dépeignent les livres d'enfants. Collectionneuse dans l'âme, elle s'était très tôt passionnée de trésors et d'histoire. Le secret représentait pour elle une drogue sirupeuse, la possession et l'exclusivité une extase vibrante. Elle avait ainsi depuis son plus jeune âge entretenu ses connaissances sur de nombreux sujets et se riait des lois qui l'entravaient dans l'accomplissement de sa quête de richesses. Cela avait beau eu avoir pour effet d'entraîner sa chute et son bannissement du "Paradis" doré qui l'avait vu naître, elle ne sembla cependant jamais encline à une quelconque remise en question de ses pratiques. Rien n'était de trop lorsqu'il s'agissait d'agrandir sa collection personnelle et tous ceux qui osaient se mettre en travers de son accomplissement signaient pour une vie de regrets.

Ses origines faisant, elle n'avait que peu de compassion pour ceux qui vivaient dans la misère et restait insensible à la détresse des autres, hormis peut-être s'ils pouvaient s'avérer être un atout pour étancher sa soif inexorable de possessions et de savoir. Cependant, elle ne faisait pas pour autant plus preuve d'admiration pour ceux qui dirigeaient le Monde, gardant au plus profond d'elle-même la cicatrice de leur trahison.

Comment ? Engager la conversation avec elle ? Cela aurait pu être l’une des tâches les plus périlleuses de votre vie, croyez-moi mon ami.
Peu pouvaient se targuer d'avoir entendu le son cristallin de sa voix en dehors de ses représentations. Outre l’épreuve que constituait le simple fait de captiver son attention, vous auriez pu vous considérer comme chanceux si elle n'avait écouté ne serait-ce que les deux premiers mots de votre phrase avant d’estimer que vous ne représentiez pas grand intérêt et de se détourner de vous.
Son langage, bien que savant, ne s'embrassait d'aucune convenance et elle ne craignait en aucun cas de froisser ses interlocuteurs de par ses propos. Son cœur ainsi empli de vices, fous étaient ceux qui pouvaient attribuer à ses actes une quelconque abnégation ou marque de gentillesse. Si elle avait certes été amenée par moments à aider de pauvres âmes, cela n'était dû qu'à un concours de circonstances fortuit.

Si par moment, il se dégageait d’elle une douce aura de mélancolie et qu'elle semblait être ailleurs, elle prêtait néanmoins une attention discrète à tout ce qui l’entourait. Inutile d'espérer pouvoir lui cacher quoi que soit, car elle était bien souvent au courant de bien plus de choses que vous ne pourriez l’imaginer. De même, dépendant de ce qu'il y avait à tirer de la situation, elle était tout à fait capable de faire preuve d’une intelligence rare et s’illustrait avec brio en tant que stratège. Ses analyses se révélant d’une grande finesse. Rusée et fourbe, son esprit retord, son absence totale de limite et ses tendances lunatiques en faisaient une adversaire redoutable. D'aucuns disait qu'à défaut de craindre de l'affronter en combat purement physique, rien n'était plus effrayant que la perspective d'affronter ses tactiques tant elle pouvait se révéler imprévisible si le prix en valait la chandelle.

Et bien mon ami... Vous semblez surpris. Vous attendiez-vous donc à ce que je vous parle d'un être pur et empli de bonnes intentions ? Détrompez-vous. Ce récit n'est pas celui d'un énième héros sans relief, il s'agit de l'épopée d'un des pires êtres que cette Terre ait abrités. Une Sainte déchue qui, dévorée par l'envie, l'amertume et la vengeance, emprunta sans ciller ne serait-ce qu'un seul instant la voie de la corruption. Celle d'une âme perfide et viciée que l'Histoire avec un grand "H" a aujourd'hui oubliée : Alaude Valentina Castafiore.
"

COOL RAOUL
TON ÂGE
27 ans.
TON AVATAR ET SON MANGA
Hatsune Miku | Vocaloid.
CONNU LE FORUM ?
Par beaucoup trop de personnes...
Je choisi donc Calci en parrain pour pas faire de jaloux et parce qu'il m'a grave aidée pour la pres' et tout ! :3





Dernière édition par Alaude V. Castafiore le Mer 2 Sep - 19:54, édité 12 fois
Alaude V. Castafiore
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Alaude V. Castafiore
L'Alouette
posté le Mar 1 Sep - 2:21

ALAUDE V. CASTAFIORE
L'ALOUETTE — 27 ANS  — FÉMININ — CIVILE — SAINTE DÉCHUE
HISTOIRE

" À présent mon ami, fermez les yeux et laissez-vous bercer par les notes de mon humble luth. Sentez les volutes du passé vous envelopper. Tracez avec votre esprit les décors d’un monde à l’aube d’une révolution qui façonnera la société que nous connaissons aujourd’hui. Voyagez à travers le temps et l’espace jusqu’à ces temps reculés où le One Piece n’était encore qu’un mythe et que le Monde n’était pas tant chamboulé par la houle des océans le couvrant, que par les conflits qui grondaient alors à l’horizon.

L’Humanité accueillait alors l’été 1495 sous une météo rageuse et les poètes de Grand Line contaient dans le vacarme des bars de la mer de tous les périples une douce légende. Celle de la Terre Sainte de Marie-Joie. Citée des dieux, outrageusement attaquée par l'Empereur Xoth quelques années plus tôt. Encerclée par les montagnes de Red Line et vêtue d’un habit d’une blancheur irréelle à laquelle seuls les élus étaient conviés. En son centre trônait un palais autrefois immaculé, à présent marqué par la colère du Souverain des Océans. Au nord de larges étendues verdoyantes aux reflets plus purs encore que la plus précieuse des émeraudes reprenaient peu à peu leurs droits, effaçant de leur feuillage les cicatrices de l'affrontement qui y avait pris place. Tandis que le sud, recouvert de jardins plus luxuriants les uns que les autres, abritait les quelques chanceux, choisis pour vivre aux côtés des maîtres incontestés du tristement célèbre Gouvernement Mondial, qui avaient survécu à ce triste événement.

C’est dans cette même citée, par-delà les remparts impénétrables de la forteresse blanche, que notre récit débute. Par une chaude soirée de juin, alors que le ciel crachait sa colère sur ceux qui avaient osé usurper son rang divin, zébrant l'obscurité d'éclairs retentissants… "



- Marie-Joie, la nuit du 20 au 21 juin 1495 - La vieille femme marchait avec un équilibre précaire au milieu des flaques, sa main fermement agrippée à sa canne dans l'espoir de ne pas déraper, le bruit métallique des chaînes fermement enroulées autour de ses chevilles s’entrechoquant à chaque pas luttant difficilement contre l’écho des gouttes qui s’abattaient sur elle avec force. Elle avait réussi à échapper à la foudre jusque-là, mais la pluie qui tombait drue sur la citadelle ne l'avait pas épargnée, trempant ses vêtements jusqu'à la chaire sur la totalité de son corps. Elle siffla de frustration alors que son pied dérapait sur un pavé rendu glissant par l'humidité, se rattrapant tant bien que mal de sa main libre à la première chose qu'elle trouva. Serrant les dents pour retenir un juron, qui sait ce que ces monstres auraient pu lui faire subir si elle ne l’avait pas fait, elle observa avec gratitude le muret qui lui avait épargné une chute dont elle aurait eu du mal à se remettre.

Son regard balaya les alentours tentant de discerner quelque chose à travers l'épais rideau d'eau qui couvrait une grande partie de la cité. Déjà, le sol de cette dernière avait été rendu complètement spongieux, la terre qui le composait ne pouvant pas absorber plus d'eau qu'elle ne le faisait déjà, ce n'était plus qu'une question de temps avant que les rues ne soient complètement recouvertes d’une boue disgracieuse. Cela ne l'étonnerait guère que les maîtres des lieux ne boudent l’extérieur pour quelque temps, leurs pieds étant après tout bien trop précieux pour rentrer en contact avec quelque chose d’aussi impur. Elle souffla de soulagement en apercevant un éclat doré au bout de la cour, encore quelques mètres et elle pourrait se retrouver l’air sec de la bâtisse.

Pressant le pas, elle finit enfin par arriver au niveau d’une imposante porte en bois. D’un geste rendu tremblant par l’âge et l’humidité ambiante, l’esclave vint saisir le heurtoir. Si le ciel avait été plus dégagé, les doux rayons de la lune auraient pu subtilement mettre en valeur les arabesques de fer savamment forgées pour décorer ce dernier. Malheureusement ni le temps, ni le moment ne se prêtaient à la contemplation et elle se contenta de soulever puis de rabattre l’objet avec urgence.

Il ne fallut pas plus d’une minute pour que l’imposante cloison ne s’ouvre, non sans émettre quelques grincements plaintifs, avant de laisser passer la tête curieuse d’un domestique. Ce dernier, habillé d’un uniforme simple, mais néanmoins bien plus ouvragé que la pauvre tunique dont l’avait affublée ses maîtres, laissa ses yeux vagabonder sur le corps ruisselant de l’ancienne. Une moue de dégoût prenant place sur ses lèvres, il adressa un regard curieux à cette dernière. Il était inhabituel pour des gens de son… Appartenance, de se déplacer ainsi sans leurs propriétaires au sein de l’édifice.

Faisant fi du jugement perceptible de son interlocuteur, elle s’empressa de l’informer de la raison de sa venue d’un ton décidé : Veuillez prévenir sa Sainteté Castafiore que le travail a commencé !

L’homme resta interdit un moment. Néanmoins, après quelques secondes elle put finalement apercevoir un éclair de compréhension remplacer la critique présente dans les yeux de ce dernier. Sans un mot, il se contenta de hocher la tête avant de faire volte-face et de claquer le portant en bois au nez de la pauvre femme qui resta seule sous les trombes d’eau. Poussant un soupir, elle comprit qu’on ne lui accorderait pas le droit de se protéger du déluge et fit à son tour demi-tour, trop lasse et abîmée par le temps pour maudire sa condition… Elle avait compris depuis longtemps maintenant que la Terre Sainte n’était ni plus, ni moins que le repère des Démons. Des démons habillés de blancs et affublés de fausses auréoles pour mieux tromper ce Monde désolé.


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Sainte Turchese E. Castafiore
- Dragon Céleste -

Elle ouvrit doucement les yeux, reprenant peu à peu pieds dans la réalité. Elle resta allongée un moment, fixant le plafond en bois couvert de dorure et de fresque illustrant les exploits divins de ses ancêtres. Son esprit était quelque peu brumeux.

Montant difficilement la main à son front, Turchese constata qu'elle était couverte d’un léger voile de sueurs en plus d'être fiévreuse. Rien de surprenant après l’effort qu’elle venait de fournir. Malgré tout, la Sainte ne put retenir la grimace de dégout qui vînt déformer ses lèvres déjà gonflées par les morsures - qu’elle s’était elle-même infligées un peu plus tôt sous le coup de la douleur -, tandis que ses doigts fins venaient essuyer d’un geste empreint d’épuisement les quelques perles salées qui s’étaient formées sur sa tempe. Un éclair de réalisation la saisit : elle était seule ! Une douleur lancinante la transperça au bas-ventre alors qu'elle tentait de s'asseoir. Se recouchant immédiatement, elle serra les dents à les faire crisser. Où étaient passés ces fichus domestiques ?

La noble dut puiser au plus profond de sa volonté pour trouver la force de tendre le bras afin de saisir la petite clochette ornée de turquoises négligemment posée sur la table de chevet situé à la gauche de son lit. Ce faisant, elle constata avec horreur que ses ongles habituellement parfaitement manucurés s’étaient brisés ci et là. Ceux encore intacts étaient quant à eux recouverts d’une matière rougeâtre relativement peu ragoûtante. Elle se souvint vaguement d’avoir serré les poings au point de s’en être percé les paumes… Elle attrapa avec rage l’instrument puis le fit tinter avec force, se promettant de faire payer à ces incapables qui non seulement avaient abandonné leur poste, mais en plus n’avaient pas pris soin d’effacer toute traces disgracieuses de l’épreuve que son corps divin venait de subir. Comment osaient-ils la laisser dans un tel état ?! Elle faisait partie des êtres les plus parfaits, les plus influents et les plus riches de cette Terre pour l’amour du ciel !

Le faible couinement de la porte de la chambre l'alerta de l'arrivée de quelqu’un dans la pièce. Turchese ne daigna même pas adresser un regard au nouveau venu, ce dernier ne méritant aucunement sa divine attention. Ses orbes d'azure fermement ancrés sur Saint Germain affrontant le Dragon drapé d'un drap sibyllin, elle entendit distinctement le bruit d'un plateau qu'on poserait sur une table et choisit ce moment pour manifester son énervement. Nettoyez-moi. Quand cela sera fait, faites savoir à toutes les personnes en charge de mes soins que la Sainte Terre et moi-même n’avons plus besoin de leurs services. Sa voix claire, quoiqu'un peu chevrotante en raison de son épuisement, raisonna alors dans la pièce, claquant plus puissamment encore que la tempête qui faisait rage à l’extérieur.

Un silence pesant s’installa dans la pièce. En l’absence d’une quelconque réponse, la Sainte se retrouva ainsi contrainte de détacher ses deux billes turquoise de la fresque. Ce qui n'eut pour effet que de nourrir un peu plus encore son agacement. Agacement qui atteignit son paroxysme lorsqu’elle prit connaissance de l’identité de la personne qui avait été envoyée suite à son appel. Qu’est-ce… Ils n’avaient tout de même pas osé ! Les Quatre-Vingts lui en soient témoins, la flopée de jurons qui s'échappa de ses lèvres dans les secondes qui suivirent n'était certes pas propre à l'étiquette dans laquelle elle avait été instruite, mais elle était totalement justifiée compte tenu des circonstances.
Devant elle se tenait une femme d'un certain âge, elle avait dû être grande fut un temps, mais aujourd'hui son corps était courbé par le poids des années. Elle était vêtue d'une simple tunique couverte de boue et les boucles poivre et sel qui encadraient son visage ridé goutaient sur le parquet en point de Hongrie tout juste ciré de sa chambre. Le nez de la noble se retroussa en une moue de dégoût, mêlé à une rage sans nom, tandis qu’un rayon de lune s’extirpait courageusement du rideau nuageux pour venir se refléter sur les entraves métalliques fermement accrochées à ses chevilles sanguinolentes.

Le rouge lui monta aux joues. De mémoire de Dragon Céleste, jamais une esclave n’avait été chargée de s’occuper d’une femme en couche ! Mais, alors qu’elle s’apprêtait à rentrer dans une colère noire et incendier la pauvre femme qui lui faisait face, la porte de la pièce s’ouvrit de nouveau, laissant passer un homme à la stature longiligne et fine. Ses cheveux d’un bleu à peine plus profond que la nuit, balayés ci et là de mèches blanches, étaient soigneusement remontés sur le haut de son crâne, preuve de son appartenance aux descendants des Rois des rois. Ses yeux ambrés se posèrent sur la vieille esclave, s’il était surpris de la voir en pareil endroit, il n’en montra rien. Son visage restant parfaitement impassible et vide de toute émotion, il se contenta d’agiter mollement l’une de ses mains osseuses afin de lui indiquer qu’elle pouvait disposer.

Alaude V. Castafiore | Alouette, gentille alouette... Ou pas ! [Terminée] Prh7

Saint Usignolo B. Castafiore
- Dragon Céleste -

Toujours allongée, Turchese observait avec ahurissement la scène. Son époux avait-il perdu l’esprit ?! N’allait-il donc pas s’offusquer de trouver son égale, la mère de son propre enfant, ainsi traitée comme une vulgaire roturière ? Abandonnée à son triste sort, endolorie et échevelée…
La Sainte se racla la gorge, tentant par ce geste de reprendre contenance, avant d'interpeler l'homme d’un ton acerbe, le venin au bord des lèvres : Qu’est-ce que cela signifie ?! Comment avez-vous pu laisser faire cela ! Où sont mes domestiques ?!

Comme s’il avait été surpris de la présence de la jeune femme dans la pièce, Usignolo sursauta avant de se tourner vers cette dernière. Il n’y avait dans le regard qu’il lui porta aucune trace d’affection, ni même de complicité. Seuls transparaissaient l’ennuie et l’épuisement. Quiconque aurait été présent en cet instant aurait été en droit de se demander s’ils étaient réellement mariés l’un à l’autre, si leur union venait réellement, quelques heures à peine de cela, de donner naissance à une nouvelle vie.
Oh… Il l’avait aimée. Il serait même plus juste de dire qu’il avait été totalement subjugué par sa jeune promise fut un temps. Dans de rares moment de rêveries, il lui arrivait de repenser avec nostalgie à leur rencontre. Il pouvait alors distinctement revoir cette petite fille aux joues rougies par la timidité, triturant nerveusement une mèche indisciplinée de sa chevelure turquoise tandis que le vent faisait danser les dentelles de son jupon. Il se rappelait son propre affolement face à ce spectacle, la façon dont ses mots avaient butté alors qu’il s’était présenté avec maladresse et du rire pur qu’elle lui avait adressé en retour.
Mais cela remontait à bien longtemps maintenant. A l’époque il n’était qu’un enfant qui croyait encore que l’amour naissait de l’amitié de deux couples de parents désireux de marier leurs enfants pour appuyer leur position et entretenir la pureté de leur lignée. Puis la puberté avait fini par planter en lui les graines du désir et, après avoir vécu ses premiers émois amoureux véritables, il s’était rendu à l’évidence qu’il n’y avait rien de moins désirable qu’une femme irascible et acariâtre, aussi belle soit-elle.

Il s’autorisa un soupir avant de répondre à sa femme. La pluie s’est infiltrée dans les fissures de l’aile nord… Le personnel a été réquisitionné pour empêcher l’inondation de se propager. Malgré la gravité de ses paroles, Usignolo parlait d’un ton morne. Cela faisait déjà cinq longues années que la tragédie s’était abattue, mais les travaux de restauration du château tardaient à finir. Les Dragons Célestes survivants s’en étaient dans un premier temps offusqués, mais le Gouvernement avait vite compris qu’à la manière d’enfants capricieux, il suffisait de leur fournir de quoi les occuper le temps que tout rentre en ordre pour avoir la paix. La différence étant, bien sûr, qu’à défaut d’ours en peluche et d’élastiques, les Dieux du Monde se distrayaient à coup de soirées extravagantes, de dépenses immodérées et d’abus en tout genre… Évidemment, à l’image de Turchese, tous n’avaient pas été dupes et certains considéraient ce manque d’investissement de la part du Conseil comme une véritable trahison, mais d’autres, comme son époux, se satisfaisaient de voir le moindre de leur désir exaucé. Comprenant que le courroux de la Sainte ne s’apaiserait pas sans une raison supplémentaire à l’absence de ses propres domestiques, ce dernier reprit sans même lui laisser le temps de rétorquer. Vos domestiques sont avec le bébé, la naissance a été compliquée. Tous les soins nécessaires à votre… Il hésita un instant, cherchant la façon la plus respectueuse de le dire. Bien être. Et à votre rétablissement vous ont été administrés pendant que vous dormiez.

Les deux perles turquoise de la jeune femme vinrent s’ancrer dans les orbes ambrés de son interlocuteur, emplies de défiance. L’accouchement avait été une épreuve aussi bien pour le nourrisson que pour elle ! Mais l’indifférence de son époux quant à sa souffrance n’était que peu de chose comparé à ce qu’elle avait enduré pour mener cette grossesse à terme. Aussi décida-t-elle, dans sa grande mansuétude de ne pas prolonger plus longuement cette discussion. De toute évidence, le Saint ne semblait pas enclin à admettre qu’un tel comportement devrait normalement nécessiter, à défaut d’un revoie des domestiques concernés - si ce n’est la potence même -, quelques remontrances. Et elle était pour sa part bien trop faible pour s’engager dans une énième joute verbale avec lui. Par ailleurs, à présent qu’elle avait rempli son devoir conjugale et accompli ce qui était attendu d’elle en tant que femme, elle devrait être à même de vivre plus librement.

Il s'agit d'une fille... Je vous laisserais le choix du prénom. Prenant son silence pour un signe d'apaisement, Usignolo avait repris la parole, coupant court aux pensées de sa compagne. Le sexe de leur progéniture tomba ainsi comme un couperait.
Une fille ? Turchese blêmi. Une fille ?! Elle senti plus qu'elle ne le vit ses yeux se remplir de larmes peu à peu. Une fille ! Le cœur au bord des lèvres et l'estomac dans les talons, elle leva un regard tremblant vers l'homme. Celui-ci semblait être à mille lieues de se douter du désarroi qui s'était emparé d'elle, rajoutant le plus simplement du monde : Faites-moi savoir lorsque vous vous sentirez prête.

Il ne s'agissait pas là d'une question et la sainte le savait pertinemment. Elle n'avait pas non plus besoin qu'il soit plus explicite dans sa formulation pour comprendre de quoi il en retournait. Une larme solitaire s'échappa des barreaux que représentaient ses longs cils et elle détourna légèrement le regard pour que son époux ne puisse assister ce spectacle. Il n'en serait, elle n'en doutait pas un instant, que bien trop satisfait. Ses doigts endoloris craquèrent alors que son poing se refermait avec force sur le drap finement brodé qui la couvrait, tentant vainement de se raccrocher à quelque chose, tandis qu'elle hochait la tête pour lui signifier son accord.

Elle n'était pas de ces femmes qui cherchaient la compagnie d'autrui, affectionnant habituellement la tranquillité et le recueillement. Pourtant, ce soir-là, allongée dans son lit, la pluie tambourinant à la fenêtre de sa chambre à peine éclairée alors que l'homme qui lui avait juré fidélité, amour et soutient quittait les lieux sans un mot de plus, Turchese ressenti pour la première fois de sa vie le poids de la solitude.


" Je vois à votre regard que le comportement de nos deux époux ne vous plaît guère… Mais rappelez-vous mon ami, s’il y a une chose immuable en ce monde, c’est bien la course du temps. Et aucun être vivants, aussi divin puisse-t-il prétendument être, ne peut réchapper à la danse effrénée des aiguilles sur le cadrant.

La triste vérité, mon cher, c’est que la Noblesse d’État, abîmée par l’assaut du Cannibale, n’en avait plus pour très longtemps. Car si la rage de Xoth n’avait pas pu atteindre tous les Tenryuubitos, nombreuses étaient les familles vouées à s’éteindre suite à son passage. N’ayant survécu qu’à travers un ou deux représentants, le son trébuchant du carillon annonçant la nouvelle heure ne faisait que rapprocher un peu plus ces dernières de leur trépas et toutes les richesses du Monde n’auraient su leur acheter ne serait-ce qu’une seconde de répit supplémentaire... Si elles en avaient conscience, l’histoire que l’on m’a contée ne le dit pas, néanmoins l’instinct ne s’y était pas trompé et les trente familles rescapées n’avaient pu tirer qu’une conclusion face à cette situation désespérée : La survie du nom était devenue la seule solution pour perpétuer la volonté des Dieux.

En tant que seuls miraculés de la famille Castafiore, feu Saint Usignolo et son épouse Sainte Turchese n’avaient d’autre choix que d’engendrer une progéniture masculine. Malheureusement, le destin semblait vouloir jouer un peu plus avec eux... La pauvre femme, qui avait vu sa propre lignée tirer sa première et dernière révérence face à un Homme-Poisson et à qui l’on avait ainsi refusé la libération, n’était plus qu’un symbole de honte et de désespoir aux yeux de ses pairs. Se complaisant dans l’alcool et l’argent, elle délaissa bien vite ses devoirs de mère, abandonnant son enfant aux mains des précepteurs et des domestiques.

Indifférent aux souffrances de sa compagne, le patriarche continuait quant à lui de visiter sa couche une fois par mois, se complaisant dans son rôle de martyr… Lui qui n’avait même pas daigné la nommer, trouva bien vite une utilité à sa fille. Cette dernière développant très tôt un talent inné pour la musique. L’on disait d’elle que sa voix était l’écho celles des plus grandes Saintes et que les cordes de son violon semblaient avoir été tressées dans les crins d’une créature divine tant les mélodies qui s’en échappaient lorsqu’elle en jouait étaient envoutantes. S’il n’avait eu le fils dont il rêvait pour hériter de son nom, le sort lui avait tout de même fait don d’un passe-droit pour accéder aux plus hautes strates. L’Alouette, telle qu’elle fut bien vite surnommée, charmant de son chant même les plus grands Dragon Célestes…

La gamine grandit ainsi dans un équilibre précaire, ne manquant de rien si ce n’est de la chaleur d’une étreinte. Malgré cela, dire qu’elle avait eu une jeunesse malheureuse serait vous mentir mon cher, nous ne pouvons après tout pas vraiment regretter ce que nous n’avons jamais connu.
Certes, sa mère était montrée du doigt par tous, mais l’endoctrinement dont elle fut l’objet dès le plus jeune âge suffit, dans son esprit d’enfant, à donner raison à ses bourreaux. Après tout, quel dieu s’abaisserait à poser genoux à terre face à un misérable plancton ?
Certes, son père ne voyait en elle qu’un outil, mais l’admiration et les applaudissements dont elle était couverte à chaque représentation ne faisait que gonfler un peu plus son égo. Après tout, quel dieu ne saurait apprécier l’adulation et les prières de ceux qui lui étaient inférieur ?

Toutefois, ces jours de félicité allaient être de courte durée… Bientôt l’innocence devrait faire place à des émotions bien plus sombre, l’ignorance faisant place à la connaissance et au fardeau qui l’accompagne."



- Marie-Joie, jour de l’exécution de Gol D. Roger 1500 – À demi allongée dans une méridienne de velours bleue, la femme tournait mollement les pages de son magazine, ses yeux turquoise parcourant sans réel intérêt la suite de mots qui constituait l’article moribond. Elle poussa un soupir désabusé alors que son attention se reportait sur les photos illustrant les propos de la journaliste. Si tant est que l’on pouvait qualifier ainsi une chroniqueuse si peu distinguée qu’elle osait comparer la tenue qu’avait portée Sainte Ursula lors de sa dernière Garden Party, à un chef d’œuvre évoquant à merveille la danse hypnotique des fonds marins. Comme s’il pouvait y avoir quoi que ce soit de beau ou de fascinant dans les tréfonds de ce monde… Cette fascination qu’entretenaient certains pour les paysages d’en bas étaient une insulte à la grandeur des Tenryuubitos ! Ursula n’était certes pas la femme la plus aimable qu’il lui avait été donné de rencontrer, néanmoins, elle ne méritait assurément pas pareil traitement…

Mère ! Père ! Le méchant monsieur est arrivé ! Ça va commencer ? Quand est-ce que ça commence ? Hein ? Mère ! Père ! Un second soupir, plus las que le premier, lui échappa alors que la voix familière de sa fille s’élevait à travers le salon. Par les Rois ! Il paraissait impensable, en entendant ce son nasillard s’échapper ainsi de cette si petite chose, qu’elle puisse avoir un si beau chant… Se sentant observée, elle releva la tête de sa lecture, captant le regard réprobateur de son époux. Elle n’en fit cependant que très peu cas… Il pouvait jouer au père modèle autant qu’il le souhaitait, cela ne l’empêchait pas de se tromper chaque année sur la date d’anniversaire de sa si précieuse « Alouette ». Un rictus vint étirer les lèvres fines de Turchese, elle trouvait assez ironique que le surnom que lui et ses soi-disant amis avaient attribué à l’enfant ne soit ni plus ni moins qu’une traduction du prénom qu’elle lui avait personnellement donné. Comme un énième défit de la part de son compagnon, comme une énième invalidation de ses traditions et de ses origines. Elle avait voulu faire un pied de nez à son mari en utilisant la langue natale de sa famille pour nommer la petite, mais comme toujours, il avait fallu que monsieur s’oppose à elle. Qui croyait-il être pour se permettre de la juger ainsi ? Après tout il avait lui-même clairement démontré de son désintérêt total pour sa propre descendance dès ses premières minutes de vie. Il avait bon dos le papa gâteau !

Semblant comprendre que sa femme ne lui répondrait pas, Usignolo vînt pincer l’arrête de son nez de son index et de son pouce. Ses doigts osseux appliquant une légère pression sur la zone tout en exerçant un mouvement circulaire. Essayant tant bien que mal de se calmer, il resta ainsi pendant quelques longues secondes avant de poser le regard sur l’image projetée par l’escargo-projecteur. Seul le son des cloches, raisonnant presque avec déférence, s’échappait des hauts parleurs. La chaleur semblait écrasante sur place, du moins si on en croyait les goûtes de sueur qui ruisselait sur les fronts des bandeaux qui s’étaient amassés pour observer la scène. À moins qu’il ne s’agisse là de leur état normal ? Il n’en était pas sûr…
Le Saint détailla rapidement l’apparence du mis-à-mort. Ce dernier, malgré la situation dans laquelle il se trouvait, arborait un sourire à glacer le sang. Les rumeurs disant qu’il avait perdu la raison étaient donc vraies après tout. Cela expliquait pourquoi cet imbécile avait fini par se rendre de lui-même. Malgré tout, le chef de la famille Castafiore devait tout de même lui accorder un tant soit peu de crédit pour son port droit et le manteau richement brodé de fils d’or qui reposait sur ses épaules. Le bougre avait de la prestance, du moins pour un vulgaire humain.

S’arrachant à sa contemplation, Usignolo pris la parole, s’adressant à Alaude : Cela ne devrait plus tarder à présent, un peu de patience. Effectivement, à ces mots, l’arrogant qui osait se faire appeler le Roi des Pirates commença l’ascension des escaliers qui le mèneraient à sa perte. Le tout dans un silence presque religieux.
Une fois en haut de la potence, les deux bourreaux chargés d’exécuter la volonté divine du Gouvernement lui demandèrent, comme la tradition le voulait, ses dernières volontés. Les deux pauvres bougres semblaient bien ridicules face à la taille impressionnante du criminel. S’il n’avait pas été trop fier pour admettre quelconque faiblesse de gouvernement, le Saint se serait volontiers laissé aller à quelques commentaires inquisiteurs sur les tremblements qui s'étaient emparés des hommes d'État. Bien sûr, il n'était lui-même pas en reste. Depuis son fauteuil, confortablement installé dans leur séjour immaculé, il pouvait clairement sentir la tension qui émanait de la scène qui se jouait sur son écran blanc. Et déjà, il pouvait sentir le poids de l'inquiétude se lover au creux de son estomac.

Ses orbes ambrés se posèrent pour d’imperceptibles secondes sur son enfant. Peut-être un regain d’instinct paternel aussi bref que surprenant ? Ou tout simplement le pressentiment que ce qui allait se dérouler dans les minutes qui suivraient allait changer à tout jamais l’état d’esprit de cette dernière. La pensée furtive d'éteindre la projection lui traversa l'esprit. Pour la première et la dernière fois de sa vie, l'homme s'interrogeait sur le bien-fondé de laisser un enfant, a fortiori sa progéniture, assister à une scène qui promettait d’être d’une violence inouïe. Néanmoins, l’excitation visible dans le regard innocent d’Alaude, alors qu'elle se dandinait d’impatience sur le tapis persan en laine de lapin angora qui décorait le sol du living-room, l’en dissuada. Il ignorait alors, que ce choix serait le pire qu'il aurait à faire de toute sa vie...

Soudain, le cri d’un spectateur s’éleva à travers l’écran. Faisant sursauter les trois Dragons Célestes d’un même souffle. Une question, simple, venait de fuser au-delà de la danse métallique des carillons. Une question, emplie d'espoir, dont la réponse marquerait à jamais les esprits : Qu’as-tu fait de ton trésors ? Ton trésor très spécial ! Le One Piece ! Usignolo entendit clairement l’inspiration emplie d'expectation que sa fille avait pris à son entente. Et le malaise s’empara de lui. La peur, qui jusque-là dormait tranquillement au plus profond de lui s'éveilla. Ses entrailles se tordirent douloureusement alors qu’elle s'étirait en leur sein. Intérieurement, l'homme pria pour que le pirate n’ait pas entendu l’interpellation. Malheureusement, dans le silence ambiant qui régnait sur la place d’exécution, seulement rompu par les sommations des bourreaux, les paroles de cet inconnu avaient raisonnées avec tant de force que seul un sourd aurait pu les ignorer.

Le sourire de Roger s'agrandit et le chef de la famille Castafiore compris qu'il était à présent trop tard pour revenir en arrière. Le gouvernement s'était fait berner. Ils avaient cru que, par son abandon, le Roi des Pirates avait signé son ultime révérence à l'encre de leur victoire. Les Quatre-Vingts en soient témoins, ils s'étaient fourvoyés... Mon trésor ? Si vous le voulez, vous n’avez qu’à le prendre. Cherchez-le ! J’ai tout laissé au même endroit. À mesure qu’il parlait, la panique s’était emparée des officiers chargés de l’achever. Ces derniers abattant leur lame avec urgence sur le forban dans l’espoir de le faire taire. Le silence repris ses droit sur la place où s'étaient réunis les curieux et, par extension, de la pièce où s'étaient assis les dieux. À peine brisé par le bruit discret d’un magazine que l’on laisse échapper au sol. L’homme n’eut nul besoin de vérifier l’état de sa femme pour deviner qu’elle était tout aussi choquée que lui, si ce n’est plus. Le sang cognait à ses tempes à un rythme effréné, battant la mesure pour accompagner la panique qui s’emparait peu à peu de lui avec une force incommensurable.

Puis, l’exaltation de la foule. Incontrôlable. Incontrôlée… Le Roi des Pirates s’éteignait sous les applaudissements et les bravos. Et à cet instant précis, la petite voix d’une enfant vint s’ajouter aux cris du peuple. Un trésor… Je veux l’avoir ! Père ! Je veux l’avoir !

Non ! Le teint du Tenryuubito, pourtant déjà clair, était soudainement devenu blafard tandis qu’il répondait avec précipitation à la jeune fille. Le ton se voulait sec, n’invitant aucunement à la relance… Malheureusement, si le Saint avait pris son rôle de parent plus à cœur, peut-être aurait-il su qu’il n’y a pas plus difficile à raisonner qu’un enfant qui ne comprend pas pourquoi il ne peut pas avoir ce qu’il désire.

La jeune sainte, du haut de ses cinq années n’était certes pas bien vieille. Néanmoins elle avait assez vécu pour s’habituer à ce qu’on ne lui refuse rien. Ses précepteurs lui avaient appris qu’en tant que Dragon Céleste, elle était l’équivalent d’un dieu. Rien n’était assez précieux, assez rare, assez cher en ce Monde pour elle. Par nature elle était à l’origine de tout ce qui était et, par conséquent, tout ce qui était lui revenait. L’excitation avait laissé place à la confusion dans les billes dorées de l’héritière des Castafiore tandis que des perles salées commençaient à apparaître au-dessus de ses cils azures…
Alaude prononça alors pour la première fois de sa vie une question qui allait dicter l’ensemble de ses actions futures. Une question plus simple encore que celle que l'inconnu avait adressé un peu plus tôt à Roger, presque banale dans la bouche d’une enfant de son âge. Une question qui pourtant resterait à jamais sans réponse. Mais… Pourquoi ?


" Dites-moi mon ami, que pensez-vous qu’il soit le plus difficile de stopper. La vague destructrice du temps ou la curiosité d’une enfant ? A moins que les deux n’aillent de pair après tout…

Toujours est-il que ce jour marqua le début d’une épopée. Oh… Je ne parle point de l’épopée que nous connaissons tous voyons ! Non… Nous n’avons que trop entendu l’histoire du Roi des Pirates et de ceux qui lui succédèrent. N’avez-vous donc rien écouté de mon récit ? Croyez-vous réellement que je vous aurais fait l’affront de vous amadouer avec l’histoire d’un démon pour vous parler d’un vulgaire humain ? Non… Rassurez-vous mon cher, loin de moi cette idée. Je fais bien évidemment référence aux aventures de notre cruelle héroïne.

Car sans le savoir, alors que Gol D. Roger abattait son ultime injure sur le gouvernement, il amorça aussi, à des lieues de là, le début d’une série de questionnements qui resteraient sans réponse. D’une série de réprimandes et de punitions. L’Alouette n’avait finalement de charmes que si elle restait bien sagement en cage, continuant de chanter encore et encore, ce jusqu’à épuisement. Jamais, au grand jamais elle ne devait échapper à l’emprise de ses maîtres et déployer ses ailes. Et, dès lors que ces derniers le comprirent, l’étau qui la retenait prisonnière ne se fit que plus lourd et plus dense.

Toutefois il était à présent trop tard pour couvrir les barreaux sensés empêcher la jeune Dragon Céleste de prendre son envol. A mesure que le temps passait, l’oiseau ainsi enfermé, à qui l’on avait fait miroiter l’infinité du ciel, suppliait que l’on lui accorde la liberté qui lui était due. Sa voix autrefois si douce aux oreilles de ses pairs se transforma en une litanie dérangeante de revendications. Et bientôt, tandis que l’arrivée de 1502 tentait d’étouffer le crissement incessant de ses demandes saugrenues sous un épais manteau de neige, les cris d’un nouveau-né retentirent dans l’immense château de Marie-Joie. L’héritier Castafiore était né. Et si ses parents accueillirent la nouvelle avec un soulagement sans nom, cette félicité ne fut que de courte durée.

Alaude n’aurait dû être qu’un outil, un moyen pour ses parents de gagner la sympathie des autres Tenryuubitos le temps qu’ils puissent la remplacer par un véritable héritier. Malheureusement, il existait dans la philosophie des Dieux du gouvernement une faille… Que dis-je, un trou béant ! Tenons-le-nous pour dit, il n’y a pas pires œillères que l’arrogance et le narcissisme. A trop se regarder, nous n’oublions que trop facilement de s’assurer que notre environnement nous est favorable.

Quelle était donc cette faiblesse que les Dragons Célestes n’avaient su voir ? Et bien… Rien de plus simple mon cher. Voyez-vous, un Dieu ne devrait pas avoir à demander la permission. Un Dieu ne devrait pas avoir à réclamer. Un Dieu ne devrait pas avoir à douter…

Et… Alors que Saint Usignolo et Sainte Turchese se délectaient de ne plus avoir à se supporter l’un l’autre en dehors des événements mondains. Les événements qui suivirent, ne jouèrent aucunement en leur faveur. Car, nous autres pauvres bougres pour qui ces histoires ne sont plus que de vagues souvenirs à conter au détour d’un feu et d’un peu d’un bon vin le savons bien, le futur qui attendait ceux qui vivaient en ces temps reculés ne pardonnerait aucune arrogance, aucune ignorance et aucune complaisance… Rien, pas mêmes les barreaux les plus épais, pas même les pleurs les plus puissants n’auraient pu empêcher le grondement des conflits naissants de parvenir aux oreilles attentives de l’enfant qu’elle était alors.
Le temps avançait, implacable et, lorsque quelques mois plus tard, l’un des cinq membres les plus éminents du gouvernement tenta de prendre le pouvoir… L’écho des questions repris de nouveau.


« Pourquoi nous attaque-t-on alors que nous sommes des dieux ? »
« Pourquoi ne peut-on pas avoir le One Piece alors que nous sommes des dieux ? »
« Pourquoi nous trahit-on alors que nous sommes des dieux ? »
« Pourquoi nous préoccupons-nous d’Ohara alors que nous sommes des dieux ? »
« Pourquoi l’un des nôtres est-il torturé ainsi alors que nous sommes des dieux ? »
« Pourquoi n’ai-je pas le droit de savoir alors que je suis un dieu ? »
« Pourquoi n’ai-je pas le droit d’avoir alors que je suis un dieu ? »
« Pourquoi ne me répondez-vous pas ?! Je suis un dieu ! »



« Pourquoi ». Un mot si insignifiant, pourtant craint de tant des parents… Je ne saurais vous dire si ceux de notre sombre héroïne auraient pu éviter ce jeu du sort. Comment ? Que dites-vous ? S’ils avaient pris soin de s’occuper eux-mêmes de son éducation au lieu de laisser leurs adorateurs s’en charger ? Ma foi… Peut-être. Peut-être pas… Comme le dit l’adage : ce qui est fait est fait, cela ne peut plus être défait. Nous ne saurons jamais ce qu’il serait advenu si elle était née dans un foyer plus aimant.

Néanmoins vous n’avez pas tort mon cher. Il est vrai que son éducation avait sans doute fait d’Alaude Castafiore l’un des spécimens les plus accomplis de la Noblesse d’État. Elle était si convaincue d’être au-dessus de tous, que le refus de ses propres parents avait suffi à mettre en branle ses convictions quant à leur condition d’êtres divins. Ironique, n’est-ce pas ? "




Dernière édition par Alaude V. Castafiore le Mer 2 Sep - 12:32, édité 6 fois
Alaude V. Castafiore
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Alaude V. Castafiore
L'Alouette
posté le Mar 1 Sep - 2:24

ALAUDE V. CASTAFIORE
L'ALOUETTE — 27 ANS  — FÉMININ — CIVILE — SAINTE DÉCHUE
HISTOIRE

Alaude V. Castafiore | Alouette, gentille alouette... Ou pas ! [Terminée] E18l

Eva
- Esclave -

- Marie-Joie, peu avant la torture de Kopotkine, 1507 - La jeune fille ne disait mot, observant avec intérêt l’éclat bleuté de ses cheveux. Leur couleur paraissait presque irréel, ainsi soulignée par la caresse timide des derniers rayons de soleil. Elle avait cessé de compter le nombre de fois où elle s’était laissé aller à ces séances d’admiration. Confortablement installée à l’abris des regards grâce aux imposantes étagères en bois massif qui habitaient la Bibliothèque de Marie-Joie. Elle retint son souffle tandis que la source de son éblouissement venait replacer une mèche rebelle derrière son oreille avant de tourner avec délicatesse la page de son bouquin. Le craquement du papier vieillit par le temps qui s’installa confortablement dans le silence environnant ne manquant pas de faire naître en elle le vent de la nostalgie. Elle avait pris l’habitude de se réfugier en ces lieux car ils lui rappelaient son ancien foyer… Ses maîtres et leurs pairs n’avaient que faire des vieux grimoires ou des manuscrits taché par les aléas qui y séjournaient confortablement. Aussi avait-elle trouvé en ce lieu un moment de répit et de recueillement, loin de la cruelle réalité des choses.

Du moins l’avait-elle cru. Jusqu’au jour où, quelques mois auparavant, « elle » était entrée. Le sifflement douloureux de la porte, peu habituée aux sollicitations des propriétaires des lieux, l’avait alors sorti de sa torpeur et de ses tristes pensées. Elle s’était précipitée derrière un cabinet ornée de fleurs de nacre et d’obsidienne, pensant avoir été surprise par ceux qui l’avaient achetée pour quelques berrys à peine sur le marcher noire. Déjà elle se préparait à subir les pire punitions pour avoir osé fuir les tâches dont on l’avait accablée. Pourtant, la silhouette qui s’était dégagée de l’embrasure n’avait rien de comparable à l’ignominie de ses propriétaire. Et la jeune esclave était restée coi d’émerveillement devant la beauté de la jeune fille qui l’avait rejointe en ces lieux sacré de savoir.

Elle avait plus tard appris son nom, questionnant sous couvert de naïveté ses camarades. Sainte Alaude Valentina Castafiore… Le nom lui-même sonnait comme une douce mélodie à l’oreille. Elle était la fille de Sainte Turchese et de Saint Usignolo, deux Dragon Célestes dont, respectivement, la cruauté et le nihilisme étaient connu de tous. La jeune sainte, à présent âgée d’une douzaine d’année était à peine plus âgée qu’elle, mais il émanait déjà de sa petite stature une aura qui imposait le respect. Pourtant, d’après les dires de ses compagnons de chambre, la pauvre Sainte n’était traitée avec la déférence qui lui revenait de toute évidence que lorsqu’elle se pliait au caprices de ceux qui lui avaient donné la vie. La rumeurs voulait que l’Alouette, telle qu’on l’appelait, était une enfant excentrique. Posant à tout va nombre de questions saugrenues et réclamant toujours plus de richesses. Certains attribuaient ce comportement à la bêtise, d’autre y voyait les caprices d’une adolescente délaissée depuis la naissance de son frère. Eva, elle, avait reconnu ce besoin de savoir qui caractérisait ceux qui cherchent à comprendre. Très vite, la brunette compris que lorsque la Sainte n'était pas sur scène, chantant pour divertir un publique qui n’avait que faire de ses questionnements existentiels, elle passait le plus clair son temps à la bibliothèque pour étudier.

Les livres retraçant l’histoire de ce Monde semblaient avoir sa préférence. La bleuté pouvait ainsi passer des journées entières, le nez entre les pages jaunies, sans jamais montrer la moindre trace d’ennui. Pourtant… La jeune esclave n’avait pu s’empêcher de remarquer qu’à chaque fois qu’elle arrivait à la fin de son ouvrage, le visage de la musicienne, habituellement si lisse, se déformait en une moue agacée. Comme si les lignes qu’elle venait d’écumer n’avaient pas su étancher sa curiosité, comme si les questions qu’elle se posait au plus profond d’elle-même n’avaient pu trouver, parmi l’enchainement de verbes, de prépositions, d’adjectifs, de dates et de noms, la réponse dont elles avaient si désespérément besoin.

Au fil du temps, Eva avait pu observer les idées d’Alaude prendre forme. Ses recherche devenaient de plus en plus ciblées, les mémoires et journaux qu’elle allait parfois chercher dans les coins les plus sombres de la bibliothèques devenaient de plus en plus particulier. Cependant, rien ne semblait calmer la frustration de la curieuse. On lui avait décrit Alaude, enfant, comme difficile à cerner et à manier. Mais l'adolescence exacerbait son caractère borné et sa capacité à faire fi de ce qui se passait autour d'elle. Eva observait ainsi, inlassablement, la jeune fille s'orienter vers un chemin dont les Tenryuubitos n’approuveraient sans doute pas l’arrivée.

Bientôt le besoin de descendre sur Terre se fit sentir chez la Sainte. Cela commença par quelques lectures de-ci de-là, elle étudiait un livre parlant d'une île où le soleil ne se couchait jamais ou bien suivait les aventures d’un homme qui prétendait avoir découvert une cité d’or dans le ciel. Ces nouvelles recherche, d’abord ponctuelles devinrent de plus en plus courantes, si bien que depuis quelques temps, la jeune esclave avait pris l’habitude de sélectionner quelques livres dont elle pensait qu’ils pourraient lui plaire. Les posant sur la table où Alaude avait pris l’habitude de s’assoir.

Elle avait parfaitement conscience de l’ironie de la situation. Le Gouvernement avait mis fin à la vie de tous ceux qui lui étaient chers car ils avaient osé, selon les dires de la Noblesse d’État et du Conseil, s’apposer à eux. Leur crime ? Le savoir.
Pourtant aujourd’hui, l’une des représentante de ce même Gouvernement s’adonnait aux mêmes pratiques que celles qui avaient justifié l’assassinat de plusieurs centaines d’êtres humains… Ou plutôt devrait-elle parler de génocide ? Même si les politiques et les officiers de ce Monde s’y refusaient, c’était après tout de cette façon que l’on qualifiait l’extinction de son île à l’abris des oreilles indiscrètes.

Un craquement la tira en dehors de ses pensées, la faisant sursauter. Sous la surprise, son dos vînt se cogner contre une desserte remplie de livre disposée derrière elle. Les bouquins, qui ne tenaient en place que par miracle, chutèrent au sol dans un bruit retentissant, alertant la Dragon Céleste de la présence d’une autre âme en ces lieux oubliés.

Qui est là ? La voix douce mais ferme de la bleuté claqua, sommant l’individus qui l’espionnait ainsi de façon plus qu’éhonté de sortir de sa cachette. Elle n’était qu’à moitié surprise. Elle se doutait qu’elle n’était pas seule lors de ses escapade dans les archives de Marie-Joie. Les livres apparaissant et disparaissant sans raison de sa table, toujours choisi en accord avec ses goûts, étaient un indice assez probant. Néanmoins, si elle appréciait l’attention, elle n’était guère friande des voyeurs.

Eva ne savait que faire, fixant le tas de grimoire échu par terre avec colère et désarroi… C’en était fini d’elle ! Jamais une Dragon Céleste, aussi différente soit-elle ne pardonnerait un tel écart à une esclave. Déglutissant avec difficulté, elle prit toutefois son courage à deux mains et fit un pas de côté, se dévoilant à son interlocutrice. Cette dernière fronça les sourcils en l’apercevant mais ne montra aucun signe d’agacement supplémentaire. Levant le bras dans sa direction, elle lui fit signe d’approcher.
Tremblante, l’esclave s’exécuta. Allait-elle être frappée pour son insolence ?

Il n’en fut cependant rien, car quand elle arriva au niveau de la bleuté, cette dernière repris simplement. Toi… Est-ce toi qui me laissait ces ouvrages ? Comme pour souligner son propos, Alaude pencha la tête en direction des deux livres qu’Eva avait déposé sur le meuble le matin même. La gorge serrée par la crainte, cette dernière se contenta de hocher la tête, ne faisant pas confiance à sa voix pour répondre normalement. La saint vint pincer son menton de ses doigts fins, semblant réfléchir un instant, sa voix s’élevant à nouveau dans un murmure. Intéressant…

La jeune esclave resta muette, ne sachant que répondre à cette affirmation. Elle ne pouvait pas révéler ses origines, cela aurait assurément signé son arrêt de mort. Pénétrer dans la bibliothèques des Dieux de ce Monde était une chose, révéler être l’une des survivantes d’un peuple à même de causer leur chute en était une autre. Malgré tout, l’intérêt que la jeune fille portait à l’Alouette était trop fort pour laisser passer une opportunité pareille. Et comme souvent, la curiosité se révéla plus forte que la raison… Hum… Si cela n’est pas indiscret, votre Sainteté, vous me semblez chercher quelque chose en particulier. Serait-il possible de savoir de quoi il s’agit ? Peut-être puis-je vous aider à le trouver ? Demanda-t-elle d’une petite voix.

Les billes ambrées de la Sainte vinrent s’ancrer dans ses rubis, visiblement prises dans un tourbillons d’émotion et de questionnement. Si elle ne pouvait les déceler avec précision, Eva pouvait tout de même imaginer avec facilité desquelles il s’agissait. La colère, tout d’abord, de se voir adresser la parole par une simple esclave. Puis la surprise, d’entendre pareille proposition. L’hésitation, de s’abaisser à accepter cette dernière. Enfin, la résignation, dictée par le besoin de connaître la vérité. Alaude ouvrit une première fois la bouche, se ravisant dans la foulée. Fallait-il vraiment qu’elle en arrive là ? Demander l’aide d’une… vulgaire humaine. Pire ! Un objet. Les lèvres rosées de la jeune Alouette se pincèrent, comme pour retenir les paroles qui ne demandaient qu’à échapper à son orifice. Les temps semblaient s’écouler au ralentis pour les deux jeunes filles. Soudain, le piaillement caractéristique d’une nuée d’oiseau passant non loin de la fenêtre contre laquelle la Sainte s’était adossée les sortirent de leur torpeur. Un air décidé imprimé sur son visage d’ange, cette dernière posa la question qui la perturbait tant. Ce que je cherche ? A toi de me le dire esclave. Toi qui sembles prétendre connaître ce que les Dieux ignorent. Dis-moi… Quelle est donc cette chose dont les livres d’histoire ne parlent pas ?

Pour son plus grand malheur, la brunette ne savait que trop bien ce que les livres d’histoire avaient sciemment oubliés. Son frère aîné y avait consacré sa vie et, enfant, elle ne se lassait de lui demander de lui raconter l’histoire des héros oubliés qui peuplaient ses recherches. Si la tragédie n’avait pas frappé à la porte de leur modeste demeure, sans doute aurait-elle suivi ses traces et rejoint les rangs des archéologues de l’île. Son cœur se serra alors qu’elle revoyait le pauvre bougre l’observer s’éloigner sur son radeau de fortune tandis que le ciel se couvrait d’épais nuages de fumée noirâtre à mesure que le feu dévorait le grand arbre qui dominait leur patrie. Elle pouvait encore clairement sentir l’odeur du papier brûlé se mêlant à celle de la poudre à canon et de la chaire calcinée lui agresser les narines. Il avait sacrifié sa vie pour qu’elle puisse conserver la sienne. Mais comment une enfant, seule dans ce Monde aurait-elle pu survivre ? Il n'avait fallut que quelques jours pour que la pauvre fille se retrouve dans une cage et vendue au marché noir...
La logique lui aurait intimé de garder le silence. Ou tout du moins de mentir. Sa jeune interlocutrice n’aurait pu lui en tenir rigueur de ne connaître la réponse à sa question. Comme elle l’avait si bien dit elle-même, elle n’était après tout qu’une simple esclave. Que comptait-elle donc apprendre à un Dieu ?
Mais… Était-ce l’éclat mordoré étincelant de mille feu au cœur des yeux de la Sainte ? Ou la danse subtile de ses cheveux couleur ciel ? Eva, subjuguée par l’assurance et le charisme de l’adolescente qui lui faisait face, ne sut retenir les quelques mots qui suivirent. …Le Siècle Perdu des Ponéglyphes. A peine avait-elle prononcé cette phrase que la jeune fille repris soudainement pieds avec la réalité. Plaquant ses mains avec fermeté sur sa bouche, son regard rouge sang empli d’une panique non dissimulée. Elle n’arrivait pas à croire qu’elle venait de commettre une telle erreur. Dardant ses rubis dans les ambres de la Tenryuubitos, elle comprit immédiatement à l’éclair avide qui le traversa qu’elle n’aurait jamais dû s’ouvrir à cette dernière.


" L’on dit que les rencontres et le hasard forgent une destinée. Hasard ou non, il est indéniable que la croisée des chemins qui s’opéra entre Alaude Castafiore et la jeune Eva jouèrent un rôle prépondérant dans le sort qu’elles connurent par la suite.

Comprenant son erreur l’esclave pris le parti de se taire, refusant de répondre à toute les questions que lui adressa la Sainte par la suite. Pauvre enfant naïve, aveuglée par la beauté. Elle n’avait pas su identifier la dangerosité d’un dragon déguisé en alouette et elle allait en payer le prix…
Car face à son mutisme et lassée de ses refus, la jeune Castafiore alors encore bercée par les précepte de ses enseignants malgré ses questionnements amena l’indisciplinée à son père. Il est difficile de savoir si elle le fit afin de la punir ou parce que son esprit, encore empli de l'innocence enfantine, lui fit croire que l'esclave parlerait plus facilement à un adulte. Toujours est-il qu'elle ne s'attendait très certainement pas à un tel dénouement.

L’homme, bien que dans un premier temps perplexe quant à l’intrusion de sa fille dans son bureau en si mauvaise compagnie se serait, dit-on, levé si vite que sa chaise en tomba à la renverse à l’entente du nom du siècle honni.
L’histoire ne dit pas précisément ce qu’il se serait passé ensuite, néanmoins la rumeur veut que dans un geste empli de froideur, sans même attendre une explication de plus, Saint Usignolo poussa le corps fragile de l’enfant d’Ohara dans le brasier qui brûlait au cœur de la cheminée de marbre blanc trônant au centre de la pièce. Les cris de la jeune fille alarmant nombre de domestiques passant non loin du lieu. Certains raconteraient ensuite, à l’abris des oreilles indiscrètes, que plus que des hurlements de douleur, ces derniers ressemblaient à des chants emplis de colère. Telle une malédiction apposée sur le nom de cette pauvre famille. Et qui sait… En y réfléchissant, peut-être n’avaient-ils pas tout à fait tort.

Voyons mon ami… Ne faites donc pas l’erreur de croire que celle qui en fut la plus impacté eut été cette pauvre esclave. Certes, si elle n’avait pas adressé la parole à la jeune Dragon Céleste en cette funeste journée, il y a fort à parier que sa vie aurait connu une fin différente mais je crains qu’on ne puisse s’avancer sur le fait qu’elle aurait été plus heureuse. La jeunesse de la survivante d’Ohara aurait eu tôt fait de la trahir d’une façon ou d’une autre. Et quand bien même elle aurait su garder son secret plus longuement, ses maîtres auraient eu tôt fait de se lasser d’elle et de lui faire subir que la mort pour se divertir.
L’Alouette, en revanche, n’aurait jamais entendu parler du secret ultime. Et, croyez-moi, l’avenir que lui ouvrit cette information n’était pas moins sombre, ni moins douloureux que celui de la pauvre âme qui s’était éteinte dans les flammes.

Par ailleurs, la torture de l’un de ses frères Tenryuubitos, publiquement exécutée sur le sol de Shabondy à peine quelques jours plus tard acheva d'apprendre à la jeune Alaude l'importance de savoir garder un secret. Il existait en ce Monde un sujet si grave que les Dieux eux-mêmes étaient prêts à se salir les mains et à trahir les leurs. Cette année-là, l'alouette compris que le silence était d’or et, que si elle voulait éviter pareille fin que celle subi par la jeune Eva, pareille humiliation que celle infligée à ce pauvre Kopotkine, il lui faudrait apprendre à jouer d’un tout autre instrument : celui de la manipulation.

A compter de ce jour, l’Alouette sembla enfin accepter son sort d’oiseau d’apparat. Sa voix divine s’éleva sans aucun trémolo, charmant de plus belle ses comparses. A l’image de sa cousine la pie, elle fit mine de se complaire dans les éclats chatoyants des métaux précieux et des pierres rares. Dépensant sans compter, comme pour satisfaire un besoin insatiable de possession… Bien sûr, tout cela n’était que façade. Et tandis que ses maîtres s’émerveillaient des sonorités de son chant, ses serres acérées grattaient discrètement le fond de sa cage dorée. Les bijoux, les soies et les parures bariolés dont elle décorait ses plumes n’était qu’un écran de fumé pour masquer ses réelles dépenses.
Usant de divers alias, elle faisait ainsi croire à ses serviteurs qu’ils allaient acheter un énième collier, un énième bracelet aux enchères. La plupart du temps, c’était réellement ce qu’il se passait, mais parfois… Oh, parfois… Voyez-vous très cher, il arrivait que les écrins précieux renferment en réalité des ouvrages interdits, des objets qu’il aurait été choquant de voir en possession d’une personne bénéficiant d’un tel titre. Au travers de lettre de remerciement adressées par les maîtres priseurs auprès desquels elle achetait régulièrement, se trouvaient parfois des informations sur Ohara ou les Ponéglyphes.

Certes, à présent que la Noblesse Gouvernementale s’était cloitrée derrière les remparts de Marie-Joie, elle se devait d’être vigilante, néanmoins son titre de Sainte lui accordait tout de même de nombreux écarts. Elle n’avait qu’à supprimer les pauvres bougres qui, rongés par la curiosité, osaient jeter un œil sur la nouvelle possession de leur maîtresse. Et lorsque l’on lui demandait de justifier pareil acte, elle se contentait de dire que le domestique lui avait désobéi.

Ses frasques, ses excès et son absence visiblement de remise en question étaient d’une triste banalité au sein des autres Dragon Célestes. Et bientôt, il apparut que notre sombre héroïne n’était qu’une noble parmi tant d’autres…

Malheureusement, son numéro d’animal apprivoisé, bien qu’excellent, ne sut tromper la totalité de son entourage. Et, dans l’ombre des coulisses, une personne observait d’un mauvais œil la popularité nouvellement retrouvée de la Castafiore. "



Alaude V. Castafiore | Alouette, gentille alouette... Ou pas ! [Terminée] B25y

Saint Cardellino A. Castafiore
- Dragon Céleste -

- Marie-Joie, 1er mai 1520 – Le jeune homme pris une grande inspiration avant de venir abattre avec légèreté son poing sur la cloison. Détaillant de ses yeux azurs la poignée couverte de délicates figure d’oiseaux, savamment dorées à la feuille, tandis qu’il attendait l’autorisation de l’habitante des lieux pour y pénétrer. Non pas qu’il en ait réellement besoin, mais si même eux, les êtres les plus distingués de ce monde commençaient à oublier les bonnes manières, le Monde courrait définitivement à sa perte…
Il ne lui fallut de toute façon pas attendre bien longtemps avant que la voix mélodieuse de son aînée, légèrement assourdie par la séparation de bois, ne se fasse entendre. Entrez ! L’héritier des Castafiore attendit une petite seconde, cela était de convenance lorsque l’on pénétrait dans la chambre d’une dame qu’elle fût de notre famille ou non, puis actionna le mécanisme lui permettant de libérer le battant.

En pénétrant dans la pièce, il put immédiatement remarquer la présence d’un étui à violon qu’il n’avait encore jamais vu sur le lit de sa sœur. Suivant son regard, cette dernière posa une main sur l’objet serti de perles, faisant mine de l’ouvrir. Oh ! Je vois que vous avez l’œil mon cher… Voici un instrument dont j’ai récemment fait l’acquisition. Voudriez-vous que je vous en joue quelques notes ? Lui demanda-t-elle.

Malgré le fait qu’elle soit à l’origine de la proposition, Saint Cardellino pu clairement déceler dans le ton de la jeune femme qu’il était attendu de lui qu’il la refuse. Son nez en trompette se fronça imperceptiblement, qu’à cela ne tienne, il n’avait de toute façon pas le loisir d’écouter un énième récital de l’Alouette. Ce ne sera pas nécessaire. Lui répondit-il avant de reprendre immédiatement. Nous ne sommes pas venus pour cela…

La Sainte marqua un temps d’arrêt, s’apprêtant à lui demander qui était ce « nous » dont il parlait ainsi. Elle avait pensé que son frère la visitait afin de lui demander de poser pour l’une de ses œuvres comme ils avaient pris l’habitude de le faire dernièrement. Néanmoins, a peine ses lèvres fines s’étaient-elles entrouverte pour laisser passer sa question que cette dernière mourut au fond de sa gorge. Les paupières de la jeunes femme s’ouvrirent plus que de raison, dévoilant l’éclat de surprise qui traversa ses orbes dorés.
Les sourcils vers le ciel, tant en signe de surprise que de pur incompréhension, elle dévisagea les malotrus qui étaient soudainement apparut dans le chambranle de sa porte. Là, devant elle, comme s’il s’agissait de la chose la plus banale au monde, se tenaient à présent une dizaine d’hommes vêtu de l’uniforme caractéristique des forces armées du gouvernement chargées de leur sécurité. Ses pupilles ambrées voyagèrent du groupuscule à la silhouette fine de son frère. Ce dernier n’affichait aucune émotion, son visage fin, d’une beauté telle que cela en était presque injuste, restant parfaitement impassible.

Voyant qu’elle n’obtiendrait aucune réponse spontanée de ce dernier, Alaude dû faire appel à toute sa force d’esprit pour reprendre contenance. Déglutissant discrètement afin de ne laisser en aucun cas transparaître le trouble auquel elle faisait face en cet instant, elle reprit d’un ton sceptique à l’égard des nouveaux venus. J’ignore la raison de votre présence au sien de ces murs sacrés. Elle prit soin de mettre une emphase toute particulière sur ce dernier mot, rappelant par la même qu’ils n’avaient rien à y faire. Mais j’espère que vous avez une raison suffisante pour justifier d’un comportement aussi déplacé. Se redressant, elle se tourna alors vers son frère. Je suis particulièrement surprise que vous ayez laissé faire cela, très cher frère. Moi qui vous croyais à la pointe de la bienséance et du décorum… Je ne saurais vous cacher ma déception.

Sans doute avait-elle pensé que le plus jeune, particulièrement attaché aux protocoles, se sentirait piqué dans son honneur après son injonction. Pourtant, ce dernier resta muet. Fermant douloureusement les yeux avant de secouer la tête en signe de négation.

L’aînée, visiblement perdue, finit cependant par comprendre la gravité de la situation lorsque l’un des gardes, le plus décoré de tous, s’avança dans sa direction. Ne bougeant pas d’un pouce, elle dû cependant réprimer un geste de recul lorsqu’elle aperçut entre les doigts de ce dernier la figure familière d’un bouquin. Elle put distinctement sentir son cœur manquer un battement alors que l’homme, leva le bras afin que l’objet se trouve à hauteur de ses yeux. La Sainte pu alors lire, sans aucun doute le titre d’un ouvrage qui n’avait rien à faire dans ce lieu. Un ouvrage qu’elle avait pris soin de cacher dans une pièce reculée de l’aile gauche du château. Un ouvrage qu’elle avait acquis seulement quelques jours auparavant après de nombreuses années de recherches infructueuses. Un ouvrage qui n’était qu’un élément infime de sa collection d’objets interdits. Un ouvrage intitulé « Capital du Gouvernement mondial » .

La Sainte avait pleinement conscience qu’il aurait été bien naïf de croire que les personnes présentes au sein de sa chambre puissent ignorer la nature de cet écrit. A fortiori depuis que son auteur avait additionné à son tableau d’injures à l’encontre de ses anciens comparses, l’humiliante libération des esclaves de Shabondy il y a trois ans de cela. Le sol semblait se dérober sous les pieds de la jeune femme, tant et si bien qu’elle perdit l’équilibre. Ne devant son salut qu’à la poigne de l’officier qui se tenait devant elle et venait de se saisir de son bras avec force.
En d’autres circonstances, elle se serait sans doute offusquée d’être ainsi touchée par un simple humain. Toutefois, l’homme ne lui laissa pas même le temps de réaliser ce qui lui arrivait. Alaude Valentina Castafiore, vous avez été reconnue coupable d’acquisition, de possession et d’usage de ressources illégales. Par la présente nous vous informons que, suite à la décision unanime des Trente, vous êtes dès aujourd’hui démise de votre titre de Sainte et, de ce fait, bannie à vie des Terres Sacrées de Marie-Joie. La voix grave et rauque eu l’effet d’un coup de massue. Elle, qui se sentait déjà défaillir à la vue de l’un des éléments de sa collections privées entre les mains de l’inconnu, accueilli la nouvelle avec difficulté. Son esprit ne semblant pas vouloir traiter l’information dont on l’avait ainsi bombardé. Elle observait avec ahurissement le combattant, l’air hagard. Comme pour minimiser le drame qui venait de s’abattre sur sa pauvre personne, ce dernier se senti visiblement obligé d’ajouter d’un ton quelque peu moins assuré. Les Saints se sont montrés miséricordieux en ne demandant pas de sanction plus sévère. Je ne saurais que trop vous conseiller de vous plier à cette décision si vous ne souhaitez pas aggraver votre situation.

Miséricordieux ? Le souffle de l’Alouette, rendu tremblant par la panique et l’incompréhension, se bloqua. Les images des tortures infligées à Kropotkine lui revinrent en mémoire soudainement. Était-ce le sort qui l’attendait si elle tentait de se rebeller ?

Je suis désolé que nous en soyons arrivés là. Reportant de nouveau son attention sur Cardellino, alors qu’elle n’avait rien à y faire, Alaude aperçu distinctement la satisfaction qui illuminait l’ensemble de ses traits. Quiconque aurait pu en comprendre les raisons. Il ne fallait pas être né de la dernière pluie pour faire le calcul et deviner que le jeune homme avait joué dans cette histoire un bien plus grand rôle qu’il ne voulait bien le laisser paraître. Même l’homme le plus naïf aurait pu déceler dans son ton la complaisance et l’hypocrisie. Mais, en cet instant, la Sainte se laissait encore aller au déni. Cela n’était pas possible. Comment aurait-il pu ? Comment aurait-il su ? Son frère, si à cheval sur l’honneur, si frêle, si facile à manipuler ne pouvait avoir participé à cette débâcle. Comme pour répondre à ses questions muettes, ce dernier se rapprocha d’elle avant de lui murmurer à l’oreille, le ton empli de suffisance. Ne m’en veuillez pas, ma chère. Voyez-vous, le savoir est une arme que je ne pouvais vous laisser posséder. Vous et votre égoïsme nous auriez tous mené à la perte…

Se redressant, il caressa doucement la joue blafarde de la jeune femme de sa main manucurée. Un air faussement compatissant placardé sur sa face d’ange, il reprit, cette fois plus clairement afin que tout le monde puisse l’entendre. Accompagnez-la jusqu’aux remparts.

La réalisation la frappa alors soudainement, l’ahurissement laissant alors place à une colère sans nom. Effectivement, Cardellino ne s’était pas juste contenté de participer. La jeune femme ignorait par quelle magie il était parvenu à comprendre son petit manège, peut-être l’avait-il fait suivre ? Peut-être que les langues avaient finies par se délier sans qu’elle ne l’apprenne ? Peut-être même avait-elle été trahie par l’un de ses fournisseur ! Les Quatre-Vingts lui en soient témoins, elle n’aurait pas pu plus se moquer du comment du pourquoi. Seul lui importait le fait qu’elle venait d’être trahie par nul autre que son propre frère. Cette vermine ! Cette raclure ! Cette enflure !

Alors qu’elle listait l’ensemble des insultes de son répertoire afin de trouver celle qui conviendrait le mieux pour qualifier son cadet. Elle sentit plusieurs paires de bras la tirer en arrière. L’extirpant de sa réflexion.

Attendez ! Cardellino ! Face à son cri, le Saint fit signe aux soldats de patienter un instant. Invitant sa sœur à continuer d’un geste de tête. Cette dernière, peu encline à accepter bien sagement la situation, ne comptait pas se laisser faire aussi simplement. Oh… Bien sûr, il paraissait évident qu’elle ne pouvait aller à l’encontre des manigances du jeune homme. A présent que les trente familles s’étaient prononcés en faveur de son bannissement, nul retour n’était envisageable. La jeune femme, loin d’être idiote, ne le savait que trop bien. Aussi douloureux cette décision soit-elle, il lui fallait se résoudre à accepter sa chute. Cependant… Il lui restait une dernière carte à jouer. Certes, le prix de cet ultime coup de poker s’avérait être incommensurable, néanmoins, elle avait appris avec le temps que les récompensent étaient bien souvent à la hauteur du sacrifice. La mâchoire serrée par la rage, la bleuté puisa au plus profond d’elle-même avant de reprendre. Vous ne pouvez tout de même pas me chasser ainsi sans même me laisser de quoi survivre. Mes habits, mes bijoux, mon… Mon violon… Je… Elle ravala sa salive avec difficulté, son instinct primaire et son égo luttant vainement pour empêcher les mots de s’échapper. Je vous en conjure laissez-moi au moins les emporter avec moi.

Un rictus amusé étira les lèvres de son interlocuteur. Ce n’était pas tous les jours qu’il était donné de voir un Dragon Céleste supplier. Encore un spécimen aussi fier que l’Alouette elle-même. Il fit mine de réfléchir un instant et Alaude su qu’elle avait gagné. Cet idiot… Depuis l’enfance, il avait toujours suffi à la bleuté de brosser l’égo du garçon dans le sens du poil pour en faire ce qu’elle souhaitait. La jouissance de voir sa propre sœur à ses pieds, le regard empli d’une crainte qu’elle ne lui avait jamais accordé jusqu’à présent était suffisante à lui faire perdre toute notion de réflexion.
Inspiré par la déchéance de son aînée, le jeune Saint observa sans vraiment le regarder l’étui perlé abandonné sur les draps de soie, une idée germant dans son esprit. Père et Mère ont raison... Ma générosité me perdra un jour. Il avança vers l’objet pour s’en saisir avant de revenir auprès de l’Alouette pour le lui tendre. Soit, je vous accorde le droit de garder votre instrument. J’ai entendu dire que les mendiants avaient plus de chance de s’en sortir lorsqu’ils divertissaient les passants S’il avait prononcé ces derniers mot en affichant une moue désolée, ses paroles empreintes d’une condescendance sans nom ne trompaient personne. Si bien que même les gardes chargés de faire exécuter sa sentence lancèrent des coup d’œil inquiets dans sa direction.

Intérieurement, Alaude bouillonnait, mais elle refusait d’accorder à ce, passez lui l’expression, petit fils de pute – après mûre réflexion elle n’avait pas trouvé de qualificatifs plus opportun –, le plaisir de la voir perdre le contrôle. Elle préféra donc se concentrer sur le soulagement qu’elle ressenti lorsque ses doigts fins vinrent saisir l’objet avec toute la dignité dont elle pouvait faire preuve. Il avait mordu à l’hameçon. Elle s’était douté qu’en citant des choses bien plus précieuses et utile que cet instrument, le choix de son frère se porterait sur ce dernier. Ce que cet imbécile ignorait, c’est que la valeur d’une boite ne se jugeait qu’à son contenant. Elle avait d’ailleurs craint qu’il n’ait l’idée de vérifier ce qui se trouvait à l’intérieur, fort heureusement le besoin de rabaisser la première née de ses parents lui avait fait oublier sa méfiance.

La poigne exercée par ses bourreaux sur ses bras fragiles se raffermit. Prise en tenaille par les officiers gouvernementaux, sans possibilité d’échappatoire, malgré toute la dignité dont elle voulait faire preuve, Alaude expérimenta alors la pire humiliation qui soit pour une Tenryuubito.

La marche de sa chambre aux portes de Marie-Joie fut sans doute le moment le plus long qu’elle ait jamais eu à vivre. Arrivée sur place, elle constata non sans surprise qu’un petit comité s’était réuni pour s’assurer de son « bon » départ. Ses dents, fermement agrippées à sa lèvre inférieure, comme pour se convaincre qu’elle avait encore une emprise sur quelque chose entaillèrent la chaire jusqu’au sang. Le dos droit, elle affronta sans faillir le regard réprobateur de ses pairs, à commencer par ses propre parents. Leur présence au sein du cortège ainsi que l’indifférence qu’ils lui accordèrent n’étaient peut-être pas des plus surprenantes, mais elles ne manquèrent pas de lui enserrer les cœur malgré tout. Ses doigts fins, fermement enroulés autour de la poignée surmontant de la malle protégeant son instrument, elle fit mine de ne pas entendre les rires insidieux des domestiques. En leur sein, elle reconnut nombre de têtes, à vrai dire, la plupart de ceux qu’elle avait envoyé faire ses achats s’étaient déplacé pour assister à son départ… C’était donc ça, ils l’avaient trahie et abandonnée. Trop occupée à jouer de ses charmes, l’Alouette avait oublié qu’elle n’était pas le seul oiseau à évoluer au milieu des dragons. Malgré les larmes qui ruisselaient inlassablement le long de ses joues, elle put saisir une dernière fois le regard turquoise de son frère. Un frisson de dégout la parcouru alors qu’elle aperçut distinctement le visage pourtant habituellement si pur du jeune homme se déformer en une grimace de pure malice avant que l’imposante porte principale de la bâtisse de dieux ne se referme définitivement devant elle.  


" Il y a des choix que l'on regrette amèrement.

Oh... Pas toujours dans l'immédiat. Certaines erreurs prennent des mois, voire des années à se dévoiler à nous. La vérité mon ami, c'est que nous avons tous au-dessus de nos têtes une épée de Damoclès qui attend son heure pour tomber. Impartiale. Si vous tendez bien l'oreille, peut-être même pourrez-vous entendre le craquement sinistre du fil cédant sous son poids à mesure que le temps avance. Et le jour venu, elle s'abattra. Vous pourrez vous entourer des alliés les plus puissants qui soient, des murailles les plus élevées ou même vous cacher au plus profond de la Terre... Elle vous trouvera. Tranchant sans répit, encore et encore, toutes les défenses que vous vous serez évertué à mettre en place jusqu'au moment où vous lèverez les yeux au ciel pour constater qu'elle n'est plus qu'à quelque centimètre de vous.

Vous pensez sans doute que je fais ici référence au sort qu'a connu notre malheureuse héroïne. Mais détrompez-vous, car s'il ne faisait aucun doute qu'une épée était déjà en chemin pour mettre un terme aux agissements de cette dernière, vous comprendrez bientôt qu'elle n'était pas celle pour qui la vie ne tenait qu'à un fil. Non... En ce jour funeste, celui qui scella son destin et porta la première entaille au lien qui le maintenait jusqu'à présent en vie n'était autre que Saint Cardellino.

Dès l'instant où il avait fait le choix d'écarter sa sœur des Nobles du Gouvernement, il s'était condamné. Car il avait oublié un point essentiel, un point très important. Comme cette pauvre âme le disait lui-même et l'avait si bien compris : le savoir, mon cher, est l'arme la plus redoutable de ce monde. Mais ce qu'il avait négligé dans sa précipitation, c'est que ce dernier ne se limite pas au simple fait "connaître la vérité". Car l'on peut tout aussi bien savoir qu'il existe une vérité que nous ne connaissons pas. Et, dès lors, il est impossible d'ignorer. Alaude Castafiore "savait" et rien ne pouvait plus l'empêcher de vouloir "connaître". "



- Shabondy, la nuit du 20 juillet 1520 - A l’image de la personne à qui elles appartenaient, les mains de la pianiste dansaient gracieusement sur les touches noires et blanches de l’instrument. Les notes mélancoliques ne parvenant cependant pas à faire taire le brouhaha ambiant du réfectoire de l’auberge. Assise devant le comptoir situé au fond de la salle, la jeune femme qui avait réservé l’une des chambres de l’établissement un peu plus tôt écoutait d’un air absent cet air familier. Alors qu’elle sirotait son cocktail, une voix douce échappa par automatisme à sa trachée pour accompagner la musicienne. Le chant ne manqua pas d’attirer l’attention de quelques curieux suffisamment proches pour le détecter. Certains prirent la peine d’observer quelques instants les traits fins et la chevelure bleutée de cette interprète surprise. Faisant fi des orbes scrutateurs posés sur sa personne, Alaude continuait son œuvre, charmant son auditoire. Elle semblait n’avoir que faire de ce qui pouvait l’entourer, ses yeux fixant sans réellement la voir l'étui à violon finement serti de perles posé devant elle.

Bientôt, l’ensemble des convives s’était tu, écoutant avec attention la cantatrice. Prise d’un élan, sans ravivée par cette partenaire surgie de nulle part, la musicienne commença à agrémenter son interprétation d’accords plus complexes. Les orbes ambrés de la sainte déchue abandonnèrent enfin leur contemplation pour s’orienter vers la scène. La brunette assise dernière son piano hochant la tête, tant pour l’encourager à continuer que pour la remercier. Cela faisait bien longtemps que plus personne ne prenait le temps d’écouter ses représentations…

Un homme émit un grognement réprobateur, dévisageant de la tête aux pieds l'Alouette avant de retourner à la boisson qu’il avait délaissée. Portant sa pinte encore bien trop pleine à son goût à ses lèvres, il grommela quelque chose à propos d’inconscients qui osaient déranger sa tranquillité.

La chanson arriva finalement à son terme, les dernières paroles de cette dernière s’extirpant à regret des lèvres d’Alaude tandis que l’assemblée s’embrasait à nouveau, applaudissant les deux artistes avec entrain.

C’est une bien belle voix que vous avez là miss ! La jeune chanteuse détacha son regard de la pianiste, dardant ses iris dans les perles noires du barman qui l’avait ainsi interpellée. Elle fronça les sourcils, ne semblant pas saisir l’intérêt de son intervention. Bien évidemment que sa voix était belle. Cela paraissait évident, il ne pouvait en être autrement, elle était l’héritière des dieux, elle était… Ah. Ses pensées moururent alors qu’elle se rappelait douloureusement qu’elle n’était plus sur la Terre Sainte. Ici personne ne savait qui elle était, personne ne louait sa voix pour obtenir ses faveurs et personne n’avait que faire de l’attribut divin de son talent. L’homme laissa échapper un petit rire face à son air circonspect tandis qu’il saisissait le verre vide que lui tendait un client, ne la lâchant pas du regard pour autant. Plus vif que l’éclair, il se retourna pour ouvrir le robinet de l’un des multiples fûts situés derrière le bar, remplissant d’un geste expérimenté le récipient du liquide ambré que ce dernier contenait. Alors que la mousse se formait, il reprit la parole à l’intention de la bleutée. Et c’est un bien joli étui que vous possédez ! Il rendit sa boisson à l’homme, récupérant au passage les quelques berrys que lui avait préparé celui-ci. A votre place, je ferais attention… La plupart des hommes ici n’ont pas peur de l’uniforme et je suis prêt à mettre ma main à couper que deux ou trois d’entre eux sont curieux de savoir s'ils y trouveront réellement ce qu'il est sensé contenir quand ils l'ouvriront.

visiblement peu sensibles aux mises en garde de son interlocuteur, Alaude haussa les épaules avec nonchalance, lui adressant tout de même un regard de connivence. Il était loin d'être idiot, elle lui accorderait au moins ceci. Même Cardellino ne s'était pas interrogé lorsqu'elle lui avait demandé de lui accorder une dernière requête... S'il avait fait preuve d'un peu plus de jugeote, à l'image du bougre qui lui faisait face, peut-être aurait-il pris la peine de vérifier le contenu de sa boite. Mais les nobles du Gouvernement n'étaient pas familiers de la valeur des choses. Pour eux rien n'était trop beau, ni trop précieux, ni même trop cher dès lors qu'un simple claquement de doigt de leur part suffisait à obtenir toutes les richesses de la Terre et bien plus encore. Son cadet ne l'avait d'ailleurs privée de ses trésors que par désir de lui retirer ce qui lui appartenait, nul doute que sa précieuse collection avait fini dans un placard, oubliée de tous dès l'instant où l'Alouette avait posé le pied en dehors des limites de la Terre Sainte. Seul un humain ayant connu la misère trouverait cela étrange de protéger un instrument de musique avec un objet bien plus fragile encore.

Ne vous en faites pas… Son contenu sera devenu inutile avant qu’ils n’essaient de me la dérober. Lui répondit-elle sur un ton quelque peu las. Comme pour prouver la véracité de son affirmation, elle ouvrit d’un geste distrait le coffret. Se penchant en avant pour mieux observer ce qu’il contenait, le serveur manqua de s’étouffer avec sa propre salive lorsqu’il vit ce qui s’y trouvait. Au centre de l’écrin tapissé d’un velours bleu roi trônait un fruit. Semblable à une pêche à la couleur irisée, les tourbillons parcourant l’ensemble de la peau duveteuse de l’aliment ne permettaient pas d’émettre le moindre doute quant à sa nature.

C’est…?! L’homme laissa échapper quelques jurons, les yeux écarquillés par l’incrédulité. Les clients alentours lancèrent des coups d’œil qui, s’ils se voulaient discrets, ne l’étaient pas pour autant dans leur direction. Vous… Comment ?! Rangez ça, vous allez vous attirer des ennuis !

La jeune femme sorti le fruit du démon de son réceptacle, ne s’alarmant pas le moins du Monde des conséquences qu’un tel acte pouvait engendrer dans un endroit comme celui-ci. N’importe qui aurait pu se jeter sur elle à cet instant précis pour lui voler son bien… Toutefois, l’Alouette n’offrit pas le luxe aux personnes les plus mal intentionnées de l’assemblée de mettre à exécution de tels plans. Prenant une grande inspiration, elle porta l’étrange pêche à ses lèvres avant de mordre à pleines dents dans sa chaire. Sans surprise, son visage se déforma en une grimace de dégoût à mesure qu’elle mâchait. La mâchoire crispée, elle se força à avaler sa bouchée avant de finir d’une traite son verre dans l’espoir de faire passer le goût.

Elle se racla la gorge pour se redonner contenance. Après avoir replacé le fruit à présent inutilisable dans l'étui qu’elle referma dans un claquement, elle descendit de son siège. Cela devrait régler le problème… Dit-elle simplement. Comme si elle ne venait pas d’accomplir un acte qui allait changer sa vie de façon irréversible. Après tout… Elle avait pondéré ce choix toute la journée. Sa décision était déjà prise. Le temps n’était plus au questionnement.

Sans un mot de plus, elle quitta la salle, le coffret dans une main, ses clefs de chambre tintant dans l’autre, le tout sous le regard ahuri d’une partie de l’assemblée.

Quelques instants plus tard, elle rentra dans sa chambre l’air hagard, comme dans un état de transe. Appuyant son dos contre la porte sans même prendre la peine d’éclairer la pièce, elle se laissa glisser lentement le long du battant en bois jusqu’à toucher le sol. La hanse de la malle perlée, qu’elle avait fermement tenue jusque-là, échappa à l’emprise de ses doigts fins, s’échouant mollement à ses côtés. La jeune femme leva les yeux en direction de la petite fenêtre placée sur le mur lui faisant face tandis qu’elle étendait ses jambes devant elle. Paumes ouvertes vers le ciel, son regard d'or vînt s’ancrer pendant ce qui lui parut être une éternité dans la lumière froide de l’astre lunaire.

Dans son esprit, le silence ambiant fut remplacé par les cris d’une foule exaltée se levant comme un seul homme pour l’acclamer après l’un de ses concerts au château de Marie-Joie. L’image des grandes étendues verdoyantes entourant le domaine de Dieux s’imposa à elle. Puis deux yeux rubis. Ceux d’une jeune esclave. Les applaudissements laissèrent place aux cris d'agonie et la danse des feuilles sous le vent fut remplacer par celle des flammes. Ses paupières se fermèrent douloureusement et elle ramena ses genoux à la hauteur de son torse. A dire vrai… Si elle devait être tout à fait honnête avec elle-même, l’ancienne Dragon Céleste avait toujours su que cela finirait ainsi. Depuis ce jour fatidique où elle avait entendu la voix du Roi des Pirates s’élever depuis l'image projetée par l'escargo-projecteur. Depuis que, dans son esprit d’enfant, la vérité avait commencé à s’immiscer.

Elle avait arrêté de compter depuis bien longtemps le nombre de fois où elle avait ouvert le couvercle de l'étui depuis sa déchéance, faisant mine d'inspecter son vieil instrument, hésitant à passer à l'acte avant de la refermer promptement. Elle s'était convaincue qu'il ne s'agissait là que d'un énième trésor à conserver. L'une des pièces manquantes à sa collection. Ni plus, ni moins. Après tout... Les Dragons Célestes n'avaient pas besoin d'abandonner leur corps au Démon. Pourquoi s'embarrasser d'une malédiction alors que l'on est déjà un dieu ? Seul un fou aurait pu agir ainsi et souiller sa perfection au profit d'un pouvoir incertain...

Un rictus s'empara de la commissure de ses lèvres. Ne pas salir son corps avec un fruit ? Quelle blague ! Elle aurait dû le manger dès l’instant où elle l’avait acheté ! Si "Ils" étaient si puissants alors pourquoi tant de restrictions ? Pourquoi tant de secrets et de non-dit ? Pourquoi s'était-elle évertuée à cacher le fait qu'un tel fruit s'était retrouvé en sa possession ? Si "Ils" étaient la loi, pourquoi aller à son encontre ? La réponse était simple, instinctivement elle l'avait toujours connue. "Ils" n’étaient pas de dieux. "Ils" n’étaient qu’une bande d’humains, faibles et craintifs. Une assemblée de lâches, tremblants à l’idée que quiconque puisse remettre en question leur pouvoir, s'isolant dans leur belle bâtisse comme si ne pas voir la révolte grondant en bas de leur précieuse montagne rouge allait l'effacer... Tout ça parce qu'un vulgaire Homme-Poisson leur avait mis une fessée.

Pathétique.

Et à présent ? A présent elle avait commis le plus grand péché qui soit. Elle avait abandonné le peu de sainteté qui restait en elle. Si tant est qu’elle n’ait jamais été sainte ne serait-ce qu’un instant. Emportée par les remords et la nostalgie, encouragée par l’alcool, la jeune femme avait finalement sauté le pas… C’était un acte impulsif et, bien qu'il n'ait pas été totalement irréfléchi, elle n’était pas tout à fait sûre de l’assumer pleinement. Mais quoi qu’il arrive, elle ne pouvait plus revenir en arrière à présent.

L’Alouette s’accorda quelques secondes supplémentaires pour se calmer avant de se relever péniblement. Le doute avait laissé place à la conviction. Elle savait à présent ce qu’elle devait faire et comment le faire. Un peu plus tôt, alors qu’elle avait observé ces pèquenauds accrochés à ses lèvres pour boire chaque parole de sa chanson, une idée avait germée. Une idée aussi vicieuse qu’ingénieuse.
Ses pairs l’avaient rejetée, elle qui pourtant n’avait pas peur d’affronter la vérité et d’admettre ses vices. Ils avaient vu en elle un danger, un être impropre à son titre céleste… Qu’à cela ne tienne. Pour la première fois depuis très longtemps, cette bande d’idiots avait vu juste. Tout comme eux, elle était salie, corrompue, cruelle et matérielle. Tout comme eux elle n’agissait que pour son propre intérêt. Sa voix n’était en rien l’objet du divin, son charme et son talent n’avaient aucunement pour but de l’aider à accomplir de saints desseins.

Son frère avait cru que la priver de son statut suffirait à l'empêcher de leur nuire, il s'était trompé et avait péché par orgueil. A moins qu'il ne se soit agi de pure bêtise ou d'ignorance ? Toujours était-il qu'à présent qu'elle ne risquait plus de mettre en danger sa propre position en cherchant à connaître la vérité, elle n'avait plus besoin de se limiter. Et si le Gouvernement trouvait à y redire et osait, ne serait-ce qu'un instant, la censurer ou même la condamner, elle ferait savoir à tous ces pauvres gens naïfs que leurs si détestés dieux pouvaient chuter. Que les remparts immaculés entourant leur si précieux Paradis ne sauraient les protéger indéfiniment. Qu'il était inutile de posséder la force d'un dieu des mers pour aller les y chercher et que le plaisir de les voir chuter, sans même avoir à ne bouger ne serait-ce que le petit doigt pour les pousser, serait cent fois, mille fois plus satisfaisant. Sans leur auréole de verre, ils seraient bien obligés de respirer le même air que les plus pathétiques de leurs esclaves. Elle en était devenue la preuve vivante.

L'artiste s’en fit la promesse. Son timbre hypnotisant ne serait plus qu’un moyen de faire entendre sa vengeance et les notes prenant vie grâce à ses doigts agiles ne seraient plus qu’un plateau pour la présenter au Monde. Elle allait découvrir ce que ses ancêtres avaient tant voulu cacher et elle n’aurait de répit que lorsque toutes les bouches du Nouveau Monde, de Grand Line et des blues confondues entonneront en cœur les chants contant la véritable histoire de ce Monde. On avait voulu la priver de ses droits divins ? Soit. Elle deviendrait donc cette petite voix qui s’immisce dans l’esprit de chacun et susurre des paroles aussi insidieuses que séduisantes. Elle deviendrait cette entité effrayante que les hommes, trop couards pour affronter la vérité, appelaient le Diable.

Mais dans un premier temps... Elle avait des cours de langue à prendre.


" Et bien mon ami... Je vous vois au bord de votre siège. Vous qui étiez si dubitatif à son début, vous me semblez à présent bien curieux de connaître la suite de mon récit. Je vous la conterai avec plaisir, toutefois regardez à la fenêtre : le soleil ne va pas tarder à pointer. Il est temps pour moi de vous laisser. Morphée m'appelle et je ne saurais me soustraire à son étreinte. Nous pourrons continuer ce récit demain, si le cœur vous en dit et que l'impatience vous dévore.

Mais si la véritable morale de cette histoire peut attendre un autre jour... Sachez néanmoins mon ami qu'une vie de vengeance ne rencontre que rarement une fin satisfaisante et que le savoir peut se révéler bien plus cruel encore que la douce ignorance. "




Dernière édition par Alaude V. Castafiore le Mer 2 Sep - 2:24, édité 3 fois
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Alaude V. Castafiore
L'Alouette
posté le Mer 2 Sep - 2:10

Hellow~! Je vous annonce officiellement que ma présentation est terminée.
En vous souhaitant une bonne lecture ! Et bon courage !
Williams P. Blake
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Williams P. Blake
Les mille lames
posté le Mer 2 Sep - 21:53
Bonsoir à toi ! Il m'en aura fallu du temps pour lire tout ça, mais ça valait le coup crois moi.

On va procéder comme d'habitude en commençant par le fond : c'est incroyable. L'ambiance de Mariejoa, l'évolution psychologique d'Alaude, sa curiosité et sa soif d'apprendre, la caractérisation de ses parents, d'Eva ... Tout est nickel. Tu as su t'approprier de la meilleure manière possible un endroit à peine exploré dans le manga, tout en mélangeant tout ça avec le contexte du forum en lui même. Le poids des actions de Xoth sur les saints, leurs peurs, leur monstruosité, tout est parfaitement retranscrit et quel plaisir ça a été de lire tout ça.

On a tout ce qu'on peut attendre d'une présentation, un personnage intéressant et original, une évolution intéressante, le tout exploré en détails. La seule frustration que j'ai eu étant que tu ne te sois pas penché un peu plus sur la transition de la vie de sainte d'Alaude à sa vie civile, j'aurais aimé en savoir plus là dessus, comment elle a réussi à s'intégrer, comment elle a vécu ce changement etc ... Bien sûr, ça ne manque absolument pas, c'est juste que personnellement, j'aurais aimé en voir plus tellement le reste est bon.

Dans la forme tout est carré, c'est aéré, imagé, extrêmement bien écrit ... Ton style est super agréable à lire et seules quelques fautes, assez rares pour que ça n'influe en rien ta notation, tâchent un peu ce tableau parfait. Au vu de la longueur de ta présentation, je ne peux vraiment pas t'en tenir rigueur, sachant qu'il faudrait plusieurs relectures pour s'en débarrasser.

Pour finir, je tiens vraiment à ce que tu saches que ta présentation est certainement l'une des meilleures que j'ai lu sur un forum One Piece et dieu sait que j'en ai lu.

Après tous ces éloges, tu te doute que tu es bien évidemment validée ! Tu récupères donc 10 630 Dorikis, en comptant ton parrainage et peut commencer ton aventure à la recherche de la vérité en tant que civile avec le pouvoir du Ito Ito no Mi ! Tu n'écopes d'aucune prime pour le moment mais sache que ça peut arriver très rapidement au vu du savoir que ton personnage détient. Je t'invite à poster à la suite de ta Vivre Card qui va être générée sous peu, en utilisant son modèle, afin de pouvoir finaliser la création de ton personnage et pouvoir rp tranquillement !  Félicitations à toi !
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